LONDRES (awp/afp) - Le câblo-opérateur américain Comcast est en pole position pour racheter le géant de la télévision européenne Sky pour 30 milliards de livres, au détriment de Fox et au terme d'enchères acharnées qui devraient clore un feuilleton de près de deux ans.

Au bout d'un suspense de 24 heures d'enchères, Comcast a soumis la meilleure offre avec 17,28 livres par action de Sky, soit une valorisation pour le groupe britannique de 30,4 milliards de livres, a annoncé samedi dans un communiqué le Takeover Panel, le régulateur des fusions au Royaume-Uni.

Le groupe 21st Century Fox de la famille Murdoch, qui détient 39% du capital de Sky, a offert quant à lui 15,67 livres, valorisant le groupe 27,6 milliards au total.

Le régulateur a eu recours à ce système d'enchères très peu usité afin de départager les deux colosses américains qui n'avaient pas déposé d'offre définitive avant la date limite du 22 septembre.

Les prétendants ont nettement relevé leur offre dans la dernière ligne droite, signe de la féroce bataille autour de Sky, qui a mobilisé des armées d'avocats et de banquiers d'affaires de la City au coeur du week-end.

Comcast est donc désormais le grand favori pour l'emporter, dans ce qui sera une des opérations les plus importante jamais réalisées dans l'industrie des médias en Europe et devrait lui permettre de devenir un acteur mondial du secteur.

L'américain, qui possède déjà le studio Universal et les chaînes de télévision américaines NBC et CNBC, devra toutefois convaincre les actionnaires de Sky, y compris la famille Murdoch, qui ont jusqu'au 11 octobre pour choisir l'offre qu'ils préfèrent. Les deux groupes devront en outre dévoilé les détails de leurs nouvelles offres avant 06H00 GMT lundi matin.

Fort de 23 millions d'abonnés, Sky est l'un des opérateurs de télévision les plus puissants d'Europe avec outre la chaîne d'information Sky News, les droits de la lucrative Premier League de football en Angleterre, ou encore la diffusion et la production de fiction.

Sky est présent dans cinq pays (Royaume-Uni, Irlande, Allemagne, Autriche et Italie) et propose ses programmes sur de nombreuses chaînes thématiques, ainsi que des connections internet voire des services téléphoniques. Le groupe est en outre en bonne santé financière d'après ses derniers résultats.

Contrer Netflix et Amazon

Pour Comcast, mettre la main sur le britannique sera un atout précieux dans la bataille que livrent les acteurs historiques face aux nouveaux venus de la vidéo en ligne, comme Netflix ou Amazon.

Le PDG du groupe américain, Brian Roberts, avait qualifé Sky d'"actif unique", tant le britannique est considéré comme l'un des joyaux de l'empire Murdoch.

Il s'agit en revanche d'un revers pour Fox, qui avait lancé une nouvelle offre sur Sky fin 2016 après une première tentative en 2011 qui avait échoué à cause du scandale des écoutes téléphoniques au sein du News of the World, tabloïd de la galaxie Murdoch qui a ensuite été fermé.

21st Century Fox bénéficiait en outre du soutien du géant du divertissement Disney qui doit racheter d'ici l'an prochain l'essentiel des actifs de Fox (en particulier ses studios de cinéma et télévision mais à l'exception notamment de la chaîne Fox News) pour plus de 71 milliards de dollars.

Comcast prend d'ailleurs sa revanche, précisément parce qu'il avait dû renoncer à acquérir ces actifs de Fox il y a quelques mois, laissant le champ libre à Disney.

L'offre de Fox sur Sky avait en outre préoccupé l'autorité britannique de la concurrence et avait pris un tour politique avec l'intervention du gouvernement britannique qui s'inquiétait pour la pluralité des médias - la famille Murdoch détenant déjà les quotidiens le Times et le Sun au Royaume-Uni.

L'offre de Comcast avait toutefois obtenu sans problème le feu vert de cette autorité qui avait par ailleurs validé celle de Fox mais en l'assortissant de conditions draconiennes pour garantir l'indépendance de la chaîne d'information Sky News.

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