PARIS (awp/afp) - En dépit d'un coup de froid passager, les marchés actions européens et américains ont rapidement repris du poil de la bête cette semaine face au coronavirus, relativisant l'impact d'une crise sanitaire pour l'heure surtout cantonnée à la Chine.

Alors que le bilan des contaminations -plus de 31.000 en Chine continentale- et des décès -plus de 600- ne cesse de s'alourdir, et que de plus en plus de villes chinoises imposent des mesures de confinement, les Bourses mondiales affichent une résilience à toute épreuve.

Ainsi le terrain perdu par les indices fin janvier dans le sillage de la déclaration de l'épidémie a-t-il été en grande partie regagné ces derniers jours.

"L'épisode de baisse" s'explique parce que "l'épidémie a servi un peu de prétexte à des prises de bénéfices sur les marchés qui avaient beaucoup monté en fin d'année dernière", relève auprès de l'AFP Jean-Louis Mourier, un économiste du courtier Aurel BGC.

Mais "nous sentons bien que dès qu'il y a une nouvelle jugée un petit peu meilleure, c'est un prétexte pour revenir sur les marchés actions", ces derniers offrant des rendements supérieurs à ceux des valeurs refuges que sont les obligations d'Etat, selon lui.

D'autant que ces dernières ont été parmi les plus touchées, avec les matières premières, par la crise du coronavirus.

"Une des conséquences de cette crise, c'est que les taux d'intérêt baissent", a souligné lors d'un point presse Didier Saint-Georges, membre du comité d'investissement stratégique chez Carmignac. Or "ces conditions financières extrêmement favorables ont été et demeurent un moteur absolument essentiel des marchés aujourd'hui".

"Du point de vue américain en particulier, nous avons un impact économique qui est très faible alors que l'impact de liquidités est important via cette baisse des taux", complète-t-il.

Et le moteur est alimenté par des banques centrales qui restent en embuscade, prêtes à dégainer si les risques s'accroissent.

"Les banques centrales, quelles qu'elles soient, qui étaient déjà en train de sauver le cycle économique, maintenant vont nous sauver du coronavirus", résume John Plassard, spécialiste de l'investissement chez Mirabaud.

La banque centrale chinoise a ainsi injecté plus de 200 milliards de dollars de liquidités en début de semaine et les mesures de soutien de Pékin ne devraient pas s'arrêter là.

Un impact surtout régional ?

Bien qu'encore difficiles à évaluer pleinement, les conséquences économiques de l'épidémie sont en effet déjà tangibles, les mesures de confinement ayant porté un coup d'arrêt à la consommation chinoise et paralysé de nombreuses usines.

La Banque mondiale a d'ailleurs prévenu mardi que sa prévision de croissance pour 2020 serait revue à la baisse, au moins pour la première partie de l'année, en raison du nouveau coronavirus, pointant en particulier l'impact de l'épidémie sur les chaînes d'approvisionnement.

"Nous sommes dans l'incertitude la plus totale sur quelles seront les vraies conséquences finales de cette épidémie", d'autant que le poids de la Chine dans l'économie mondiale est sans commune mesure avec ce qu'il était au moment du Sras en 2002-2003, rappelle M. Mourier.

Aussi est-il "très probable que la croissance chinoise soit inférieure à 5% au premier trimestre en glissement annuel", selon lui.

"L'impact de cette crise sur la croissance dans les mois qui viennent va être très important", abonde Didier Saint-Georges, mais il sera d'abord régional puisque "la plus grosse exposition directe à la demande chinoise se trouve" en Asie.

Et les mesures drastiques prises par les autorités chinoises pour contenir la propagation de l'épidémie ont aussi contribué à rassurer les investisseurs.

"Les mesures de confinement, pour l'instant, semblent réussir à éviter la diffusion globale et la mutation de l'épidémie en véritable pandémie", estime M. Mourier.

"Plus la gestion de la crise est pénalisante pour l'économie à court terme, plus il y a des raisons de penser quand même que cela va permettre de contenir la propagation de l'épidémie", avance pour sa part M. Saint-Georges.

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