PARIS (awp/afp) - Toujours focalisés sur la crise sanitaire, les marchés européens ne s'en sont pas moins lancés dans une course aux sommets, appelée à perdurer si la perspective de voir l'épidémie atteindre bientôt un pic se confirme.

"Les indices boursiers vivent au rythme des nouvelles sur le coronavirus et cela va continuer. Ce qui n'empêche pas les marchés de se tenir extrêmement bien", résume auprès de l'AFP Florence Barjou, responsable de la gestion diversifiée chez Lyxor AM.

"Il n'y a pas de raison que cela change, à moins de très mauvaises nouvelles sur la propagation du virus dans le reste de l'Asie, poursuit-elle. Car les investisseurs s'appuient pour l'instant sur un scénario central d'un pic de l'épidémie atteint d'ici mars. Et la sortie d'un vaccin est évoquée pour avril".

"Au-delà du décompte quotidien, les investisseurs s'intéressent aux tendances, or ces derniers temps et en particulier cette semaine, nous avons vu clairement le signal d'une décélération de nouvelles contaminations", estime également Didier Saint-Georges, membre du comité d'investissement chez Carmignac.

"Cela valide l'idée qu'il s'agit d'une crise forte mais qui devrait être de courte durée. En outre plus de 99% des cas sont concentrés en Chine, qui applique un contrôle draconien", ce qui rassure les marchés, selon lui.

D'après l'expert, la principale incertitude qui demeure est "la question de la propagation hors de Chine" et notamment dans des pays qui n'appliqueraient pas des mesures aussi rigoureuses pour empêcher la diffusion du virus.

Cette deuxième crainte a d'ailleurs assombri la fin de semaine sur les marchés européens, avec de nouveaux cas en Iran et en Corée du Sud.

premiers signaux négatifs

Dans cet environnement, "indicateurs et résultats ont été noyés", note Mme Barjou.

A moins que les publications ne fassent apparaître les premiers effets négatifs de la pandémie.

Au-delà de l'avertissement sur résultat d'Apple aux États-Unis, les signaux venant de grandes entreprises internationales en Europe se sont multipliés cette semaine.

Sur le marché londonien, le groupe de luxe Burberry a notamment souffert. Air France-KLM a pour sa part estimé à entre 150 et 200 millions d'euros le manque à gagner dû à la suspension de ses vols vers la Chine. Et l'équipementier sportif Adidas a vu ses ventes en Chine reculer de 85% sur un an depuis la fin janvier pour cette même raison.

Les résultats attendus de WPP ou IAG à Londres, Danone et Hermès à Paris, ou de Bayer à Francfort, la semaine prochaine produiront sans doute un écho similaire.

"Tout le monde a en tête qu'il y aura sans doute un impact à court terme. Dans ce contexte, pas mal d'entreprises se montrent prudentes et révisent à la baisse de manière assez marquée leurs prévisions", souligne Mme Barjou. Et du coup, "cela pourrait potentiellement réserver des surprises positives lors des prochaines publications, si la situation ne dégénère pas".

En terme sectoriel, la situation actuelle joue clairement en défaveur de l'automobile ou des matières premières. A l'inverse, les services à la collectivité, les télécoms, la santé, les technologies se portent bien.

"L'autre aspect, largement aussi important pour les marchés, c'est que ce qui les faisait monter avant cette crise, est toujours là, à savoir un retour en force des politiques monétaires en Europe et aux Etats-Unis", analyse M. Saint Georges.

Et depuis le démarrage de l'épidémie, les taux d'intérêt sur le marché de la dette qui avaient amorcé une remontée ont de nouveau plongé, ce qui offre des marges de manoeuvre supplémentaires aux entreprises et donc soutient aussi leurs actions.

"Mais comme les indices boursiers montent, grâce aux liquidités abondantes et bon marché, mécaniquement la valorisation des entreprises augmente, ce qui incontestablement créé une forme de fragilité, nuance M. Saint Georges, et cela pourrait générer dans les prochaines semaines ou mois des périodes de prises de bénéfices".

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