Carlos Ghosn, arrêté fin novembre en raison d'accusations de malversations financières, a été inculpé lundi au Japon pour avoir minoré de près de moitié entre 2010 et 2015 ses revenus chez Nissan, dont il était alors président.

Le groupe au losange avait ouvert sa propre enquête interne, confiée à la direction de l'éthique et de la conformité. Celle-ci a "conclu, de manière préliminaire, à la conformité des éléments de rémunération du PDG de Renault et des conditions de leur approbation au regard des dispositions légales et des recommandations de l'Afep-Medef."

Le conseil d'administration a également annoncé avoir pris connaissance de certains éléments de l'enquête de Nissan qui a conduit à l'arrestation surprise de Carlos Ghosn.

Le dossier ne leur a pas été transmis directement, mais a fait l'objet d'une "restitution" par les avocats de Renault d'une présentation qui leur a été faite par les avocats de Nissan.

Selon des sources proches du dossier, Nissan avait proposé au directeur général adjoint de Renault, Thierry Bolloré, ainsi qu'à certains membres du conseil d'administration du groupe français, d'examiner directement le contenu de son enquête.

Mais Thierry Bolloré avait enjoint les juristes du partenaire japonais de Renault de ne pas contacter les administrateurs.

Reflet des particularités juridiques de la procédure japonaise, cette nouvelle péripétie avait également illustré les tensions qui couvent entre les deux grands partenaires de l'alliance franco-nippone, qui doit fêter l'an prochain ses 20 ans, et ce malgré les assurances officielles que chaque camp est attaché plus que jamais à la préservation du partenariat.

Le conseil d'administration, qui dit ne pas disposer à ce stade d'informations portant sur les éléments de défense de Carlos Ghosn, a demandé jeudi aux avocats de Renault de poursuivre leur analyse des informations qui leur ont été fournies, en lien avec les avocats de Nissan, "et de leur faire rapidement un nouveau point sur la situation".

Pour l'heure, le conseil a décidé de maintenir en l'état la gouvernance décidée le 20 novembre dernier, au lendemain de l'arrestation de son PDG.

Contrairement à Nissan et Mitsubishi, troisième partenaire de l'alliance, qui ont tous deux démis Carlos Ghosn de son poste de président, Renault a choisi de maintenir Carlos Ghosn dans ses fonctions, estimant ne pas disposer de suffisamment d'éléments sur l'affaire.

Le groupe avait opté à la place pour une direction intérimaire partagée entre Philippe Lagayette, président du conseil d'administration, et Thierry Bolloré, directeur général adjoint promu aux mêmes fonctions exécutives que Carlos Ghosn.

(Edité par Jean-Michel Bélot)

par Gilles Guillaume et Laurence Frost