* Les indices s'essoufflent après un rebond surprenant

* La tension entre Washington et Pékin pèse sur la tendance

* Certains analystes restent confiants pour les actions

* D'autres craignent une rechute

* Les données macroéconomiques s'améliorent un peu

par Patrick Vignal

PARIS, 22 mai (Reuters) - Les avis divergent sur la direction que prendront des marchés financiers montrant des signes de fatigue, certains analystes misant sur un climat favorable aux actifs risqués alors que d'autres mettent en garde contre un risque de rechute boursière.

Les plus optimistes reconnaissent qu'un scénario plus sombre s'imposerait dans l'éventualité d'une deuxième vague de la pandémie de coronavirus. Les pessimistes invitent pour leur part à se tourner vers la Chine, qui a renoncé à tout objectif de croissance annuelle et n'envisage toujours pas de soutien monétaire massif alors que ses relations avec les Etats-Unis se tendent autour de la situation à Hong Kong.

Le retour du risque politique pèse sur les indices qui ont surpris de nombreux observateurs en reprenant plus de la moitié de ce qu'ils avaient perdu lors de l'effondrement de mars.

Les Bourses devraient cependant rester bien orientées à moyen terme, portés par les injections massives des banques centrales et par des avancées vers un vaccin ou un traitement du virus, pense Guillermo Fellices, responsable de la recherche et de la stratégie pour le pôle MAQS (multi-actifs, quantitatif et solutions) de BNP Paribas Asset Management.

"Ces deux facteurs vont vraisemblablement continuer de favoriser la reprise économique", dit-il à Reuters. "Notre scénario de base est que nous allons nous rapprocher d'un vaccin ou d'un traitement et assister à une reprise graduelle favorisée par le soutien monétaire, le principal risque pesant sur ce scénario étant une deuxième vague de l'épidémie qui favoriserait un scénario plus baissier."

Le rebond des marchés paraît toutefois bien fragile et le risque de rechute est important en raison du niveau élevé des valorisations et de perspectives très incertaines pour les bénéfices des entreprises, dit-on dans l'autre camp.

LES VALORISATIONS FONT DÉBAT

"Les marchés s'accrochent aux relatives bonnes nouvelles sur le plan sanitaire mais l'étincelle haussière ne repose pas sur grand-chose", estime ainsi Axel Botte, stratégiste chez Ostrum Asset Management.

"L'ampleur de la reprise reste extrêmement incertaine, avec des pertes de revenus et un stress à attendre sur les finances des entreprises" argumente-t-il.

"On peut craindre une rechute des marchés. Je ne sais pas si l'on viendra retester les plus bas du S&P-500 et de l'EuroStoxx 50 parce que la première vague vendeuse a été extrêmement violente et beaucoup plus rapide que lors de la plupart des 'bear markets' mais, compte tenu des valorisations et des perspectives de profits plus qu'incertaines, on peut considérer que les marchés sont trop chers aujourd'hui".

Pas d'accord, lui répond Guillermo Fellices.

"Les valorisations du marché actions peuvent sembler chères d'un point de vue historique, les multiples paraissant élevés avec très peu de croissance des bénéfices", reconnaît le stratège de MAQS/BNPP Paribas. "L'engagement fort des banques centrales à soutenir l'économie est toutefois suffisant pour maintenir les valorisations à des niveaux élevés pendant longtemps."

BlackRock accepte de jouer les arbitres en maintenant un positionnement neutre sur les actions mondiales et en privilégiant une exposition aux titres de qualité.

LA RÉCESSION EN EUROPE S'ATTÉNUE UN PEU

Les indicateurs économiques récents, qui restent très mauvais mais ont au moins cessé de se dégrader, ne permettent pas vraiment de trancher.

L'impact dévastateur de la pandémie de coronavirus sur l'économie de la zone euro s'est ainsi un peu atténué ces dernières semaines avec l'allégement des mesures de confinement, montrent les premiers résultats des enquêtes d'IHS Markit auprès des directeurs d'achats (PMI).

"La zone euro a subi une nouvelle chute de l'activité des entreprises en mai mais les résultats de l'enquête incluent au moins des signes rassurants suggérant que la crise a probablement touché son point bas en avril", commente Chris Williamson, chef économiste d'IHS Markit.

Le compte rendu de la réunion d'avril de la Réserve fédérale américaine, publié mercredi, n'aide pas beaucoup non plus puisqu'il montre que les dirigeants de la banque centrale ont débattu de la meilleure manière de continuer à soutenir l'économie pendant une reprise qu'ils attendent plus lente qu'estimé initialement.

Du côté de l'Europe, la semaine écoulée a apporté une bonne nouvelle aux partisans de la solidarité budgétaire avec la proposition par Paris et Berlin d'une enveloppe de 500 milliards d'euros en dépenses budgétaires pour les pays du bloc les plus touchés par la pandémie.

"Pour la première fois depuis des années, la France et l'Allemagne viennent avec un plan commun, avec une vraie solidarité européenne puisque l'on est prêt à donner de l'argent pour des projets, pour des pays qui sont dans le besoin avec une garantie partagée par l'ensemble des Etats", commente pour Reuters Nicolas Forest, directeur de la gestion obligataire chez Candriam.

(édité par Marc Angrand)