* Macron reçoit les syndicats agricoles

* Négociations commerciales en cours

* Macron évoque une interdiction à 85% du glyphosate en 2021 (Actualisé avec source Elysée sur glyphosate)

PARIS, 11 février (Reuters) - Les dirigeants des principaux syndicats agricoles ont demandé lundi à Emmanuel Macron de la "fermeté" à l'égard des acteurs de la filière agro-alimentaire ne "jouant pas le jeu", lors d'un entretien avec le chef de l'Etat dans le cadre du "grand débat" organisé en réponse à la crise des "Gilets jaunes".

Première à être reçue, la présidente de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) a annoncé qu'elle apporterait sa pierre à cette concertation nationale qui prendra fin le 15 mars et qui doit déboucher sur des "solutions concrètes".

"Nous allons proposer une contribution pour le grand secteur agricole - 14% des emplois français, troisième secteur exportateur, une activité qui tient les territoires et une alimentation saine, sécurisée et diversifiée", a déclaré Christiane Lambert à la presse à l'Elysée, ajoutant que le principal syndicat agricole français serait "sans concession".

"La fracture rurale et sociétale est très forte, on le voit aujourd'hui avec le mouvement (des "Gilets jaunes"-NDLR), l'agriculteur c'est un pivot dans la ruralité et nous souhaitons qu'il en soit davantage conscient", a-t-elle ajouté.

La FNSEA exige que les Etats généraux de l'alimentation et la loi alimentation produisent "tous leurs effets, le retour prix au producteur doit s'opérer", a-t-elle insisté en évoquant "des réticences dans certaines négociations commerciales".

MACRON PROMET DE LA FERMETÉ

Même son de cloche chez les Jeunes agriculteurs (JA).

"La loi étant en ce moment en train de se mettre en application, nous avons redemandé au président d'être très ferme avec l'ensemble des acteurs qui ne souhaiteraient pas jouer le jeu", a dit son président, Jérémy Decerle.

"On sent qu'il veut que cette loi porte ses fruits, apporte des résultats. Nous, nous y serons vigilants, lui il a l'air d'avoir envie de l'être", a-t-il poursuivi.

Pour Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne, "aujourd'hui nous on ne s'y retrouve pas".

"On voit que ceux qui sont servis c'est surtout la grande distribution", a-t-il dit. "Au-delà des discours, on a envie d'actes. Dans les fermes, il y a des gens qui sont dans des détresses morales terribles et le prix du lait ne bouge pas".

Selon l'entourage du chef de l'Etat, Emmanuel Macron a assuré lors de ces entretiens que les engagements pris dans la loi agriculture et alimentation - dite "loi Egalim" - seraient tenus et qu'il attendait des avancées sur les plans de filière.

Le chef de l'Etat a également évoqué les sujets européens dans la perspective de la politique agricole commune (PAC) et du Salon de l'agriculture qui se tiendra du 23 février au 3 mars porte de Versailles à Paris, a-t-on précisé de même source.

Séduits en octobre 2017 par les promesses d'Emmanuel Macron d'un "revenu décent", les agriculteurs dénoncent depuis plusieurs mois les "blocages" de la grande distribution qui empêchent selon eux l'application de la loi Egalim visant à mieux rétribuer les agriculteurs avec le relèvement de 10% du seuil de revente à perte (SRP) et encadre les promotions.

Adoptée en octobre dernier, cette loi doit faire l'objet jeudi matin à Matignon d'une réunion de suivi autour du Premier ministre Edouard Philippe en présence des ministres concernés.

Une autre réunion est prévue mercredi concernant les négociations commerciales de l'alimentation qui durent jusqu'à fin février entre producteurs et distributeurs, en présence des ministres de l'Agriculture et de l'Economie et des Finances, Guillaume Didier et Bruno Le Maire.

GLYPHOSATE ET AIDES BIO

Au-delà de l'application d'Egalim, la question du versement des aides pour les producteurs bio est également source de crispations entre les agriculteurs et le gouvernement.

Interrogé à ce sujet jeudi dernier lors d'un débat avec un millier de jeunes en Saône-et-Loire, Emmanuel Macron a assuré que les retards pris dans le versement de ces aides seraient "soldés" "au printemps", évoquant de "gros dysfonctionnements administratifs" et des "problèmes informatiques et techniques".

Autre pierre d'achoppement, la question du glyphosate, un herbicide jugé dangereux par les défenseurs de l'environnement mais que certains agriculteurs souhaitent continuer à utiliser.

Emmanuel Macron a "réaffirmé son engagement sur la sortie du glyphosate pour 85% des usages (...) et travaille dès à présent sur les 15%" (agriculture de conservation, les fruits légumes de plein champ et vignoble en pente)", a fait savoir l'Elysée.

Le chef de l'Etat s'est engagé en 2017 à bannir le glyphosate en France d'ici à 2021 tout en laissant ouverte la porte à de possibles dérogations, jugeant initialement que des solutions alternatives et immédiates existaient pour "90% des situations". Didier Guillaume avait précisé fin janvier que la sortie du glyphosate serait réalisée à 80% au 1er janvier 2021.

Sur la question du glyphosate, Christiane Lambert a salué "le pragmatisme du président de la République qui a dit à plusieurs reprises que sans solutions il y aurait des dérogations pour un pourcentage de situations. Ce retour au pragmatisme était indispensable". (Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse et Julie Carriat)

Valeurs citées dans l'article : Bayer, Carrefour, Casino Guichard-Perrachon