Paris (awp/afp) - Le constructeur automobile Renault doit annoncer mercredi matin avec Nissan et Mitsubishi un renforcement de l'alliance franco-japonaise, en difficulté en pleine crise du coronavirus, tournant le dos à la course aux volumes initiée par l'ancien patron déchu Carlos Ghosn.

Ce plan stratégique, qui mettra le cap sur la rentabilité et le renforcement des synergies réelles, sera dévoilé alors que les deux principaux piliers du partenariat, Nissan et Renault, doivent dévoiler respectivement jeudi et vendredi des plans d'économie sévères incluant des fermetures de sites et sans doute des suppressions de postes.

Un communiqué doit être diffusé mercredi à 08H45, après la fermeture de la Bourse de Tokyo et avant l'ouverture de celle de Paris. Dans la foulée, une conférence de presse est prévue à 09H00, en visioconférence.

Le président de Renault et de l'alliance, Jean-Dominique Senard, détaillera la stratégie du groupe pour mieux mettre en commun les investissements dans les nouvelles technologies (électrification, conduite autonome, notamment) et partager davantage les usines et les composants automobiles pour réduire les coûts.

La directrice par intérim, Clotilde Delbos, ainsi que les dirigeants de Nissan et Mitsubishi, seront également connectés pour répondre aux questions des journalistes.

L'idée est de confier à l'une des entreprises un leadership pour une région, un produit ou une technologie donnée, sur lequel les autres partenaires devraient s'appuyer.

Ainsi, Nissan pourrait davantage profiter de la forte implantation de Renault en Europe ou de son savoir-faire dans les petits véhicules économiques. A l'inverse, Renault pourrait bénéficier de l'outil industriel de Nissan en Chine, ou de son savoir-faire dans les véhicules plus gros. Mitsubishi dispose d'un savoir-faire reconnu dans les motorisations hybrides rechargeables (essence-électrique) et est bien implanté en Asie du sud-est.

Les dissensions dépassées

Depuis l'arrestation de Carlos Ghosn au Japon en novembre 2018 pour des malversations présumées, cette alliance unique dans l'industrie automobile a vécu une descente aux enfers, après avoir atteint la première place mondiale des ventes automobiles en écoulant plus de 10,6 millions d'unités.

Ces volumes record, présentés comme un triomphe par M. Ghosn, désormais réfugié au Liban, n'auront pas été d'un grand secours pour les partenaires dont la rentabilité a chuté ces derniers mois, avant même le début de la pandémie de Covid-19. L'objectif de 14 millions de véhicules à l'horizon 2022, visé par l'ancien PDG, semble désormais hors d'atteinte.

Les annonces de mercredi devraient rester assez techniques, sans objectif de chiffre d'affaires ou de volumes à atteindre. Les trois groupes n'ont pas non plus prévu de dévoiler avant l'heure les projets de fermetures d'usines ou de réduction d'emplois dans l'ingénierie. Mais les synergies réalisées seront bien synonymes de baisse des effectifs.

Le journal français Le Figaro a affirmé mardi soir que Renault prévoyait de supprimer plus de 10% de ses effectifs français d'ici à 2024, principalement par non remplacement des départs à la retraite. Nissan, de son côté, pourrait supprimer 15% de ses emplois dans le monde d'ici à 2023.

Renault a dévoilé en début d'année ses premières pertes en dix ans et Nissan annoncera jeudi des résultats attendus aussi dans le rouge. Egalement mal en point, Mitsubishi doit aussi annoncer un plan d'économie fin juillet ou début août.

Le renouvellement des dirigeants chez Renault et Nissan, impulsé par M. Senard, a en tout cas permis de tourner la page d'une année de crise entre Français et Japonais. Avec le resserrement des liens annoncé mercredi, les dissensions qui avaient éclaté au grand jour dans le sillage de l'affaire Ghosn semblent désormais dépassées.

afp/jh