Cette recommandation, fondée en partie sur les travaux de l'IRSN, l'organe technique de l'ASN, pourrait entraîner un nouveau report du démarrage du réacteur ainsi que des centaines de millions d'euros de coûts supplémentaires pour EDF.

"Compte tenu de l'importance des écarts identifiés, l'IRSN a conclu qu'EDF devrait, plutôt que rechercher à justifier une acceptabilité en l'état, procéder à la remise en conformité des soudures concernées", note l'IRSN dans un avis.

Dans un communiqué séparé, l'ASN précise que son groupe permanent d'experts pour les équipements sous pression nucléaires (GP ESPN) a considéré "qu'EDF devait réparer ces huit soudures pour les mettre en conformité, ou renoncer à la démarche d'exclusion de rupture les concernant en apportant des modifications au réacteur permettant de prendre en compte de telles ruptures dans sa démonstration de sûreté".

Cette recommandation n'engage pas l'ASN mais si l'autorité suivait l'avis du groupe d'experts, ce qui est souvent le cas, elle pourrait contraindre EDF à reprendre des soudures que le groupe envisage pour le moment de maintenir en l'état.

L'ASN prendra "prochainement" position sur la démarche proposée par EDF, potentiellement au mois de juin ou dans le courant de l'été, selon une porte-parole.

Dans un communiqué, EDF a confirmé que les réparations préconisées "pourraient impacter le calendrier de mise en service et le coût de construction de l'EPR de Flamanville", ajoutant poursuivre ses échanges avec l'ASN.

"Un point précis sur le calendrier et le coût de construction de l'EPR de Flamanville sera effectué après la publication de l'avis de l'ASN", poursuit EDF.

À CE STADE, PAS DE DÉMARRAGE AVANT 2020

Le groupe a annoncé en juillet 2018 qu'il devait réparer certaines soudures de l'EPR, ce qui a alourdi la facture du projet de 400 millions d'euros, à 10,9 milliards d'euros, et retardé sa mise en service de près d'un an.

EDF, détenu à 83,7% par l'Etat, n'avait cependant alors pas prévu de réparer huit soudures situées au niveau des traversées de l'enceinte de confinement et donc difficilement accessibles, bien qu'elles présentent des écarts par rapport à ses exigences de qualité et même un défaut pour l'une d'entre elles.

L'électricien public s'est jugé en mesure de démontrer que leurs propriétés mécaniques seraient suffisantes alors qu'il s'était lui-même imposé à l'origine des exigences supérieures à la réglementation afin d'éliminer tout risque de rupture des tuyauteries concernées.

Une source au fait du dossier avait rapporté auparavant à Reuters que des experts recommandaient à EDF de réparer les soudures de l'EPR.

L'ASN a prévenu fin janvier qu'une éventuelle reprise de ces huit soudures se traduirait par un nouveau retard dans le démarrage de l'EPR de Flamanville et, début avril, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a déclaré que la mise en service du réacteur n'interviendrait probablement pas avant le début de l'année 2020.

Selon le dernier calendrier en date fourni par EDF en juillet 2018 et confirmé en début de l'année, le chargement du combustible du réacteur est prévu au quatrième trimestre 2019 tandis que son raccordement au réseau et son fonctionnement à pleine puissance (1.650 mégawatts) doivent intervenir aux premier et deuxième trimestres de 2020 respectivement.

(Geert De Clercq, Benjamin Mallet et Claude Chendjou, édité par Bertrand Boucey et Benoît Van Overstraeten)