New York (awp/afp) - Boeing a accusé un effondrement de ses livraisons d'avions au premier semestre, conséquence de la crise de son appareil vedette 737 MAX, cloué au sol depuis mi-mars après deux accidents ayant fait 346 morts, une déconvenue qui profite à son grand rival Airbus.

L'avionneur américain a livré 239 avions de ligne aux compagnies aériennes clientes entre janvier et juin, soit une baisse de 37% en un an.

Sur le seul deuxième trimestre, les livraisons d'appareils civils Boeing ont chuté de près de 54%, à 90 unités, contre 194 à la même période un an plus tôt, selon un communiqué.

La dégringolade de la maison Boeing fait un heureux: son éternel rival européen Airbus, désormais en bonne voie pour lui ravir cette année et pour la première fois le titre de premier constructeur aéronautique mondial en termes de livraisons.

Le constructeur européen a livré, lui, 389 appareils sur les six premiers mois de l'année, en hausse de 28% sur un an, selon des chiffres disponibles sur son site internet.

Les livraisons sont un indicateur fiable de la rentabilité dans l'aéronautique, principalement parce que les clients paient l'intégralité de leurs factures au moment où ils prennent possession des avions.

Si Boeing avait cédé il y a quelques années sur le plan des commandes, le groupe américain avait toujours pris soin de dominer Airbus au niveau des livraisons.

Le changement de rapport de forces entre les deux avionneurs s'explique principalement par le fait que Boeing a dû suspendre les livraisons du 737 MAX, avion qui représente plus des deux tiers de son carnet de commandes.

Cet avion --version remotorisée du 737 NG-- est interdit de vol après le crash d'un appareil de ce type de la compagnie Ethiopian Airlines, le 10 mars, au sud-est d'Addis Abeba, ayant fait 157 morts.

Commandes dans le rouge

Comme dans l'accident de Lion Air (189 morts) survenu cinq mois plus tôt, les conclusions préliminaires ont mis en cause le système anti-décrochage (MCAS) propre au MAX. Il devait permettre de donner aux pilotes les mêmes sensations que pour la génération précédente de 737, malgré une nouvelle motorisation et un comportement en vol très différent.

Ironie de l'histoire: c'est au deuxième trimestre 2018 que le groupe de Chicago avait livré ses premiers 737 MAX, à Jet Airways, Ethiopian Airlines et Xiamen Airlines.

Il est difficile de dire aujourd'hui quand le 737 MAX sera de nouveau autorisé à voler. Les compagnies Southwest et American Airlines, deux grosses clientes de ce modèle, ont annulé des vols jusqu'à l'automne.

Boeing aura du mal à refaire son retard sur Airbus: de nombreux analystes n'attendent pas une reprise des livraisons du 737 MAX avant décembre.

Le cabinet Jefferies table sur la livraison en tout de 236 avions 737 MAX cette année, contre 580 pour l'année 2018.

La crise du 737 MAX s'étend également aux commandes, Boeing affichant un déficit net de 119 appareils au premier semestre, en raison d'annulations. Airbus est en revanche dans le vert, avec 88 appareils nets commandés.

Depuis l'immobilisation au sol du 737 MAX, les marques d'intérêt pour cet avion phare sont rares. Si le groupe IAG (British Airways, Iberia, Vueling et Aer Lingus...) en a passé commande pour 200 unités lors du salon du Bourget, en banlieue de Paris, la compagnie low-cost saoudienne Flyadeal a pour sa part annulé dimanche une commande de 50 exemplaires pour acheter des A320 NEO d'Airbus.

Boeing travaille d'arrache-pied sur une mise à jour du MCAS, mais un nouveau problème lié à un microprocesseur du 737 MAX posant un "risque potentiel" a été détecté par l'agence fédérale de l'aviation (FAA), le principal régulateur de l'aérien aux Etats-Unis.

La facture de cette crise était estimée à 1 milliard de dollars mi-avril. Boeing devrait relever ce montant lors de la publication de ses résultats du deuxième trimestre le 24 juillet.

afp/rp