(Répétition sans changement d'une dépêche diffusée vendredi)

* Toujours pas de panique sur les marchés d'actions

* Le coronavirus continue pourtant de se propager

* Il aura des conséquences sur l'économie

* Les investisseurs misent sur un impact limité

par Patrick Vignal

PARIS, 17 février (Reuters) - Les marchés d'actions ne cèdent toujours pas à la panique face à l'épidémie de coronavirus malgré un risque pour la croissance mondiale qui se précise, ce qui conduit à s'interroger sur une éventuelle complaisance de la part des investisseurs.

Les Bourses ont bien brièvement reculé par moments, notamment lorsque les autorités sanitaires de la province chinoise du Hubei, foyer de l'épidémie, ont annoncé jeudi une nette augmentation du nombre de morts et de personnes contaminées après avoir modifié leurs méthodes de diagnostic.

Les chiffres fournis le lendemain par Pékin ont marqué un nouveau ralentissement mais restent considérables avec 121 décès supplémentaires et 5.090 nouveaux cas de contamination.

Avec près de 1.400 morts et de 64.000 cas de contamination, le bilan actuel du coronavirus Covid-19 dépasse largement en ampleur celui du Sras de 2002-2003.

Le gouvernement chinois n'a pourtant pas lésiné sur les moyens pour tenter de l'enrayer avec l'extension des congés du nouvel an lunaire, la fermeture d'usines et des mesures de quarantaine d'une ampleur inédite.

L'épidémie, cependant, continue de se propager et il ne fait plus de doute qu'elle aura des conséquences sur les marchés financiers et sur l'économie en général.

UN IMPACT DIFFICILE À QUANTIFIER

"Le coronavirus entraîne des perturbations significatives pour les entreprises, la consommation et les chaînes d'approvisionnement mondiales", souligne Charlie Awdry, gérant de portefeuille actions chinoises pour Janus Henderson Investors.

"Nous nous attendons à un impact sur l'économie significatif mais extrêmement difficile à quantifier", ajoute-t-il avant de prédire de nouvelles mesures d'assouplissement de la part des autorités chinoises afin de freiner le ralentissement de la deuxième économie du monde.

Si la volatilité est revenue sur les marchés, avec de brefs épisodes d'aversion pour le risque, les actions n'en continuent pas moins de prospérer, comme l'illustrent les progressions voisines de 4% depuis le début de l'année pour le Stoxx 600 européen comme pour le Standard & Poor's 500 américain , qui ont inscrit des records ces derniers jours.

Il est pourtant certain que le virus aura un impact sur la Chine et pour ses principaux partenaires ainsi que pour les actifs fortement exposés au marché chinois.

"Dès lors, sur quoi repose l'optimisme dont semblent faire preuve les investisseurs en actions ?", s'interroge Nadège Dufossé, responsable de l'allocation d'actifs chez Candriam.

"En simplifiant, on peut dire que les marchés actions prennent en compte l'idée que cet impact négatif, même fort, n'est que temporaire et sera largement rattrapé sur la seconde partie de l'année", répond-elle.

Selon les stratèges actions européennes de Barclays, la chute récente des actions exposées à la Chine ainsi que des rendements obligataires semble indiquer que les marchés ne sont pas exagérément complaisants à ce stade.

Le retour de la volatilité crée en outre des opportunités pour les investisseurs, font-ils valoir avant de reconnaître que le virus augmente les risques baissiers sur l'activité et sur les bénéfices.

LE PÉTROLE ET LES MÉTAUX SOUFFRENT, LES TAUX AUSSI

L'Europe n'est pas à l'abri, étant largement exposée à ma demande chinoise, à ses touristes et aux chaînes d'approvisionnement dont la Chine forme un maillon essentiel, lit-on encore dans la note de Barclays.

D'autant que la fin 2019 n'a pas été brillante pour l'économie de la zone euro, comme l'a montré vendredi l'annonce d'une stagnation de l'économie allemande au quatrième trimestre.

Les résultats de sociétés, eux, sont diversement appréciés et les investisseurs n'hésitent ni à sanctionner les déceptions, comme Capgemini, qui a perdu 3,4% jeudi après une croissance inférieure aux attentes, ni à applaudir les bonnes surprises, comme celle de Kering (+6,3% mercredi après des ventes au-dessus du consensus).

Les jours qui viennent apporteront encore leur lot de résultats et d'indicateurs avec notamment plusieurs indices de confiance et, vendredi, les résultats préliminaires des enquêtes PMI sur l'activité dans le secteur privé de la zone euro au mois de février.

En attendant, si les actions paraissent minimiser la menace du coronavirus, il n'en va pas de même pour toutes les classes d'actifs, souligne Nadège Dufossé, qui rappelle que la Chine représente presque 30% de la production manufacturière mondiale, plus de 20% de la consommation d'énergie et un peu plus de 10% de la consommation.

"Le prix du pétrole a chuté de 25% depuis début janvier, les prix des métaux industriels sont également en baisse de 10% et les taux américains sont revenus vers des niveaux proches de l'été dernier, quand les investisseurs craignaient une récession en 2020", note-t-elle.

Le pari d'un impact limité par son ampleur et sa durée du coronavirus que semblent faire les marchés d'actions pourrait s'avérer payant à la condition que le pic de l'épidémie soit atteint dans les prochaines semaines, estime la stratège de Candriam, qui privilégie pour sa part une attitude un peu plus prudente en matière d'investissement.

"On ne saura qu'a posteriori si les marchés actions étaient optimistes ou complaisants", conclut Nadège Dufossé.

(édité par Marc Angrand)