Ciblé par le fonds américain, qui lui réclame plus de marges et une modification de sa gouvernance, Pernod Ricard a promis une accélération de sa croissance et une amélioration de sa rentabilité à travers un nouveau plan à trois ans baptisé "Transform & Accelerate".

"Nous entretenons le dialogue avec Elliott, comme avec tous nos actionnaires", a dit Alexandre Ricard lors d'une interview téléphonique, ajoutant, sans dévoiler la teneur des discussions, que l'approche du groupe demeurait "courtoise et constructive".

Il s'est également montré serein face à la décision américaine d'autoriser des poursuites judiciaires contre les sociétés étrangères présentes à Cuba, où le groupe produit son rhum Havana Club, estimant que ce n'était "pas un sujet de préoccupation" pour Pernod Ricard.

Le groupe, qui vient d'acquérir le gin haut de gamme italien Malfy et de signer un contrat de distribution de vins en Chine, entend poursuivre la gestion "dynamique" de son portefeuille de marques, à la vente comme à l'achat, a poursuivi le dirigeant, alors que des rumeurs lui prêtent l'intention de vendre son portefeuille de vins, moins rentable.

Propriétaire de la vodka Absolut, du cognac Martell ou du whisky Jameson, Pernod Ricard a dit s'attendre à une progression de son résultat opérationnel courant d'environ 8% à taux de changes constants en 2018-2019, au lieu des 6% à 8% attendu auparavant, malgré un ralentissement de la croissance organique au troisième trimestre de son exercice décalé.

CONFLITS COMMERCIAUX EN FRANCE ET EN ALLEMAGNE

La dynamique des ventes s'est tassée à 2,5% à taux de changes constants au 3e trimestre, un chiffre légèrement inférieur aux 2,8% attendus par les analystes, après une très forte croissance de 7,8% sur les six premiers mois.

Le groupe avait averti que sa croissance allait décélérer en deuxième partie d'année, avec la nécessité de gérer la progression des volumes de Martell afin de lui assurer une croissance durable, ou les litiges commerciaux en France en Allemagne, qui ont conduit à des déférencements, notamment chez Leclerc.

Numéro un du cognac en Chine devant Hennessy (groupe LVMH), Martell compte pour 80% du chiffre d'affaires de Pernod Ricard dans le pays, où les ventes ont explosé de 21% sur neuf mois.

Alexandre Ricard a confirmé viser, sur le moyen terme, une croissance de près de 10% en Chine et de légèrement plus de 10% en Inde, son troisième marché, où les whiskies locaux ont vu leurs ventes grimper de 19% sur neuf mois.

La progression a été limitée à 3% aux Etats-Unis, avec un nouveau recul d'Absolut et de "très solides" performances du whisky irlandais Jameson, bien qu'en retrait par rapport à l'exercice précédent.

L'Europe (+1%) a été pénalisée par des conflits commerciaux en Allemagne et en France, où la loi sur l'alimentation devrait peser sur les ventes à compter du 4e trimestre, en raison du relèvement du seuil de revente à perte.

En Bourse, en dépit de résultats jugés solides, le titre Pernod Ricard recule de 0,65% à 155,7 euros à 12h34, sous-performant légèrement l'indice CAC (+0,28%).

Ses multiples de valorisation atteignent 22,40 fois les bénéfices estimés pour 2020, contre 22,75 pour Diageo et 31,28 pour Rémy Cointreau, plus proche des valeurs du luxe par son positionnement très haut de gamme.

Au total, les ventes ont atteint 7,19 milliards d'euros sur neuf mois, en croissance organique de 6,3%.

(Pascale Denis, édité par Jean-Michel Bélot)

par Pascale Denis et Dominique Vidalon