Tokyo (awp/afp) - Les exportations japonaises ont connu en avril leur pire plongeon mensuel depuis la crise financière de 2009, selon des données publiées lundi, face à la pandémie paralysant une grande partie de l'économie mondiale, et une amélioration n'est pas espérée de sitôt.

Les exportations de la troisième puissance économique mondiale en avril ont dégringolé de 21,9% en valeur sur un an, à 5.202,3 milliards de yens (44 milliards d'euros), a annoncé le ministère nippon des Finances.

C'est leur plus forte baisse mensuelle depuis 11 ans, et leur 17e mois de recul d'affilée. Elles avaient déjà nettement fléchi en mars (-11,7%).

Le consensus d'économistes Bloomberg s'attendait toutefois à une chute légèrement supérieure (-22,2%), alors que les confinements en Europe et aux Etats-Unis battaient leur plein en avril, mettant leurs économies à l'arrêt.

Le gouvernement japonais avait par ailleurs déclaré l'état d'urgence dans le pays début avril, ce qui a encore davantage freiné l'économie nationale.

Les exportations japonaises vers les Etats-Unis se sont effondrées de 37,8% en avril sur un an, et celles vers l'Europe occidentale de 30,4%.

Améliorations sur la Chine

Le repli des expéditions de marchandises vers la Chine a en revanche ralenti (-4,1%) comparé au mois de mars (-8,7%), alors que la Chine relance son économie, paralysée en février par le coronavirus.

Du côté des importations nippones en avril, elles ont baissé de 7,2% sur un an pour atteindre 6.132,7 milliards de yens (51,9 milliards d'euros), après un recul de 5% en mars.

Les importations japonaises d'Europe occidentale ont notamment reculé de 11,5%, mais celles en provenance de la Chine ont vivement rebondi (+11,7%, après -4,5% en mars). Les importations venant des Etats-Unis ont par ailleurs continué de légèrement augmenter (+1,6%).

La baisse des importations en valeur a été amplifiée par une "forte chute des prix" liée à la faiblesse des cours du pétrole, a relevé l'économiste Tom Learmouth dans une note de Capital Economics.

Le Japon a ainsi enregistré le mois dernier un déficit commercial de 930,4 milliards de yens (7,8 milliards d'euros).

Les exportations nippones "devraient continuer de chuter fortement pour un moment, étant donné que l'activité économique des principaux partenaires commerciaux du Japon reste extrêmement déprimée", a encore commenté M. Learmouth.

L'économiste Taro Saito, de l'institut de recherche japonais Nippon Life Insurance (NLI), s'attend à une amélioration des échanges commerciaux à partir de cet été, mais a lui aussi prévenu qu'il "faudra longtemps avant de retrouver les niveaux d'avant le virus".

Retour de la récession

Les déconfinements progressent depuis début mai aux Etats-Unis et en Europe, mais la reprise économique s'annonce très graduelle.

Face au net reflux du nombre quotidien de nouveaux cas de Covid-19 au Japon, le gouvernement nippon a aussi levé l'état d'urgence dans 39 des 47 préfectures du pays la semaine dernière, avec 15 jours d'avance par rapport au calendrier initial.

Ce dispositif devrait également être levé dès ce jeudi dans trois régions supplémentaires de l'ouest du pays (dont celles d'Osaka et Kyoto), mais pas encore à Tokyo et sa grande banlieue, selon les médias nippons.

Au-delà de l'impact du coronavirus, le regain de tensions entre la Chine et les Etats-Unis fait redouter un retour de la guerre commerciale entre ces deux principaux partenaires économiques du Japon, qui avait miné ses exportations l'an dernier.

Privé du moteur des exportations, plombé par une consommation des ménages et des investissements des entreprises en berne, le Japon est entré en récession au premier trimestre 2020, pour la première fois depuis 2015, avec une contraction de 0,9% de son produit intérieur brut (PIB) sur un trimestre, selon des données publiées lundi.

La baisse du PIB devrait être encore plus rude au deuxième trimestre, et le Fonds monétaire international (FMI) a prédit une chute de 5,2% du PIB nippon sur l'ensemble de 2020.

Pour amortir le choc, le gouvernement japonais a échafaudé un plan d'aide record équivalent à plus de 1.000 milliards d'euros, tandis que la Banque du Japon (BoJ) a encore musclé ses programmes de rachats d'actifs depuis mars et lancé des mesures pour soutenir le crédit.

La BoJ doit par ailleurs tenir une réunion de politique monétaire vendredi, en dehors de son calendrier régulier, laissant présager de nouvelles mesures exceptionnelles.

afp/rp