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par Jon Nazca, Jordi Rubio et Isla Binnie

BARCELONE, 18 octobre (Reuters) - De violents affrontements ont éclaté vendredi à la nuit tombée au centre de Barcelone au soir d'une journée marquée par une manifestation monstre des indépendantistes et une grève générale.

Pour le cinquième jour depuis la condamnation de neuf dirigeants séparatistes pour la tentative de sécession de 2017, plusieurs centaines de manifestants ont affronté les forces de l'ordre, érigeant des barricades et jetant des projectiles dans leur direction.

Dans la journée, des centaines de milliers de personnes s'étaient rassemblées dans la ville, en scandant "Indépendance!" et "Libérez les prisonniers politiques."

Les syndicats avaient appelé vendredi à la grève générale et les indépendantistes, engagés depuis mercredi dans des "marches de la liberté", ont convergé vers la capitale catalane pour protester contre la condamnation de neuf dirigeants séparatistes pour la tentative de sécession de 2017.

La police a dénombré 525.000 manifestants, et la manifestation s'est globalement déroulée dans le calme.

Mais les choses ont dégénéré après la tombée de la nuit. Les forces de l'ordre ont répliqué aux jets de projectiles et feux de poubelle par des tirs de balles caoutchouc et de grenades lacrymogènes.

Des incidents ont été recensés dans au moins quatre autres villes de Catalogne, selon les autorités.

La contestation a pris un tour radical en Catalogne depuis que le Tribunal suprême espagnol a condamné lundi pour "sédition" neuf dirigeants indépendantistes catalans à des peines de prison allant de neuf à treize ans pour leur implication dans le référendum d'autodétermination d'octobre 2017 et la déclaration unilatérale d'indépendance qui a suivi.

"Les incidents ont été menés (...) par des groupes minoritaires mais très organisés. Ces actions ne resteront pas impunies", a déclaré le ministre espagnol de l'Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, lors d'une conférence de presse.

Evoquant des "violences sans précédent en Catalogne", il a ajouté que 207 policiers avaient été blessés depuis lundi et que les forces de l'ordre avaient procédé à 128 interpellations dans la région.

Le ministère de l'Intérieur a annoncé qu'il était prêt à envoyer des renforts policiers de la "Guardia civil", corps de sécurité publique de statut militaire, aux abords de Barcelone.

LE "CLASICO" REPORTÉ

Plusieurs rues de Barcelone avaient été fermées à la circulation et le métro et les trains régionaux avaient réduit leur trafic en raison de la grève.

Des manifestants ont bloqué l'accès à la Sagrada Familia, la basilique inachevée d'Antonio Gaudi, dans le centre-ville et l'édifice a été fermé au public.

La Fédération espagnole de football a annoncé que la rencontre Barcelone-Real Madrid prévue le 26 octobre au Camp Nou était reportée pour des raisons de sécurité. Les deux clubs ont proposé que le "Clasico" se dispute le 18 décembre.

Cinquante-sept vols ont été annulés vendredi à l'aéroport El Prat de Barcelone, a indiqué l'opérateur Aena.

La ville de Barcelone évalue à plus de 1,5 million d'euros les dégâts causés depuis lundi. Une estimation qui ne prend pas en compte les violences de ce vendredi soir.

L'ancien président indépendantiste catalan Carles Puigdemont, réfugié en Belgique fin 2017 pour échapper à des poursuites judiciaires, s'est vu signifier à Bruxelles le troisième mandat d'arrêt délivré par la justice espagnole pour "sédition et détournements de fonds publics", a précisé vendredi le parquet belge, qui l'a laissé libre sous conditions.

Une audience est prévue à Bruxelles le 29 octobre pour statuer sur le mandat d'arrêt. (Sophie Louet et Henri-Pierre André pour le service français)