par Julien Toyer et Julien Ponthus

Les actionnaires se sont prononcés à 50,26% contre la cession à l'Etat belge, préalable à la vente de 75% de Fortis Banque à la BNP. La banque française n'a pas encore réagi.

Le titre BNP, brièvement réservé à la hausse à l'annonce du vote, cédait de nouveau 0,32% à 28,31 euros vers 15h45, surperformant légèrement l'indice sectoriel européen (-1%).

"La réaction sur le titre BNP va un peu dans tous les sens", a observé Pierre Flabbée, analyste chez Kepler capital markets.

"D'un côté BNP va se retrouver dégagée de la contrainte de financer Fortis et de reprendre ses actifs illiquides. Mais industriellement ça avait beaucoup de sens. Si ça ne se fait pas, je continue à penser que c'est dommage", a-t-il ajouté. "Ce n'est pas complètement fini, mais il faudrait reprendre le processus à zéro. On saura très vite si BNP veut le faire."

Le ministre des Finances Didier Reynders avait fait part de ses craintes mardi pour les finances publiques belges, déjà mises à mal par la crise financière, si les actionnaires rejetaient le plan de sauvetage de la banque.

Un certain nombre d'observateurs en Belgique craignent aussi qu'un vote négatif n'entraîne une fuite des épargnants et clients de Fortis et ne force l'Etat à recourir à un nouveau plan de sauvetage.

L'assemblée s'est tenu dans un climat très tendu.

De nombreux actionnaires ont crié "vendu, vendu" et copieusement hué le conseil d'administration, ce qui a perturbé le bon déroulement de l'assemblée appelée pour approuver le plan de sauvetage de la banque belgo-néerlandaise.

"Voter non, c'est uniquement faire l'usage d'un droit octroyé par la justice belge aux actionnaires floués par la gestion désastreuse du gouvernement", a déclaré le représentant d'une association de consommateurs acclamé par la foule des petits porteurs.

L'assureur chinois Ping An, qui détient près de 5% des actions avait récemment rejoint le camp de nombreux petits investisseurs opposant la transaction, ce qui avait rendu un vote positif improbable selon de nombreux analystes.

VOTE TRES SERRÉ

L'assemblée générale, ouverte peu après 10h00, a rassemblé quelque 5.000 actionnaires et une foule de journalistes venus couvrir l'événement.

Le dossier Fortis fait la première page des journaux belges depuis plus de quatre mois et a été surnommé le "Fortisgate" après avoir précipité la chute du premier ministre Yves Leterme en décembre.

BNP Paribas a accepté fin janvier de suivre les recommandations d'un rapport d'experts désignés par la justice belge pour améliorer son offre vis à vis des actionnaires de Fortis.

BNP a notamment convenu de ne racheter que 10% de Fortis Insurance Belgium, au lieu des 100% initialement prévus, alors que l'Etat belge a accepté de prendre une plus grosse partie d'un portefeuille d'actifs à risques.

"Je vous demande de ne pas songer exclusivement aux intérêts du groupe d'actionnaires que vous représentez mais de tenir également compte de l'équité et de tous les intérêts (de la Belgique), a déclaré un des experts présent à l'assemblée mercredi.

BEAUCOUP BEAUCOUP BEAUCOUP DE PROBLÈMES

Un vote négatif causerait "beaucoup, beaucoup, beaucoup de problèmes", a-t-il aussi averti.

"N'ayez pas peur, on tente de vous influencer, mais tenez bon, tenez bon aujourd'hui", a plaidé l'avocat vedette des actionnaires opposants de BNP, Mischael Modrikamen, conjurant les investisseurs de ne pas céder aux discours alarmistes sur la santé financière de la banque.

Trois associations flamandes d'actionnaires ont dernièrement approuvé l'opération, renforçant l'espoir de la BNP de devenir à la faveur de cette transaction la première banque de dépôts de la zone euro.

La banque française veut aussi croire au soutien des nombreux salariés actionnaires de la banque et à celui des investisseurs institutionnels.

Avec la contribution de Juliette Rouillon, édité par Jacques Poznanski et Jean-Michel Bélot