Paris (AFP) --Emmanuel Macron a annoncé lundi que Toyota allait investir 300 millions d'euros dans son usine d'Onnaing (Nord), où il s'est rendu avant d'accueillir dans la soirée 140 dirigeants de grands groupes étrangers à Versailles.

Avec ces deux évènements organisés avant l'ouverture du Forum de Davos, où il se rendra mercredi, le président veut montrer que sa politique proentreprises attire les multinationales.

"En France, le travail est une fierté", a-t-il déclaré après son arrivée, vers 13H00, à l'usine située aux portes de Valenciennes. Il a été accueilli par les responsables de Toyota puis a serré la main d'une trentaine d'employés avant de visiter le site, où est notamment construite la voiture Yaris.

"Si Toyota décide d'investir 300 millions et créer 700 CDI ici, c'est parce que vous êtes bons", a-t-il déclaré, devançant l'annonce officielle par le groupe de cet investissement pour moderniser et renforcer l'usine.

"C'est tout simplement magnifique! En France, c'est tellement rare", s'est félicité Philippe Christmann, 56 ans, chef de chantier mécanique dans la société sous-traitante Schuler. "L'usine va s'agrandir", s'est réjoui Jérôme, un ouvrier de 33 ans.

Mais, pour Éric Pecqueur, secrétaire général CGT-Toyota, la somme investie "ne représente rien pour un groupe comme Toyota". "Ce groupe et Macron utilisent les ouvriers et les chômeurs pour s'offrir une campagne de pub gratuite", a-t-il dénoncé en manifestant avec une dizaine de militants CGT devant l'entrée de l'usine, entourés de CRS.

En fin d'après-midi, Emmanuel Macron est attendu au château de Versailles où il recevra les patrons étrangers avec 16 membres du gouvernement, dont le Premier ministre Édouard Philippe et le ministre de l'Économie Bruno Le Maire.

Parmi les invités, figurent des patrons de géants américains, chinois et européens, comme Coca-Cola, Facebook (Sheryl Sandberg), Google, Goldman Sachs, UPS, Alibaba, Bosch, SAP, Ikea, Barilla, Siemens, Volvo ou Rolls-Royce.

Plusieurs groupes doivent annoncer de gros projets d'investissements en France: cinq significatifs dans l'industrie et le numérique et près d'une dizaine d'autres de taille moyenne.

- Évolution positive -

Facebook a ainsi annoncé lundi matin le lancement de deux programmes de formation au numérique pour 65.000 personnes et un investissement de 10 millions d'euros dans l'intelligence artificielle. Le groupe pharmaceutique suisse Novartis devrait confirmer 900 millions d'investissements en France, notamment en Alsace.

Convaincre des patrons est un exercice auquel est parfaitement rodé M. Macron, ancien banquier d'affaires chez Rothschild. Le lieu aussi lui est familier. Lorsqu'il était ministre de l'Économie, il avait déjà choisi les ors de Versailles pour convier des investisseurs étrangers.

Emmanuel Macron s'envolera ensuite mercredi pour Davos, où il plaidera pour une mondialisation mieux organisée, avec "une vision politique mondiale", selon son entourage.

Le chef de l'État pourra capitaliser sur la remontée de l'image de la France auprès des investisseurs étrangers depuis son élection. Selon un baromètre réalisé en novembre par la Chambre de commerce américaine et le cabinet Bain, 72% des investisseurs américains escomptent une évolution positive du contexte économique en France contre 30% en 2016, un record depuis 18 ans.

Selon un sondage Ipsos auprès de 200 responsables de grosses sociétés étrangères en décembre, 60% jugent le pays attractif contre 46% en 2016.

- Moins d'emplois créés -

La France estime avoir une carte à jouer au plan mondial, dans un contexte marqué par le Brexit et l'imprévisibilité de Donald Trump.

Le gouvernement tente ainsi d'attirer à Paris les banques internationales qui voudraient quitter Londres, grâce à un allégement des indemnités de licenciement des traders. Et la capitale accueillera bientôt l'Autorité bancaire européenne.

Tout ne relève pas d'un "effet Macron". L'année 2016 avait compté 1.117 investissements physiques étrangers en France (+16%), un record depuis dix ans selon Business France, l'organisme de promotion de la France à l'international dont l'ex-dirigeante Muriel Pénicaud est devenue ministre du Travail.

Mais ces investissements créent moins d'emplois: seuls 30.108 emplois ont été créés ou maintenus grâce aux capitaux étrangers en 2016 (-11%). De plus, les géants américains du numériques, s'ils investissent en France, échappent largement à l'impôt sur les sociétés, ce contre quoi Paris tente de mobiliser ses voisins.

Le gouvernement s'inquiète en outre de la réforme fiscale américaine, qui va abaisser l'impôt sur les sociétés de 35% à 21%. Angela Merkel et Emmanuel Macron, qui veulent harmoniser l'impôt sur les sociétés en Europe, risquent d'être pris de vitesse par la concurrence fiscale américaine.

Dernier bémol, susceptible de faire fuir les capitaux, la France veut combattre le "pillage" de ses technologies, comme l'a signifié Bruno Le Maire en Chine. Paris va ainsi élargir le "décret Montebourg" sur le contrôle des investissements aux secteurs du numérique et pousse la Commission européenne à contrôler davantage les investissements extra-européens.