PARIS (Agefi-Dow Jones)--La foncière Covivio (anciennement Foncière des Régions) s'apprête à entamer une nouvelle phase de croissance avec la fusion de sa filiale italienne Beni Stabili, prévue à la fin décembre. L'entreprise va tripler son pipeline engagé à près de 2 milliards d'euros à compter de 2019, a affirmé Tugdual Millet, le directeur financier, lors d'un entretien accordé à l'Agefi et à l'agence Agefi--Dow Jones. Le groupe se renforcera dans l'hôtellerie tout en poursuivant ses développements sur le marché résidentiel allemand et l'immobilier de bureau en France et en Italie. Covivio nourrit aussi d'importantes ambitions pour Wellio, sa filiale d'espace de "pro-working" (co-working dédié aux entreprises), qui pourrait peser 10 à 15% de son offre de bureaux à horizon 2020.

Comment le profil du groupe évoluera-t-il à la suite de la fusion avec Beni Stabili ?

Tugdual Millet : "La fusion avec notre filiale italienne, effective au 31 décembre 2018, a été bien accueillie par la communauté financière. Cette opération répond à une vraie logique industrielle de simplification, de lisibilité, et permet d'augmenter le flottant, désormais à plus de 50%. Parallèlement, notre modèle de croissance est en train de changer. A partir de 2019, notre pipeline engagé sera multiplié par trois à près de 2 milliards d'euros. Nous continuerons à nous renforcer dans l'hôtellerie qui pourrait représenter entre 15% et 20% de notre patrimoine. Pour l'Italie, qui représente 22% de notre portefeuille suite à la fusion avec Beni Stabili, notre objectif est d'être entre 15% et 20% à moyen terme. En parallèle des cessions prévues, nous nous concentrerons sur le développement d'immeubles neufs à Milan.

Par ailleurs nous saisissons de nouvelles opportunités, en nous lançant sur de nouveaux métiers, comme le bureau flexible avec Wellio, notre offre de pro-working, et la promotion résidentielle à Berlin".

Alors que la finalisation du rachat de Beni Stabili est imminente, le bras de fer entre Bruxelles et Rome ne pèse-t-il pas sur vos activités ?

"Pour l'instant nous n'observons pas d'impact en Italie. Ni sur la location d'immeubles vacants ni sur les développements clés en main. La situation à Milan, notre principal marché, est toujours aussi porteuse. Milan est en retard en termes de qualité de parc et de surfaces de bureaux. L'arrivée d'une offre de qualité attire la demande. De plus en plus, les grands groupes manifestent leur intérêt pour des 'clés en main' locatifs, où ils participent à l'élaboration du projet. Ces opérations de développement offrent des rendements locatifs de 6,5% à 7%. En outre, la fusion avec Beni Stabili permet de financer nos opérations de développement en Italie directement grâce aux ressources de Covivio, nous tenant à l'écart de la volatilité des conditions financières locales".

Le potentiel de croissance du marché résidentiel allemand n'est-il pas épuisé ?

"Le prix du mètre carré à Berlin est passé de 1.500-2.000 euros il y a 5 ans à 3.000-3.500 euros aujourd'hui. Mais le rattrapage n'est pas terminé. L'image de Berlin s'est totalement transformée en quelques années, grâce à sa qualité de vie, son dynamisme, sa jeunesse et des loyers très bas. Aujourd'hui Berlin est en train de se développer et d'attirer les entreprises. Mais la production de logements n'a pas suivi. Il n'y a pas assez d'offre nouvelle pour absorber les 30 à 40.000 nouveaux habitants qui arrivent chaque année. Nous disposons déjà de 3 milliards d'euros d'actifs à Berlin avec un pipeline de développement d'un peu plus de 500 millions d'euros, soit 1.700 logements environ. Au prix actuel du mètre carré à Berlin, nous continuons à investir à Berlin. D'autant que le potentiel de la réversion locative est supérieur à 35%. De quoi nous assurer une croissance annuelle de 4% à 5% de nos loyers, malgré le durcissement de la réglementation locale sur les loyers".

Envisagez-vous de monter à court terme au capital de Covivio Hotels (ex-Foncière des Murs) ?

"Nous détenons 42% du capital aux côtés de nos partenaires investisseurs institutionnels, qui nous accompagnent depuis longtemps dans notre développement. L'ensemble de ces partenaires ont suivi l'augmentation de capital de 300 millions d'euros de juin dernier pour financer l'acquisition d'un portefeuille d'hôtels au Royaume-Uni. Notre priorité est donc de continuer à nous développer. Cette classe d'actifs bénéficie à la fois de la croissance européenne et de la hausse des flux touristiques. Nous bénéficions de liens privilégiés avec les grands opérateurs hôteliers (Accor, InterContinental, Marriott, NH...) qui nous donnent accès à leur pipeline de développement, ce qui nous permet d'avoir un positionnement unique en Europe ; et d'une structure de revenus (75% en loyers et 25% en management fees) nous permettant de profiter au mieux de la croissance du secteur".

Comment financez-vous votre développement ?

"Chaque année, nous cédons pour 800 millions à 1 milliard d'euros d'actifs. Jusqu'en 2018, nous avons essentiellement vendu des actifs non stratégiques (résidentiel, commerce et logistique en France) et 'non core' (dans des zones périphériques). Cette année, les deux tiers des cessions concernaient des actifs 'non core' ou non stratégiques. A partir de 2019, nous conserverons la même enveloppe de cessions, mais avec une majorité d'actifs core qui permet de financer notre pipeline de développement. La vente d'actifs à taux de rendement bas pour réinvestir dans le développement sera une source supplémentaire de croissance de nos résultats".

Pourriez-vous participer à la consolidation du secteur ?

"Nous n'avons pas de tabou en matière d'acquisitions à condition que cela rentre bien évidemment dans notre stratégie immobilière et que l'opération soit relutive sur nos indicateurs. Mais acheter une société cotée est souvent plus compliqué, plus risqué et nécessite souvent de payer une prime sur l'actif net réévalué (ANR). A chaque fois que nous avons souhaité développer la société, nos actionnaires nous ont toujours fait part de leur soutien au travers d'augmentation de capital réussie".

Envisagez-vous de faire appel au marché prochainement ?

"Avec une maturité de notre dette de six ans et l'absence d'échéances obligataires importantes en 2019 et 2020, nous n'avons pas besoin d'émettre. Toutefois, après le succès de notre premier 'green bond' en 2016, nous pourrions réfléchir à une prochaine levée obligataire <>. C'est cohérent avec notre stratégie et notre positionnement, même si la mise en œuvre est plus lourde. Un 'green bond' n'est pas plus cher qu'une émission classique, les investisseurs étant de plus en plus demandeurs. Pour le moment, nous avons beaucoup profité de la baisse du coût de la dette, qui nous a permis d'économiser de 15 à 20 millions d'euros en 2018 sur nos frais financiers. Elle devrait se stabiliser autour de 1,5%".

-Propos recueillis par Bruno de Roulhac, L'Agefi et François Berthon, Agefi-Dow Jones. ed: ECH

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