S'agissant des entreprises, le taux de marge a bondi sur la période, soutenu par la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en réduction pérenne de cotisations sociales patronales, ce qui lui a permis de renouer avec ses niveaux d'avant-crise.

Selon les données publiées mercredi par l'Insee, la croissance française a donc légèrement ralenti au premier trimestre par rapport à son rythme de la fin 2018.

La progression du produit intérieur brut (PIB) du quatrième trimestre a en effet été revue en légère hausse à 0,4%, alors qu'elle avait été annoncée à 0,3% dans la dernière estimation publiée fin avril.

L'acquis de croissance pour l'ensemble de l'année 2019, à savoir l'évolution du PIB si l'activité stagnait complètement au cours des trois prochains trimestres de l'année, se maintient à 0,8%, comme en première estimation.

Par rapport aux premières estimations publiées à la fin avril, l'Insee a confirmé les contributions à la croissance du premier trimestre du commerce extérieur (-0,3 point) et des variations des stocks des entreprises (+0,3 point), tandis que celle de la demande intérieure finale, traditionnel moteur de la croissance française, a été révisée en légère hausse, à +0,4 point contre +0,3 point initialement.

FORTE APPÉTENCE POUR L'ÉPARGNE

Sur les trois premiers mois de l'année, la progression du pouvoir d'achat des Français est restée solide malgré un léger ralentissement, profitant notamment des dispositions annoncées par le gouvernement en fin d'année dernière pour tenter d'apaiser la grogne des "Gilets jaunes", d'un montant d'environ dix milliards d'euros.

Sa hausse de 0,9% (après 1,1% fin 2018), a ainsi été alimentée entre autres par les primes exceptionnelles exonérées de charges versées par certaines entreprises, la revalorisation et l'élargissement de la prime d'activité ou encore les heures supplémentaires défiscalisées.

Cette franche progression du pouvoir d'achat ne s'est pourtant accompagnée que d'une accélération limitée des dépenses de consommation des ménages (+0,4% après +0,3% au quatrième trimestre 2018), les ménages préférant en profiter pour gonfler leur bas de laine, comme en témoignent les niveaux élevés de collecte des derniers mois pour l'assurance vie et le Livret A.

Conséquence: le taux d'épargne des ménages a augmenté de 0,4 point à 15,3%, au plus haut depuis le troisième trimestre 2012, au plus fort de la crise de la dette grecque.

"Cette propension à épargner s'explique par le maintien des incertitudes économiques et sociales", estime Philippe Crevel, directeur du think tank le Cercle de l'épargne.

"Après la grave crise des 'Gilets jaunes', les ménages restent sur leurs gardes et ont tendance à différer leurs achats durables. Ils doutent de la poursuite de cette politique favorable du pouvoir d'achat et de la baisse de l'inflation", observe-t-il dans une note.

Plus de six mois après ses débuts, ce mouvement de contestation ne s'est toujours pas éteint - même si la mobilisation lors des manifestations du samedi s'est largement étiolée - en dépit des cinq milliards d'euros de baisse d'impôt promis aux ménages par Emmanuel Macron à la suite du "grand débat".

En ce qui concerne les entreprises, qui cumulent cette année les fonds CICE versés au titre de l'année 2018 et la réduction de leurs cotisations sociales, elles ont vu leur taux de marge bondir de 1,1 point au premier trimestre. A 32,6%, il s'établit à un plus haut depuis le troisième trimestre 2008, c'est-à-dire juste avant le déclenchement de la crise financière.

(Myriam Rivet, avec Leigh Thomas, édité par Sophie Louet)