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(Easybourse.com) Retrouvez en cliquant ici l'article Communication financière et actifs immatériels : quels enjeux ?

Les investisseurs vous semblent-ils prendre suffisamment en compte les Actifs Immatériels (AI) ?
Bien entendu, certains analystes en pointe sur le sujet ont une attitude ouverte et d'une manière générale, il est vrai que les départements d'analyse financière commencent à mettre en place des développements méthodologiques dans ce domaine. Mais, les investisseurs ne semblent pas dans leur majorité fortement demandeurs d'informations relatives aux AI.

Peut-être est-ce du fait d'une difficulté à établir une correspondance entre ces actifs et les value-drivers financiers sous-jacents aux modèles de valorisation des titres qu'ils utilisent habituellement. En quoi les actifs immatériels ont-ils un impact sur la croissance future, la rentabilité d'exploitation, les cash-flows ? A cet égard, par une communication enrichie sur ces thématiques, les émetteurs pourraient avoir un devoir de pédagogie de marché vis-à-vis des analystes ou des investisseurs.

Pour convaincre les investisseurs, les émetteurs devraient-ils développer une information extra-financière relative aux AI en complément de la communication financière ?
La vraie crédibilité de l'existence et de la valeur des AI repose sur leur intégration dans la stratégie de l'entreprise de façon explicite par le management. En ce cas, il n'y a plus de cloisonnement entre les indicateurs financiers et extra-financiers. L'exploitation des AI et les indicateurs extra-financiers qui en mesurent la performance font pleinement partie de la gestion de l'entreprise. L'entreprise peut alors faire le choix de sélectionner certains d'entre eux pour les communiquer aux marchés.

Pour faciliter l'analyse financière comparée, serait-il pertinent de se diriger vers une normalisation sectorielle de ce reporting extra-financier ?
Les AI étant au service de la stratégie, ils peuvent donc différer significativement en fonction du business model des acteurs d'un secteur. Il pourrait donc être difficile d'aboutir à un consensus sectoriel autour des composantes d'un reporting extra-financier.

Néanmoins soyons pragmatiques : arriver à ce résultat doit s'analyser secteur par secteur en fonction de leurs spécificités respectives sous condition d'une taille critique et représentative de l'échantillon d'entreprises concernées. A titre comparatif, dans le secteur de l'hôtellerie, on peut observer que les acteurs sur le marche nord-américain, mettent assez largement en valeur les marques, le réseau de distribution tant pour leur communication financière qu'extra-financière.

Chez ACCOR, quels seraient les AI clés ?
Dans une activité de services comme l'hôtellerie, les AI au service de notre stratégie de développement sont le capital humain et les marques. Nous avons en effet orienté notre croissance vers plus de franchises et de contrats de gestion tout en nous dégageant des investissements immobiliers.

Il nous a donc fallu repositionner et renforcer nos marques pour rentabiliser notre parc d'hôtels : compte tenu de l'environnement propre a chaque hôtel, une marque d'exploitation est choisie et le standing de l'hôtel mis en cohérence. Dans ce contexte, le capital humain a un impact à intensité variable sur la valeur, qu'il s'agisse du franchisé (qui gère l'hôtel, recrute, forme et rémunère ACCOR par des royalties) ou le Directeur Général, formé par ACCOR, en contrat de gestion (qui recrute, forme et verse des management fees à ACCOR)

Quel rôle jouent l'innovation et le capital client sur votre performance ?
L'innovation est un immatériel important dont le rôle devrait s'accroitre. Nous disposons d'une cellule innovation et design, travaillant à la fois sur le hard (construction d'hôtels, éclairage, WIFI, bien-être, odorat) et le soft (qualité du service, accueil, sécurité, présence, attention à des catégories spécifiques de clients). Les perspectives de développement sont beaucoup orientées vers la captation de l'innovation externe, dont les «guest-surveys» sont un élément.
 
Les bases de données CRM constituent le socle de l'exploitation de notre capital client, les perspectives de progrès tournant autour d'une relation de plus grande proximité avec le client. Il s'agit d'anticiper leurs besoins pour structurer une offre «customisée», quasiment en fonction des habitudes spécifiques. Nous devons faire montre de pro-activité face à un client qui est loin d'être captif car de plus en plus éduqué, zappeur et chercheur de la bonne affaire. Il faut savoir attirer et fidéliser.

Comment pourrait s'intégrer les enjeux de l'immatériel dans le paysage de la gouvernance ?
En matière de transparence et de communication, il y a souvent pléthore d'informations sur les AI, il n'est pas rare d'avoir des dizaines de pages sur les RH mais c'est souvent pour être en conformité avec la réglementation alors qu'une bonne gouvernance serait de mettre ces AI en conformité avec la stratégie.

Au regard du risk-management, le risque est souvent considéré dans sa composante négative par les investisseurs. Il serait certainement profitable de mieux argumenter les fondamentaux de la valeur de l'entreprise au travers des AI et de démontrer que les risques qui s'y attachent font l'objet de procédures de management et de contrôle. La prime de risque affectée à l'émetteur par les investisseurs pourrait en être favorablement impactée !

In fine, le rôle du Président est essentiel car il symbolise par son charisme et sa capacité à diffuser les valeurs, un message de confiance qui repose sur les éléments de pérennité de la performance essentiellement constitués par les AI. Autour de lui, le Conseil d'Administration est le garant de cet argumentaire autour de la valeur.

Interview réalisée par les étudiants de la Tribune Sciences de l'Immatériel
Sous la direction de Marie-Ange Andrieux - Deloitte - Directeur de la Tribune Sciences Po de l'Immatériel

- 04 Aout 2009 - Copyright © 2006 www.easybourse.com

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