Londres (awp/afp) - Le laboratoire pharmaceutique irlandais Shire a rejeté une offre d'achat à 44 milliards de livres du japonais Takeda, mais les discussions continuent, et il a aussi fait l'objet des convoitises du groupe Allergan, qui a cependant décidé de jeter l'éponge.

La bataille qui s'annonçait autour de cette méga-acquisition n'aura peut-être pas lieu, à moins que d'autres prétendants ne se dévoilent. Quelques heures après un premier communiqué faisant part de son intérêt, le géant mondial de l'esthétique médicale Allergan, fabricant du Botox, a en effet annoncé jeudi soir qu'il "n'avait pas l'intention de déposer une offre".

La société, dont le siège est à Dublin mais qui est très présente aux Etats-Unis, n'a pas donné d'explications à ce revirement.

Takeda apparaît donc désormais comme le seul candidat officiellement sur les rangs. Il a confirmé avoir fait une offre la semaine dernière, afin de racheter la totalité du capital de Shire, pour ce qui pourrait être la plus importante opération jamais réalisée par un groupe japonais.

Pour l'heure, ses efforts sont restés infructueux: Shire s'est opposé à cette tentative qui le valorisait 46,50 livres par action, soit 44 milliards de livres (50,6 milliards d'euros), dans le cadre d'une offre en partie en numéraire, en partie en actions Takeda. Les actionnaires de l'irlandais auraient possédé 51% de la nouvelle entité.

Le laboratoire pharmaceutique irlandais a par la suite expliqué avoir rejeté ce qui constituait en fait la troisième proposition d'acquisition de la part de Takeda, qui a amélioré sa copie deux fois en l'espace de deux semaines.

Shire estime néanmoins la proposition trop peu généreuse compte tenu de ses perspectives de croissance et de son portefeuille de médicaments en développement.

Takeda, qui avait évoqué son intérêt pour Shire fin mars, a jusqu'au 25 avril pour décider de faire ou non une offre d'acquisition ferme.

Les deux groupes ont précisé que les négociations se poursuivaient.

"A la demande du conseil d'administration, les conseillers de Shire ont engagé le dialogue avec les conseillers de Takeda pour discuter d'une possible nouvelle offre plus intéressante", selon le groupe irlandais.

- Doutes au Japon -

Ces annonces ont profité à l'action de Shire qui a bondi de 5,89% à 39,75 livres jeudi à la Bourse de Londres, restant toutefois à un niveau bien inférieur au prix de 46,50 livres proposé par Takeda.

A Tokyo en revanche, l'accueil a été plus réservé: le titre Takeda cédait près de 4% peu après l'ouverture des échanges.

Au Japon en effet, ce projet suscite des réserves parmi les investisseurs, qui s'interrogent sur sa capacité à financer une telle opération envers un groupe plus gros que lui.

L'entreprise nippone souligne quant à elle que cette acquisition "accélérerait sa transformation et aboutirait à la formation d'un groupe mondial" basé au Japon, "avec une présence géographique équilibrée, un portefeuille solide et varié et une force financière dopée".

A travers une telle opération, Takeda, dirigé par le Français Christophe Weber, cherche à se développer dans les maladies du système digestif et les neurosciences, ainsi que dans les maladies rares, une spécialité de Shire.

Le groupe pourrait également renforcer sa présence aux Etats-Unis puisque Shire, basé à Dublin, est très présent sur le marché américain où il a notamment acquis la biotech américaine Baxalta pour 32 milliards de dollars en 2016.

- Le secteur en ébullition -

Les marques d'intérêt de Takeda n'ont toutefois pas empêché Shire d'annoncer lundi la vente au laboratoire français Servier de ses activités en oncologie pour 2,4 milliards de dollars.

Cette transaction doit être bouclée au troisième trimestre au plus tard, Shire estimant que l'oncologie, bien que très rentable et source de croissance, n'était pas essentielle à sa stratégie de long terme.

Takeda, dont M. Weber avait dit en 2014 vouloir faire l'un des plus grands groupes au monde dans le médicament, a réalisé plusieurs acquisitions de grande ampleur ces dernières années.

Il a racheté en 2011 le suisse Nycomed pour 9,6 milliards d'euros et début 2017 le laboratoire américain Ariad, spécialisé dans les thérapies de cancers, pour 5,2 milliards de dollars.

Les tentatives de Takeda envers Shire interviennent alors que le secteur est animé par une nouvelle vague de fusion-acquisition ces derniers mois.

Dernière opération en date, le groupe allemand de chimie-pharmacie Merck KGaA a annoncé la vente de sa division de médicaments sans ordonnance au fabricant américain de produits ménagers Procter and Gamble pour 3,4 milliards d'euros.

afp/lk