(Actualisé avec déclarations d'un avocat de Carlos Ghosn, derniers paras)

par Maki Shiraki

TOKYO, 4 janvier (Reuters) - Carlos Ghosn s'est enfui de sa résidence à Tokyo après qu'une société privée de sécurité embauchée par Nissan a arrêté sa surveillance, ont déclaré samedi trois sources proches du dossier à Reuters.

L'ancien patron de Renault et de Nissan, qui était assigné à résidence au Japon dans l'attente de son procès pour malversations financières, a fui au Liban en début de semaine pour se soustraire à un système judiciaire japonais qu'il qualifie de "partial".

Carlos Ghosn affirme avoir organisé seul son départ, sans l'assistance de sa famille.

Dans l'attente de son procès, Nissan avait chargé une société de sécurité de le surveiller pour s'assurer qu'il ne rencontrait aucune personne impliquée dans le dossier, ont dit les trois sources.

Les avocats de Carlos Ghosn avaient cependant exigé l'arrêt de cette surveillance au motif qu'elle violait les droits de leur client et l'ancien président de Nissan s'apprêtait à porter plainte contre cette société de sécurité, ont ajouté les sources.

L'entreprise de sécurité a mis fin à sa surveillance le dimanche 29 décembre, selon ces sources.

Un porte-parole de Nissan a refusé de s'exprimer.

D'après la télévision publique japonaise NHK, qui s'appuie sur des sources proches de l'enquête, les images d'une caméra de surveillance installée par les autorités au domicile de Carlos Ghosn montrent l'ancien patron de Nissan et Renault quitter seul sa résidence aux alentours de midi ce même dimanche mais aucune image ne le montre revenir.

On ignore comment Carlos Ghosn, qui possède des passeports français, brésilien et libanais, a organisé sa fuite. Il est entré légalement au Liban à l'aide d'un passeport français, a dit une source à Reuters.

"J'AI ÉTÉ TRAHI", DIT UN AVOCAT

MNG Jet, entreprise turque de location de jets privés, a déclaré vendredi que Carlos Ghosn avait illégalement utilisé deux de ses avions pour se rendre du Japon au Liban, notamment grâce à l'aide d'un employé ayant falsifié des documents pour ne pas faire apparaître le nom de l'ancien patron de Nissan sur la liste des passagers.

Ces deux avions, dont l'un a volé d'Osaka à Istanbul et l'autre d'Istanbul à Beyrouth, ont été loués à deux clients différents pour des missions qui "ne semblaient pas liées l'une à l'autre", a dit MNG Jet.

Carlos Ghosn dément les accusations de malversations financières portées contre lui au Japon. Il a dit qu'il s'exprimerait publiquement mercredi prochain.

L'un de ses avocats au Japon, Takashi Takano, a écrit samedi sur son blog avoir ressenti un mélange de colère et de sentiment de trahison en apprenant la fuite de Carlos Ghosn. Il dit aussi pouvoir en partie comprendre un tel geste.

"J'ai été trahi. Mais ce n'est pas Carlos Ghosn qui m'a trahi", écrit Takashi Takano.

D'après cet avocat, Carlos Ghosn n'avait pas le droit de parler avec sa femme Carole sans autorisation et il craignait aussi de ne pouvoir bénéficier d'un procès équitable.

Le 24 décembre, Carlos Ghosn et sa femme ont pu s'entretenir en présence d'un avocat via une liaison vidéo et ils ont discuté de leurs enfants, de leurs proches et de leurs amis, rapporte Takashi Takano, présent durant cet appel.

Peu de personnes auraient pu s'enfuir comme l'a fait Carlos Ghosn mais si elles disposent des moyens et des contacts nécessaires, il est certainement tentant de l'envisager, poursuit l'avocat. (Maki Shiraki et Norihiko Shirouzu version française Bertrand Boucey)

Valeurs citées dans l'article : Nissan Motor Co., Ltd., Renault