Parmi les entreprises du S&P 500 qui ont communiqué sur leurs comptes du deuxième trimestre, les "guidances" négatives l'ont emporté sur les positives dans une proportion de 3,8 pour une, soit le ratio le plus élevé depuis le troisième trimestre 2016 quand les entreprises américaines sortaient de quatre trimestres de baisses de leurs résultats, d'après les données d'IBES Refinitiv.

Le ratio moyen pour les quatre trimestres précédents était de 1,9 pour 1.

Ce pessimisme se retrouve dans les estimations des analystes pour les bénéfices des sociétés du S&P, désormais prévus en repli de 0,4% par rapport au deuxième trimestre 2018 selon Refinitiv.

Alors que les trois grands indices de Wall Street viennent de battre leurs records dans l'anticipation d'une baisse des taux de la Réserve fédérale en fin de mois, certains stratèges redoutent un coup d'arrêt à moins que les résultats dépassent nettement les attentes ou que les entreprises surprennent agréablement avec leurs prévisions.

"La barre est clairement plus haut qu'il y a un mois compte tenu de la vigueur du marché", commente Michael James, responsable du trading chez Wedbush Securities à Los Angeles. "Pour maintenir la trajectoire haussière au deuxième semestre, il faudra des résultats meilleurs que prévu et des prévisions positives."

Des résultats conformes aux attentes risquent de tempérer l'enthousiasme récent autour des taux d'intérêt, confirment les stratèges d'UBS. "Nous entrevoyons toujours une tendance modestement haussière pour le marché actions dans notre scénario de base mais une hausse plus forte pourrait ne pas se matérialiser si la croissance des bénéfices n'accélère pas", écrivent-ils dans une note publiée vendredi.

L'indice S&P 500, qui a clôturé pour la première fois au-dessus des 3.000 points vendredi, se paie désormais 17,2 fois les résultats attendus contre 14,4 fois le 1er janvier, après la violente correction de la fin 2018.

Citigroup a donné lundi le coup d'envoi de la saison des résultats, à l'orée d'une semaine qui verra aussi les publications des autres grandes banques, de Netflix, d'IBM et de Microsoft.

Les résultats du deuxième trimestre ont toutes les chances de finir en territoire positif, la plupart des entreprises battant les attentes. Cela avait déjà été observé au premier trimestre, qui s'est finalement soldé par une progression de 1,6% des bénéfices selon Refinitiv alors que les analystes prévoyaient un repli.

L'IMPACT DES TENSIONS COMMERCIALES

Plutôt que les résultats eux-mêmes, les investisseurs attendent de voir ce que les entreprises auront à dire des tendances de consommation, de l'impact du conflit commercial sino-américain sur leur activité et de leurs perspectives pour la deuxième semestre. Les analystes anticipent à ce stade une hausse de 0,3% des bénéfices au troisième trimestre, puis de 6,8% en octobre-décembre.

Les comparatifs difficiles du deuxième trimestre 2018, quand les bénéfices avaient bondi de 24,9% grâce aux baisses d'impôts, seront un autre facteur à prendre en compte.

"Plus que de battre ou pas le consensus, la question sera de voir comment les entreprises surmontent les tarifs douaniers. Si cela les met vraiment en difficulté, la possibilité de supprimer les tarifs augmentera", veut croire Jamie Cox, directeur général chez Harris Financial Group à Richmond.

De grandes entreprises comme Apple ou FedEx ont averti sur l'impact du relèvement des droits de douane, qui augmente leurs coûts et pourrait les contraindre à relever leurs prix.

A cette aune, l'énergie et les matériaux sont les deux secteurs qui ont subi ces dernières semaines les plus fortes révisions à la baisse des estimations de résultats. Les bénéfices sont désormais estimés en baisse de 31,4% pour les entreprises du secteur des matériaux et le repli attendu est de 7% dans le secteur de l'énergie, selon Refinitiv.

Pour les technologiques, les analystes anticipent en moyenne un recul de 7,9% des bénéfices.

"Au fil des publications du deuxième trimestre, il va apparaître que le ralentissement économique mondial qu'on a pu observer et la hausse des coûts d'approvisionnement vont peser plus que prévu sur les marges", redoute Jeff Schulze, stratège chez ClearBridge Investments à New York.

(avec la contribution d'April Joyner, Véronique Tison pour le service français, édité par Marc Joanny)

par Caroline Valetkevitch