Paris (awp/afp) - Le PDG et premier actionnaire d'EssilorLuxottica, Leonardo Del Vecchio, a estimé jeudi à l'assemblée générale ordinaire du groupe qu'il serait "vraiment difficile" de trouver un directeur général d'ici fin 2020 comme prévu et donné sa préférence à un recrutement en interne.

"Dans le contrat de fusion, il était écrit qu'il faudrait y arriver d'ici fin 2020. Mais ce sera vraiment difficile d'y arriver", a déclaré M. Del Vecchio devant les actionnaires du groupe réunis à Paris.

"Les caractéristiques requises (d'un futur directeur général, NDLR), nous les avons en interne: nous avons des collaborateurs extrêmement qualifiés et personne ne pourra faire mieux qu'eux", a-t-il estimé.

EssilorLuxottica recherche toutefois des profils tant en interne qu'en externe. Le groupe a d'ailleurs mandaté en avril deux cabinets internationaux de chasseurs de têtes à cette fin.

"J'ai parlé à ces deux sociétés de consulting, on m'a déjà présenté un candidat et j'ai dit non", a lâché jeudi M. Del Vecchio. "Prendre un avocat ou un financier, s'il ne connaît rien en lunettes ou en verres, ça ne nous servirait à rien", a-t-il insisté.

Après des semaines de crise de gouvernance, EssilorLuxottica a annoncé lundi un compromis consistant à déléguer des responsabilités opérationnelles à Francesco Milleri, le bras droit de M. Del Vecchio, ainsi qu'à Laurent Vacherot, le directeur général d'Essilor.

En novembre dernier, un mois à peine après la réalisation de la fusion entre Essilor et Luxottica, M. Del Vecchio, qui contrôle 32% du capital du nouvel ensemble via sa holding Delfin, avait exprimé son souhait de proposer "immédiatement" M. Milleri comme directeur général du groupe.

Par la suite, il s'était contenté à la place de pousser pour déléguer à M. Milleri des responsabilités opérationnelles, ce qu'il a obtenu avec l'accord annoncé lundi. Cependant cet accord prévoit que ni M. Milleri ni M. Vacherot ne soient candidats au futur poste de directeur général.

"Message fort" des petits actionnaires

Les propositions de plusieurs fonds actionnaires de nommer deux administrateurs indépendants supplémentaires au conseil d'administration du groupe, pour éviter la paralysie en cas d'un nouveau conflit de gouvernance, ont été rejetées jeudi, mais de peu.

Malgré l'opposition du conseil d'administration à ces candidatures, celle de l'Américaine Wendy Lane a ainsi récolté 43,68% des votes à l'AG, et celle du Danois Jesper Brandgaard 34,15%. Une majorité de 50% était requise pour passer.

C'est "un message fort" des actionnaires minoritaires, a reconnu le vice-PDG délégué du groupe Hubert Sagnières, interrogé par l'AFP à l'issue de l'AG.

M. Sagnières n'a toutefois pas précisé comment le conseil allait tenir compte de cet avertissement à l'avenir.

Autre signe du mécontentement des actionnaires vis-à-vis de la gouvernance ces derniers mois, les rémunérations au titre de 2018 de M. Del Vecchio et M. Sagnières ont été mollement approuvées jeudi, toutes deux à hauteur de 58% environ.

M. Del Vecchio doit percevoir 500.000 euros d'éléments fixes et variables, assortis de l'attribution de 50.000 actions de performance d'une valeur comptable de 2,28 millions d'euros, au titre de sa fonction de PDG du groupe depuis les trois derniers mois de l'an dernier.

La rémunération de M. Sagnières couvre l'ensemble de l'année 2018, en tant que PDG d'Essilor de janvier à fin septembre puis vice-PDG délégué d'EssilorLuxottica à compter du 1er octobre. Elle s'élève à plus de deux millions d'euros, plus l'octroi de 50.000 actions de performance comme pour le PDG.

"Comment peut-on rémunérer des dirigeants à ce niveau alors que la fusion jusqu'à présent a été un échec?" s'est notamment indignée une représentante de petits actionnaires durant l'AG.

afp/rp