Les principaux actionnaires de Hapag-Lloyd, numéro cinq d'un secteur dominé par le danois Maersk Line, ont rejeté cette proposition, ont dit les sources.

L'action Hapag-Lloyd a bondi de plus de 11% à la Bourse de Francfort la suite de cette information de Reuters. Elle gagnait encore 5,79% à 13h48 GMT.

D'après trois sources financières, CMA CGM a été à l'origine de discussions ces derniers mois avec Hapag-Lloyd au sujet d'une éventuelle fusion par échange d'actions. "L'idée qui a été avancée (...) serait une fusion sans versement d'argent", a dit une première source.

Interrogé au sujet de telles discussions, un porte-parole du groupe allemand a répondu: "Ces rumeurs de marché sont sans fondement."

Un porte-parole de CMA CGM a refusé de s'exprimer sur le sujet.

Le transport maritime de conteneurs est confronté depuis près de 10 ans à des problèmes de surcapacités qui ont provoqué la pire crise jamais vue dans le secteur, avec des entreprises condamnées à disparaître et d'autres contraintes de rechercher des alliances pour parvenir à des économies d'échelle.

Déjà touché de plein fouet par le ralentissement des échanges internationaux à la suite de la crise financière de 2007-2009, le secteur est à nouveau fragilisé par l'aggravation des tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine, qui rend plus incertaine l'évolution des liaisons maritimes.

Hapag-Lloyd a abaissé fin juin sa prévision de bénéfice annuel en raison de la lenteur de la remontée des prix et de la hausse des coûts du carburant et de l'affrètement.

D'après les trois sources, l'approche de CMA CGM a été rejetée par les trois grands actionnaires du groupe allemand, le chilien CSAV (25,8%), la famille allemande Kühne (25%) et HGV, le véhicule d'investissement de la ville-Etat de Hambourg (13,9%).

HAMBOURG VEUT GARDER HAPAG

"Le groupe d'actionnaires principaux détenant la majorité de Hapag ne veut pas de transaction pour l'instant", a dit une deuxième source.

"Il y a la crainte que Hapag soit finalement ramené au rang de filiale de son homologue français. (Hambourg) veut s'assurer que le siège reste à Hambourg et que Hapag-Lloyd reste une entreprise allemande", a-t-elle ajouté.

Une troisième source a déclaré: "Le sentiment, c'est qu'il n'y avait rien pour susciter l'intérêt des principaux actionnaires de Hapag."

La famille Kühne a refusé de s'exprimer sur le sujet. Un porte-parole du ministère des Finances de Hambourg et CSAV n'ont pas répondu aux sollicitations de Reuters.

Aussi bien CMA CGM que Hapag ont effectué des acquisitions récemment mais une fusion leur permettrait de mieux affronter la concurrence sur les principales routes commerciales internationales. Le groupe allemand dispose d'une forte présence sur les liaisons entre l'Europe et l'Amérique et le Moyen-Orient tandis que CMA CGM est implanté en Asie.

Avec un endettement de respectivement 7,2 milliards et 6,7 milliards de dollars (6,1 milliards et 5,7 milliards d'euros) à la fin du premier trimestre, soit davantage que leur capitalisation cumulée, CMA et Hapag risqueraient d'avoir du mal à effectuer une transaction en numéraire.

Le groupe marseillais est contrôlé par la famille Saadé et n'est pas coté en Bourse. Son fondateur Jacques Saadé est mort le mois dernier et le fils de ce dernier, Rodolphe, en est le PDG depuis l'an dernier.

CMA CGM a réalisé en 2017 un bénéfice net de 701 millions de dollars, confirmant son redressement après une perte de 452 millions de dollars l'année précédente.

D'après les sources financières, CMA CGM cherche désormais à renforcer sa présence sur le marché tout en poursuivant ses réductions de coûts à la suite de l'acquisition en 2016 d'APL, compagnie basée à Singapour.

Hapag a pour sa part finalisé en mars 2017 l'acquisition de la compagnie du Golfe UASC. Les sources financières rapportent que le groupe allemand éprouve des difficultés avec l'intégration d'UASC, qui a généré des coûts supplémentaires.

Rolf Habben Jansen, président du directoire de Hapag, a dit en mai ne pas s'attendre à de fusions d'ampleur cette année dans le transport maritime de conteneurs, ajoutant que le groupe allemand n'était "pas très actif" dans la recherche de cibles potentielles.

(Avec Vera Eckert à Francfort et Gus Trompiz à Paris; Bertrand Boucey pour le service français, édité par Véronique Tison)

par Jonathan Saul et Arno Schuetze