Le bilan de la semaine qui s'achève est positif pour les marchés actions, avec un gain hebdomadaire de près de 1% pour le Nikkei à Tokyo, de 1,2% pour l'indice européen Stoxx 600 et de plus de 2% pour le Standard & Poor's 500 à Wall Street, en dépit de fortes variations au fil des jours et parfois au cours d'une même séance.

Les journées de mercredi et jeudi ont en effet été dominées par le retour inattendu du risque géopolitique après l'attaque chimique présumée du 7 avril à Douma, en Syrie, attribuée au régime de Bachar al Assad, qui a conduit les pays occidentaux à entamer les préparatifs de frappes militaires contre l'armée syrienne.

Il a suffi d'un tweet à Donald Trump mercredi pour faire monter la tension en prévenant directement la Russie, alliée n°1 de Damas, que "les missiles arrivent". Conséquence logique: un repli sur les valeurs refuges, des emprunts d'Etat à l'or en passant par le yen, et une baisse des marchés actions.

Le lendemain, toujours sur Twitter, le président américain relativisait l'imminence des frappes, ravivant l'appétit pour le risque; les rendements des Treasuries repartaient à la hausse et Wall Street suivait tandis que le yen reculait.

Moins spectaculaire mais loin d'être négligeable, la crise diplomatico-commerciale entre Etats-Unis et Russie après les sanctions de Washington contre des oligarques et des groupes russes a fait chuter l'indice RTS de la Bourse de Moscou de plus de 13% en trois séances et fait perdre au rouble près de 7,5% de sa valeur face au dollar.

Ces tensions se sont ajoutées aux craintes persistantes entourant une éventuelle guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis. De quoi alimenter des poussées de volatilité plutôt bien accueillies par certains investisseurs.

"Dans la période actuelle, il faut être prêt à tout moment à ajuster ses positions. Nous restons 'long risque' mais plus actifs", explique ainsi Charles St-Arnaud, stratège senior chez Lombard Odier IM.

L'ACCÉLÉRATION DE L'INFLATION SE FAIT ATTENDRE

"Les secteurs qui sont un peu moins liés à la demande mondiale et aux exportations risquent de faire mieux dans le contexte actuel que ceux qui sont très exportateurs. On le voit dans la surperformance récente du CAC 40 par rapport au Dax: les entreprises du CAC sont beaucoup plus liées à la demande domestique, donc moins soumises aux incertitudes venant du potentiel de guerre commerciale alors qu'en Allemagne, il y a une très forte proportion d'exportateurs que les incertitudes liées au commerce mondial affectent beaucoup plus."

Le commerce international et les changes devraient figurer en bonne place dans l'ordre du jour des réunions de printemps du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale puis lors de la réunion des ministres des Finances du G20 à Washington.

Le FMI profitera de l'occasion pour présenter, mardi, ses prévisions économiques actualisées, qui pourraient donner à l'institution une nouvelle occasion de mettre en garde contre les risques conjoncturels liés aux barrières commerciales.

Le scénario de fond d'une croissance mondiale proche de 4% cette année ne devrait pas pour autant être remis en cause, mais le débat sur le protectionnisme nourrit les interrogations pour la suite.

"En somme, on en a terminé avec la séquence de révision haussière qui avait débuté au printemps 2016, contribuant pendant plus de dix-huit mois au retour de l'appétit pour le

risque", explique Bruno Cavalier, chef économiste d'Oddo BHF. "Se pose alors la question de savoir ce qu'il y a derrière ce pic: un plateau, une décrue en pente douce ou une falaise ?"

"La configuration la moins probable est, selon nous, la dernière", ajoute-t-il. "Les trois grands pôles de l'économie mondiale ont en effet les moyens de maintenir de bons rythmes de croissance."

En Chine, où seront publiés mardi les chiffres du produit intérieur brut (PIB) du premier trimestre, la croissance devrait ainsi être restée stable à 6,8% sur un an selon le consensus Reuters.

Aux Etats-Unis, le Livre beige de la Réserve fédérale, mercredi, à deux semaines de la réunion du FOMC, permettra de faire le point sur l'évolution de l'inflation, dont le réveil, susceptible d'accélérer la remontée des taux, se fait toujours attendre.

"Les investisseurs sont très impatients mais il faut être patient", assure Charles St-Arnaud de Lombard Odier IM. "On devrait observer une accélération de l'inflation en milieu d'année, avec la dépréciation du dollar et l'augmentation des coûts des matières premières."

LES RÉSULTATS EN SOUTIEN

Au milieu des turbulences déclenchées par les bruits de botte au Moyen-Orient et le bras de fer commercial entre Pékin et Washington, les marchés actions, à commencer par Wall Street, pourraient bien trouver un oasis de stabilité dans les publications de résultats, qui vont monter en cadence.

Les bénéfices du Standard & Poor's 500 devraient avoir bondi de 18,4% sur les trois premiers mois de l'année par rapport au premier trimestre 2017 selon le consensus Thomson Reuters I/B/E/S. Une hausse plus de deux fois supérieure à celle attendue pour le Stoxx 600 européen.

Pour Mirabaud Securities, "les actions américaines devraient continuer de surperformer leurs homologues européennes pour trois raisons: la croissance des bénéfices devrait rester supérieure aux États-Unis, (...) la faiblesse persistante du dollar contre l'euro, qui pèse sur les actions européennes et une surperformance non démentie du secteur technologique, dont le poids dans l'indice américain est prépondérant".

A l'agenda des prochains jours figurent entre autres les publications de Bank of America, Goldman Sachs, Morgan Stanley et General Electric.

En Europe, les résultats d'ASML et d'Ericsson et les chiffres d'affaires de Publicis et Schneider Electric entre autres côté français permettront notamment de mesurer l'impact des changes, déjà sensible dans les chiffres publiés jeudi par L'Oréal.

(Edité par Blandine Hénault)

par Marc Angrand