Au cours de la conférence de presse qui a eu lieu ce lundi, Patrick Drahi s'est efforcé de convaincre les marchés et l'opinion publique du bien fondé d'un rapprochement entre Numericable (-0,37% à 29,39 euros) et SFR. Le fondateur et dirigeant d'Altice, maison-mère de Numericable dont elle possède 40% du capital, a affirmé ne pas douter de l'issue positive des négociations exclusives entamées vendredi entre son groupe et Vivendi. L'homme d'affaires a parlé d'un contrat "ficelé" et a ajouté que "l'argent est sur la table".

Vivendi a annoncé vendredi préférer l'offre d'Altice à celle de Bouygues pour la reprise de son opérateur de télécommunications SFR, considérant que son offre était "la plus pertinente pour les actionnaires et les salariés du Groupe et qu'elle offre la meilleure sécurité d'exécution". Altice a offert 11,75 milliards d'euros en numéraire et 32% du capital de la nouvelle entité cotée. Bouygues proposait de son côté 11,3 milliards d'euros en numéraire et 43% du capital du nouvel ensemble.

Si Patrick Drahi n'a pas encore détaillé la constitution de l'équipe dirigeante de la future entité, il vise un taux de marge de 40% et une croissance de son chiffre d'affaires comprise entre 2 et 5% dans les années à venir. A terme, l'activité de Numericable-SFR dans les télécommunications fixes devrait atteindre 45% du marché français, contre 25% actuellement.

"Nous allons créer ici un champion national, un champion européen en associant deux entreprises magnifiques aux parcours différents, mais très complémentaires", a ajouté le dirigeant, évoquant toujours des synergies de l'ordre de 10 milliards d'euros, au rythme d'un milliard par an, et envisageant même des embauches dans le secteur.

Si Vivendi s'est donné trois semaines de discussions exclusives avec Altice pour trouver un accord définitif, certains obstacles pourraient compliquer la conclusion de l'opération. L'autorité de la concurrence et l'ARCEP (autorité de régulation du secteur des télécommunications) auront leur mot à dire et seront en mesure d'exiger des contreparties (cessions d'actifs) de la part d'Altice si elles jugeaient le nouvel ensemble trop influent sur le secteur.

De même, la pression du gouvernement français s'est intensifiée ce week-end. Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, qui soutenait l'offre de Bouygues, a laissé entendre vendredi soir que la conclusion d'un accord n'était pas aussi proche que peut aujourd'hui le laisser penser Patrick Drahi. De son côté, la ministre déléguée à l'Economie numérique Fleur Pellerin a estimé dimanche qu'il serait bienvenu que le patron d'Altice abandonne sa domiciliation fiscale en Suisse pour venir payer ses impôts en France.

En revanche, les analystes estiment aujourd'hui qu'une fusion entre SFR et Numericable est préférable à un rapprochement avec Bouygues. Exane BNP Paribas et Oddo considèrent en outre que le revers essuyé par Martin Bouygues pourrait le pousser à vendre Bouygues Telecom à Iliad avant que ce dernier ait parachevé son propre réseau d'antennes de téléphonie mobile.

(E.B)

Valeurs citées dans l'article : NUMERICABLE, ILIAD, VIVENDI, BOUYGUES