Milan (awp/afp) - Le géant mondial de l'acier ArcelorMittal associé à l'italien Marcegaglia a été retenu pour la reprise de l'entreprise de sidérurgie italienne Ilva, a indiqué vendredi à l'AFP une source proche du dossier.

La décision prise par les administrateurs en charge de la compagnie doit désormais être validée par le ministère italien du Développement économique.

L'offre présentée par ArcelorMittal-Marcegaglia a été préférée à celle du groupe indien Jindal South West Steel associé au producteur italien d'aciers spéciaux Arvedi, à la Caisse des dépôts italiennes et à Delfin, la holding de l'homme d'affaires Leonardo Del Vecchio.

Le montant de l'offre d'ArcelorMittal serait de 1,8 milliard contre 1,2 milliard pour son concurrent, selon la presse italienne.

ArcelorMittal (85%) et Marcegaglia (15%) ont signé un pré-accord avec la banque italienne Intesa Sanpaolo qui doit se joindre à leur consortium, baptisé Am Investco Italy, une fois l'offre validée.

Les autorités de la concurrence européennes doivent également examiner le dossier.

ArcelorMittal a promis d'investir 2,3 milliards d'euros dans Ilva, en plus du prix d'achat: 1,1 milliard le sera dans l'environnement et 1,2 milliard dans la production industrielle proprement dite (hauts-fourneaux, etc.)

L'aciérie d'Ilva à Tarente (sud) est accusée d'être l'une des plus polluantes d'Europe.

Lourdement endettée et au bord de l'asphyxie financière, Ilva a été placée sous tutelle par l'Etat italien début 2015, puis nationalisée. L'Etat a lancé début 2016 la procédure pour retrouver un repreneur.

Rome espérait l'an passé qu'Ilva reste aux mains d'entreprises italiennes. "Nous n'accepterons jamais qu'Ilva soit tué par les lobbys sidérurgiques des autres pays", avait ainsi déclaré Matteo Renzi alors qu'il était chef du gouvernement.

ArcelorMittal entend porter la production à quelque 6 millions de tonnes par an d'ici 2018, contre 5,8 millions en 2016, avec les trois hauts-fourneaux actuellement en fonctionnement. A terme, l'objectif est qu'Ilva produise 9,5 millions de tonnes de produits finis annuellement.

ArcelorMittal et Marcegaglia souhaitent développer la gamme de produits offerts, "pour les secteurs de l'automobile, de la construction et de l'énergie".

Le projet comprend la création d'un centre de recherche et développement sur le site de Tarente, avec un investissement initial de 10 millions d'euros.

RENDRE ILVA "PLUS COMPÉTITIVE"

Dans un entretien donné en mars dernier au quotidien italien Il Corriere della Sera, le patron d'ArcelorMittal, Lakshmi Mittal, avait cité trois raisons majeures pour racheter Ilva: le fait que "l'Italie soit le deuxième consommateur européen d'acier", qu'"Ilva soit le plus grand site de production d'acier" en Europe et que "l'Italie importe de l'acier".

"Nous n'avons pas de production primaire en Italie", avait-il ajouté, en soulignant qu'il souhaitait acquérir Ilva "pour l'aider à devenir la meilleure entreprise d'Europe". "En rendant Ilva plus compétitive, nous la mettrons en condition de refournir non seulement le marché italien, mais aussi celui européen", a t-il ajouté.

Il avait précisé vouloir "travailler avec la communauté locale", se disant "attristé par ce qui s'était passé à Tarente".

L'aciérie de Tarente, qui emploie 11.000 personnes dans une région sinistrée, est au coeur d'un énorme procès. Les experts cités par le parquet évoquent jusqu'à 11.550 morts en sept ans causés par les émissions polluantes.

L'ancien propriétaire d'Ilva, la famille Riva, a passé début décembre 2016 un pré-accord avec les administrateurs et la justice italienne pour restituer 1,3 milliard d'euros afin de dépolluer et permettre la gestion du site.

Elle a reconnu avoir retardé les travaux de mise aux normes de l'aciérie et soustrait de l'argent des comptes de l'entreprise et de l'avoir caché à l'étranger au moment même où le groupe était en "situation de crise".

Adriano Riva, qui était le frère du patron du groupe, Emilio, mort en 2014, a signé mercredi les documents pour faire rentrer en Italie l'argent gelé en Suisse dans le cadre de l'enquête: 1,1 milliard seront destinés à la dépollution et 230 millions à la gestion courante du site.

Le rapatriement de la somme devrait, sauf surprise, être validé par la justice suisse le 31 mai.

En vertu d'un accord passé avec la justice italienne, Adriano Riva devra effectuer deux ans et demi de prison pour banqueroute, transfert illicite d'argent et escroquerie aux dépens de l'Etat. D'autres membres de la famille Riva, Nicola et Fabio, fils d'Emilio, sont encore en procédure préliminaire.

afp/fah