Nathaniel Taplin,

The Wall Street Journal

HONG KONG (Agefi-Dow Jones)--Si les guerres commerciales, qu'elles soient réelles ou imaginées, font actuellement la une des médias, elles ne semblent pas vraiment inquiéter les économistes, qui estiment que la croissance mondiale se porte bien.

Des signes inquiétants commencent pourtant à émaner du marché des matières premières et de l'industrie mondiale.

Si l'activité manufacturière dans la plupart des grandes économies s'inscrit toujours en hausse, le rythme d'expansion a toutefois sensiblement ralenti ces derniers mois. Des matières premières clés pour l'industrie, comme le cuivre et l'aluminium, ont par ailleurs entamé un mouvement de vente à la fin 2017, bien avant que les marchés ne soient déstabilisés par les craintes d'un dérèglement des échanges commerciaux.

On peut en conclure que le fort rebond de l'activité manufacturière mondiale observé depuis la fin 2016 a peut-être déjà atteint un pic, ou vabientôt l'atteindre, qu'une véritable guerre commerciale éclate ou non.

La production manufacturière ralentit en Chine

Un ralentissement de la production manufacturière chinoise est perceptible depuis des mois. Malgré un léger rebond dans le sillage du Nouvel An chinois en février, l'indice PMI officiel publié par le gouvernement chinois semble avoir atteint un pic au troisième trimestre 2017, tandis que l'indice publié par Caixin Media et Markit a globalement stagné depuis.

La nouveauté réside dans le fait que d'autres grands indicateurs sont en train de prendre le même chemin.

L'indice PMI manufacturier de la zone euro publié par Markit Economics a perdu 4 points depuis décembre, même s'il reste bien supérieur au seuil de 50 qui distingue croissance et contraction. Les PMI japonais et coréen ont eux aussi cédé du terrain, tandis qu'aux Etats-Unis, le niveau élevé de l'indice global masque un ralentissement du sous-indice des nouvelles commandes depuis le quatrième trimestre 2017 ainsi qu'une remontée du niveau des stocks.

Dans ces conditions, on comprend que les matières premières soient elles aussi à la peine.

Repli des prix de l'aluminium

Si le pétrole a plutôt bien résisté aux inquiétudes croissantes liées aux tensions géopolitiques, les prix du cuivre et du charbon ont reculé de plus de 5% depuis la fin décembre. Les prix de l'aluminium ont abandonné plus de 10% tandis que ceux du minerai de fer ont perdu près de 9%, des replis d'autant plus frappants que le dollar a continué à se déprécier sur cette période.

Cet accès de faiblesse -- notamment en ce qui concerne l'aluminium, l'une des premières cibles des velléités protectionnistes de Donald Trump -- est sans doute en partie lié à la montée des tensions commerciales et au rebond de la production chinoise après la levée des mesures antipollution de la période hivernale.

Mais le fait que ce mouvement de vente soit à ce point généralisé et qu'il ait démarré à peu près au moment où les indices PMI mondiaux s'approchaient de leurs pics laisse entendre qu'il est principalement dû au ralentissement de la croissance industrielle.

Cela ne signifie pas qu'une récession manufacturière soit proche, mais pour la première fois depuis le début 2017, les principaux indices PMI laissent tous présager un ralentissement, plutôt qu'une accélération, de la croissance.

Les investisseurs qui espèrent que les discours rassurants vantant une croissance mondiale synchronisée suffiront à protéger leurs portefeuilles en cas d'escalade des tensions commerciales devraient y réfléchir à deux fois.

-Nathaniel Taplin, The Wall Street Journal

(Version française Emilie Palvadeau) ed : ECH - VLV

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