Touchées de plein fouet par la crise sanitaire, les entreprises d’intérim affichent depuis quelques jours une baisse de 75% de leur activité. Un phénomène auquel n’échappe pas CRIT, 5e acteur en France. Et ce n’est pas sa seconde activité, l’assistance aéroportuaire, qui compense la donne : elle est à 90% arrêtée. Pour autant, le groupe est parvenu hier, aidé par de bons résultats 2019, à rassurer sur sa capacité à traverser cette épreuve sans précédent. Son cours a repris 14%.

Comment se déroulait l’activité votre activité jusqu’à la crise sanitaire ?

"Notre exercice 2019 s’était achevé sur une légère décroissance dans le travail temporaire, qui représente 81,8% de notre chiffre d’affaires. Le ralentissement de la demande du secteur automobile en France explique la quasi-totalité de ce repli. Au global, 2019 fut une année de légère décroissance du chiffre d’affaires, à 2488,5 M€ soit -1% en organique dont -4,3% au 4e trimestre. Les deux premiers mois de l’année 2020 restaient sur une tendance semblable, dans un marché en baisse de 6,3% des effectifs intérimaires. Par ailleurs, notre deuxième activité, l’assistance aéroportuaire, avait bien entamé l’année, avec une progression de 6,6% à fin février."

Les résultats 2019 du groupe

Puis tout s’est arrêté en quelques jours, surtout avec l’entrée en confinement…

"L’arrêt fut très brutal. Selon les secteurs, l’intérim a connu une chute d’activité de 60 à 80% pour un CA intérimaire global en baisse de 75% sur la 2e quinzaine de mars. Un chiffre en ligne avec celui annoncé par l’ensemble de la profession. Les 25% de l’activité restante sont concentrés autour de secteurs toujours demandeurs comme le transport, la logistique, la grande distribution, l’agroalimentaire… Le secteur industriel est particulièrement touché, notamment dans l’automobile ou la quasi-totalité des usines de nos clients est fermée.  Dans notre pole aéroportuaire, la quasi-fermeture des pistes et des plateformes en France a fait reculer l’activité de 90%."

L'impact du coronavirus

Quelles mesures avez-vous du prendre ?

"Tout d’abord, nous avons veillé à la protection sanitaire de nos collaborateurs et des intérimaires, puis à la continuité de service dans toutes les agences, même si certaines ont été regroupées. Nous avons eu en France recours au chômage partiel de façon systématique quand les missions devaient se prolonger. Nous nous sommes également engagés dans une politique de réduction de coûts. Nous accordons une attention très particulière au recouvrement des créances clients et à la sécurisation des garanties sur ces créances.

Bien sûr, un grand nombre de sociétés pourrait être fragilisé mais les mesures gouvernementales ont d’ailleurs été prises dans le but de réduire le risque de sinistres significatifs.

Heureusement, notre modèle économique se caractérise par des coûts essentiellement variables et nos charges de personnel corrélées à notre volume d’activité. Mais nous serons toutefois contraints de recourir au chômage partiel pour les missions au sein des entreprises utilisatrices qui se sont vues dans l’obligation de fermer.

Dans notre pôle multiservices qui comprend l’aéroportuaire très affecté, c’est le même schéma.

A l’international, aux Etats-Unis, notre deuxième marché, et en Espagne, notre troisième marché, l’activité résiste un peu mieux pour l’instant, avec des baisses d’activité de l’ordre de 50%, mais nous mettons en place le même type de mesures.

Pour ce qui est de la liquidité du groupe, nous disposons de 600M€ mobilisables qui nous permettront de faire face à cette période de faible activité. Il est encore trop tôt pour y voir clair, nous attendons des mois d’avril et mai extrêmement compliqués, avec probablement une légère amélioration dans certains secteurs, et nous l’espérons une reprise plus substantielle en juin. En attendant, nous travaillons sur la préservation de notre liquidité et la réduction de nos coûts."

Quel pourrait être l’impact sur les résultats du groupe ? Où se situe votre point mort ? Quels sont vos coûts fixes incompressibles ?

"Cela dépendra évidemment de la durée des mesures de confinement et de la force de la reprise. Les mesures prises par les gouvernements, en France notamment, devraient préserver les outils et permettre une reprise rapide le moment venu. Nos coûts fixes, loyers et amortissements compris, approchent les 20M€ par mois. Mais nous travaillons déjà à les ajuster à la baisse en cas de prolongement, au-delà de deux mois, de la situation actuelle. Nous comptons maintenir notre réseau d’agences actuel, indispensable dans notre métier, même si la digitalisation accélèrera au sortir de cette crise où le télétravail et la mobilité auront pris une place plus importante."

Comment imaginez-vous la sortie de crise ?

"Actuellement, nos clients s’organisent, veillent à préserver leur trésorerie et recourent massivement au chômage partiel. Avant la fin du confinement, nous espérons une certaine évolution avec la mise en place des barrières sanitaires métier par métier,  pour assurer la sécurité  des personnes, notamment dans le BTP. La reprise post confinement peut être rapide car dès le frémissement, le travail temporaire sera en première ligne. Nous espérons un redémarrage en juin. Nous sommes sur le pont et nos liquidités nous rendent plus sereins dans la traversée de cette tempête."

Vous évoquez 600 M€ mobilisables et aviez communiqué récemment sur votre souhait de grandir par croissance externe. Est-ce encore d’actualité ?

"Tout d’abord, il est heureux que nous n’ayons pas réalisé de croissance externe il y a deux mois. Les dossiers de croissance externe sont actuellement en mode pause par manque de visibilité sur l’activité à venir. Bien sûr, dès la reprise, nous serons très attentifs à de nouvelles opportunités de croissance. Nous restons confiants et c’est pourquoi nous distribuerons 1 euro par action à nos actionnaires pour les remercier de leur confiance."

Pour traverser la crise