Zurich (awp) - Un neurochirurgien officiant pour la clinique privée Ars Medica, appartenant à Swiss Medical Network, aurait procédé à plusieurs interventions fictives. Suspendu depuis une semaine suite aux révélations parues dans le Caffè della domenica, il est soupçonné entre autres choses de fraude aux assurances sociales et de faux dans les titres.

Sollicité par AWP, le groupe Swiss Medical Network, lui-même détenu par le groupe fribourgeois Aevis, coté sur SIX, a précisé lundi soir que le médecin indépendant suspendu était agréé au sein de la clinique depuis 2013.

Une porte-parole a assuré que la clinique avait reçu une demande d'information émanant du ministère public tessinois concernant "certains dossiers" sans toutefois savoir sur quoi portait l'enquête jusqu'à la publication de l'article du Caffè.

"Afin de dissiper tout doute chez les patients et cela quand bien même la justice nous ait indiqué que la sécurité des patients n'a jamais été compromise, nous avons ouvert une enquête interne et pris la décision de suspendre de manière temporaire et préventive l'activité du médecin concerné", a-t-elle ajouté.

Petite incision

Le premier cas incriminé remonte à fin octobre 2018. Une patiente âgée de 74 ans souffrant de douleurs à une jambe avait subi une foraminotomie (opération du dos pour soulager la pression exercée sur des nerfs compressés, ndlr) dans la clinique précitée.

Souffrant toujours des symptomes préopératoires plusieurs semaines après l'intervention, elle s'est rendue à l'hôpital régional de Lugano (Civico) fin janvier 2019 pour y effectuer de nouveaux examens.

Ceux-ci ont révélé qu'il y avait bien eu une petite incision sur le dos de la patiente, mais en aucun cas une foraminotomie, comme cela avait encore été réaffirmé à la patiente par le neurochirurgien d'Ars Medica, selon les propos recueillis par le dominical tessinois.

L'unité neurologique du Civico a signalé le cas au médecin cantonal. Le 8 février, ce dernier a fait part au parquet par écrit de ses "fortes suspicions" que l'intervention ait été fictive, et de son inquiétude face à un "possible danger pour la santé publique".

Dans sa lettre, il énumère différents délits dont il soupçonne le spécialiste d'Ars Medica, parmi lesquels "lésions graves et intentionnelles au détriment de la patiente", fraude aux assurances sociales, ainsi que faux dans les titres et certificats. Le 12 février, la procureure demande au médecin cantonal de lui signaler d'éventuels autres cas suspects.

Quatre cas signalés

Dans les mois qui ont suivi, trois autres cas présentant les mêmes pathologies neurologiques ont été rapportés aux autorités judiciaires.

Interrogé par le Caffè, le directeur d'Ars Medica, Fabio Rezzonico, a assuré que les rapports médicaux des quatre interventions incriminées avaient été placées sous séquestre par la magistrature après la signalation de chaque cas.

La suspension du médecin sera effective "jusqu'à clarification des faits et l'obtention d'un avis favorable de l'autorité cantonale de surveillance sanitaire", a déclaré la porte-parole de Swiss Medical Network, ajoutant que le groupe avait demandé au ministère public de lui préciser les griefs afin de pouvoir prendre, le cas échéant, "toute mesure nécessaire".

Ars Medica fait partie du groupe Swiss Medical Network depuis 2012. Au Tessin, le réseau comprend également la clinique privée Sant'Anna, qui avait été au coeur d'un autre scandale médical retentissant, révélé par le même dominical.

buc/fr