* L'arrêt d'une raffinerie de Total bloque le plan d'évacuation

* Les exportations de Droujba suspendues depuis quatre semaines

par Dmitry Zhdannikov, Olga Yagova et Gleb Gorodyankin

LONDRES, 21 mai (Reuters) - La perspective d'une reprise rapide des exportations de pétrole russe vers la Pologne et l'Allemagne via l'oléoduc Droujba s'éloigne en raison des problèmes techniques rencontrés la semaine dernière dans une raffinerie de Total chargée de participer au traitement du brut contaminé contenu dans cette installation, a appris Reuters de trois sources dans le secteur du négoce.

Moscou a interrompu en avril ses livraisons de brut en direction de l'Europe de l'Est et de l'Allemagne après la découverte de niveaux élevés de produits chlorés, perturbant l'approvisionnement des raffineries européennes.

Selon un plan qui n'avait pas encore été dévoilé, Total devait récupérer et traiter dans sa raffinerie de Leuna, en Allemagne, la majeure partie du pétrole contaminé passé par cet oléoduc, ont indiqué des sources.

Ce plan était censé permettre la reprise des expéditions de pétrole non contaminé via l'oléoduc après la plus importante panne depuis sa mise en service.

La semaine dernière, le groupe pétrolier français a annoncé la suspension de l'activité de certaines unités de la raffinerie de Leuna afin de procéder à des contrôles techniques au vu de la situation créée par la contamination de livraisons de pétrole russe.

Mardi, Total a indiqué que la raffinerie de Leuna reprenait progressivement ses activités mais que sa capacité resterait limitée en raison des problèmes persistants sur l'oléoduc Droujba.

D'après des sources, la raffinerie de Leuna a été victime d'une panne importante probablement liée au traitement du pétrole pollué.

HUIT À NEUF MILLIONS DE BARILS BLOQUÉS DANS L'OLÉODUC

L'arrêt de certaines unités sur ce site, qui selon les sources pourrait durer encore au moins une semaine, a bloqué le projet d'évacuation du brut contaminé. Environ huit à neuf millions de barils de pétrole pollué, dont la valeur se situerait entre 560 et 630 millions de dollars dans des circonstances normales, se trouvent toujours dans l'oléoduc.

"Le projet s'est écroulé. Il faut que quelqu'un propose un plan 'B'", dit une source du secteur au fait de la situation. "Pour le moment, il n'existe pas de plan B. On est dans l'impasse."

Total n'a pas souhaité s'exprimer sur ce point. La société Transneft, qui a le monopole sur les oléoducs en Russie, et les principaux producteurs de pétrole du pays, comme Rosneft et Surgut, n'ont pas répondu à une demande de commentaires.

La crise du pétrole contaminé a engendré la plus grande panne d'approvisionnement que la Russie, premier exportateur mondial de pétrole, ait jamais connue.

La crise s'est aggravée depuis que la Biélorussie a informé les raffineurs et les exploitants d'oléoducs en Europe il y a près de quatre semaines que le pétrole brut transitant par les 5.500 km du réseau Droujba était fortement contaminé par du chlorure organique.

Ce produit, souvent utilisé pour nettoyer les puits et accélérer la production du brut, doit ensuite être séparé du pétrole avant son expédition car il peut endommager les équipements de raffinage.

Les exportations via l'oléoduc ont été stoppées, ce qui a contribuer à faire grimper le cours du Brent de la mer du Nord à 75 dollars le baril, un plus haut de six mois.

La Russie s'est engagée à plusieurs reprises à rétablir d'"ici quelques jours" les exportations de pétrole non contaminé vers la Biélorussie, la Pologne et l'Allemagne.

Elle n'y est toujours pas parvenue et même lorsque ce sera le cas, la crise ne sera pas terminée, estiment des traders.

Des responsables russes devraient rencontrer cette semaine les dirigeants des groupes européens d'oléoducs et des acheteurs de pétrole européens pour évoquer la question. (Avec Olesya Astakhova, Alexander Ershov, Maxim Nazarov, Katya Golubkova, Felix Bate, Anna Koper Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Bertrand Boucey)