Tokyo (awp/afp) - Grande ou petite révolution? Un conseil d'administration de Nissan doit aborder mardi l'épineuse question du choix du futur directeur général et va aussi tenter d'en finir avec l'image d'une direction empêtrée dans les scandales.

Il est toutefois peu probable qu'un candidat fasse l'unanimité dès l'issue de ce conseil, qui sera plutôt l'occasion de passer en revue les principaux prétendants, a prévenu une source proche du dossier interrogée par l'AFP.

"Il faut un consensus absolu sur le sujet, sinon cela va créer des conditions d'échec dans la durée", a ajouté cette source, espérant une décision d'ici le 20 octobre.

Plusieurs noms circulent pour succéder à Hiroto Saikawa, poussé à la démission le mois dernier après avoir été rattrapé par une affaire de prime indûment perçue en 2013, du temps où Carlos Ghosn dirigeait le groupe.

Parmi eux, trois Japonais issus des rangs internes: Jun Seki, 58 ans, chargé depuis mai dernier du "redressement de la performance" du groupe; Makoto Uchida, 53 ans, actuel responsable des activités de Nissan en Chine, ainsi que Yasuhiro Yamauchi, 63 ans, l'actuel directeur général par intérim.

En externe, une personnalité est sortie du lot: Ashwani Gupta, 49 ans. Originaire d'Inde, il est actuellement directeur opérationnel de Mitsubishi Motors et responsable de l'activité des véhicules utilitaires légers au sein de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi.

Le choix s'annonce complexe. Car certains chez Nissan désirent voir le constructeur japonais s'émanciper encore davantage de Renault, qui détient 43% de son capital, tandis que le voeu de la partie française, notamment, est de relancer l'alliance, paralysée depuis l'arrestation puis l'inculpation de Carlos Ghosn fin 2018 pour des malversations financières présumées.

"Ce qui nous importe nous, en tant qu'actionnaire de Renault, c'est que le futur dirigeant de Nissan soit bien pro-alliance, évidemment", a souligné vendredi dernier Martin Vial, le président de l'Agence des participations de l'Etat (APE) français, qui détient 15% de Renault.

"Certains chez Nissan voient l'alliance comme un élément marginal, alors que c'est un élément fondamental" pour le redressement du groupe, insiste la source interrogée par l'AFP.

Deux analystes automobiles japonais sondés par l'AFP pariaient sur M. Seki, qui a fait toute sa carrière au sein du groupe: "Pour les salariés de Nissan, le patron doit connaître l'entreprise à 360 degrés (...). C'est pourquoi ils auraient davantage confiance en M. Seki", a estimé l'un de ces analystes.

Eléments "toxiques"

Un autre dossier, tout aussi brûlant, est aussi au menu du conseil d'administration: trancher le sort de plusieurs cadres exécutifs de Nissan toujours en place, bien qu'ils auraient délibérément perçus des primes indues par le passé, comme M. Ghosn, son ancien bras droit Greg Kelly et M. Saikawa.

Parmi eux figure Hari Nada, l'influent responsable des affaires juridiques de Nissan, réputé avoir joué un rôle clé dans la chute de M. Ghosn. Il serait l'un des deux lanceurs d'alerte.

Certains administrateurs du groupe sont particulièrement irrités du fait qu'ils n'aient pas eu accès à la totalité de l'audit interne de Nissan, dont les conclusions communiquées à la presse début septembre ont préféré charger la barque de M. Ghosn et M. Kelly.

Nissan avait tout au plus précisé que six autres hauts responsables du groupe, toujours en activité pour certains, avaient également touché des primes inappropriées par le passé, mais sans les nommer ni exiger leur départ, au motif qu'ils auraient bénéficié du système à leur insu.

"La situation n'est plus vivable" en raison de cette "transparence incomplète", selon la source proche du dossier interrogée par l'AFP.

Ces éléments "toxiques" doivent partir, car ils sont responsables de l'ambiance "délétère" qui régnerait actuellement au sommet de Nissan, tout en minant les efforts pour repartir de l'avant, a encore ajouté la même source.

Nissan n'a pas officiellement confirmé la tenue mardi d'un conseil d'administration. Dans une déclaration transmise lundi, le groupe avait assuré que son audit interne avait été mené "de manière rigoureuse et appropriée", en réaction à des articles de presse évoquant des situations de conflits d'intérêt, notamment concernant M. Nada.

afp/ck