Toujours à la barre de Memscap, société qu’il a fondée en 1997, le docteur en micro-électronique Jean-Michel Karam, né au Liban en 1969, est resté fidèle à ses premiers travaux de directeur de recherche, déjà dédiés aux MEMS. Entrepreneur dans l’âme, cela ne l’a pas empêché de s’investir parallèlement dans de nombreuses start-ups, notamment dans la cosmétique. L’année 2019 sera décisive pour le devenir de Memscap qui souhaite s’appuyer sur une profitabilité retrouvée pour reprendre durablement le chemin de la croissance. Entretien.

Jean-Michel Karam, pouvez-vous nous présenter Memscap ?
"Memscap fournit des solutions à base de MEMS, c’est-à-dire des systèmes micro-électroniques intégrés sur silicium qui assurent les fonctions de capteur ou d’actionneur. Nous fournissons trois secteurs : l’avionique, le médical et les communications optiques. Sur un marché mondial des MEMS qui totalise douze milliards de dollars, nous sommes focalisés sur les marchés à haute valeur ajoutée, qui représentent deux milliards de dollars. Nous détenons des parts de marché importantes sur certains segments précis de ce marché, et notamment celui des capteurs de pression pour l’avionique, un marché d’une cinquantaine de millions de dollars en croissance d’environ 9% par an. L’avionique a représenté 48% d’un chiffre d’affaires 2018 qui s’est établi à 13 M€, en hausse de 11,2%. L’avionique constitue notre priorité pour les années à venir. Nous avons par ailleurs deux niches que nous maîtrisons et qui offrent des revenus récurrents. Le médical d’une part, qui a le potentiel pour doubler dans les cinq ans. Notamment nous mettons en place une solution pour les systèmes de filtration sanguine et de dialyse plus accessible en termes de prix. Les communications optiques d’autre part, où nous sommes leader incontesté de la fourniture de puces d’atténuateurs variables optiques, un marché stable mais captif. Memscap est une société cotée en Bourse depuis 2001, dont l’équipe de direction est en poste depuis au moins 2005, dans un secteur où nous sommes les seuls pure players à avoir survécu. La direction détient 10% du capital, le solde étant détenu par des investisseurs institutionnels ou particuliers".
 

Extrait de la présentation SFAF Memscap, avril 2019

Comment décririez-vous les résultats 2018 publiés récemment par Memscap ?
"Nos ventes 2018 ont progressé de 16% en dollars, sachant que 78% de nos ventes sont réalisées en dollars et que la croissance a été tirée par les communications optiques et l’avionique, certains produits mass market étant abandonnés, car peu margés. Notre marge brute en a profité, gagnant cinq points, à 34%, et permettant à notre marge opérationnelle de revenir en territoire positif à 0,5 M€, contre une perte de 0,6 M€ en 2017. Ainsi, notre résultat net est remonté à 0,3 M€ contre une perte de 0,8 M€ en 2017. Notre bilan est sain, avec une situation de trésorerie nette d’endettement financier de 2,3 M€, ce qui nous permettra d’achever la mutation industrielle de notre production de solutions optiques".

Pouvez-vous développer ce volet industriel de votre stratégie ?
"Nous avons aujourd’hui trois implantations dont deux industrielles : notre siège français à Bernin, notre usine de Skoppum en Norvège dédié à l’avionique et au médical, et notre usine de Caroline du Nord, dédiée essentiellement aux produits optiques. Nous bénéficions d’une visibilité relativement bonne sur cette activité optique. En 2018, elle réalise 3,7 M$ de revenus très captifs, mais les coûts fixes de notre usine américaine sont trop élevés pour nous permettre de dégager des profits significatifs, d’où notre souhait d’établir une seconde source de production nous permettant de flexibiliser et d’alléger notre usine. Ce transfert de technologie, initié en 2017, est complexe, et prend du temps. Les premières étapes se sont bien passées, mais il nous faut encore un ou deux trimestres pour valider en interne et ensuite auprès de nos clients la qualité des produits finis. Le succès de ce passage à une production fab-lite nous permettrait de viser, dès 2020, un bénéfice supplémentaire de 1,5 à 2 millions d’euros, et nous donnerait les moyens d’accélérer sur le médical, second marché à fort potentiel pour Memscap".
 

Extrait de la présentation SFAF Memscap, avril 2019
 
Quel regard portez-vous sur l’action Memscap, qui oscille autour de 2 € depuis 10 ans ?
"Un PDG n’est pas censé commenté le cours de bourse mais il est vrai qu’avec moins de 12 M€ de valeur d’entreprise, soit moins d’une fois notre chiffre d’affaires, nous avons du mal à comprendre notre valorisation. Notre bilan est riche en cash, nous sommes propriétaires de notre site de Bernin estimé à 2 M€, et nos déficits reportables avoisinent les 130 M€. Nous possédons la marque IOMA licenciée à Unilever qui nous génère aujourd’hui des redevances avec une option d’achat pour Unilever de 3,5 millions d’euros. Il est clair que la réussite de la flexibilisation de notre production de produits optique changerait le regard des investisseurs sur Memscap".

L'auteur est actionnaire de Memscap.