La publication semestrielle de l’équipementier automobile, dont la famille Burelle détient maintenant plus de 50% des intérêts, a rassuré les investisseurs et fait bondir le titre de 10% vendredi. La croissance organique, à 0,2%, est remarquable dans un marché mondial en baisse de 6,9%. Surtout, les marges et la génération de cash se sont révélées solides et devraient le rester, le management s’étant préparé depuis près d’un an à un contexte durablement plus compliqué. Entretien.

Jean-Michel Szczerba, comment expliquez-vous les gains de parts de marché continus de Plastic Omnium ?
"Le repositionnement du groupe en 2018 est venu compléter nos investissements industriels, technologiques et commerciaux de ces dernières années. Après avoir cédé le 18 décembre 2018 la Division Environnement qui représentait un secteur d’activité distinct, le Groupe organise ses activités autour de deux secteurs opérationnels. Plastic Omnium Industrie d’abord, à travers notre activité dédiée aux systèmes complexes et intelligents de carrosserie d’une part, et notre activité dédiée aux systèmes de stockage d’énergie et de dépollution des véhicules d’autre part. Les modules ensuite, depuis la prise de contrôle, mi-2018, de l’allemand HBPO : il s’agit là d’une activité d’ingénierie et d’assemblage de modules bloc avant. Cette intégration est un succès, avec un chiffre d’affaires à +4,5% au premier semestre. Nos deux pôles bénéficient d’un dispositif industriel mondial complet, au plus près des constructeurs, avec 128 usines dont 6 ouvertes au 1er semestre 2019. Nous superformons nos marchés sur tous les continents, et en particulier en Chine où nos ventes reculent de seulement 0,9% sur un marché en repli de 14,4%."
 

Une base de clients très diversifiée et en croissance (Source présentation juillet 2019 - Cliquer pour agrandir)

Y a-t-il un cycle mondial du marché automobile ? Quelle croissance attendez-vous dans les années à venir ?
"Hors périodes particulières comme la crise financière de 2009, ou encore cette année 2019 où la guerre commerciale et les bouleversements technologiques propres à l’industrie automobile sont sources d’incertitudes fortes, chaque marché est relativement autonome. Actuellement, la décroissance est particulièrement concentrée sur la Chine, qui représente 30% du marché mondial. Chez Plastic Omnium, nous avions rapidement anticipé le retournement du marché, et tablons aujourd’hui sur un marché stable en 2020 et 2021. Le nombre record de lancements de nouveaux programmes de production, 243, en particulier en Chine, qui ne représente que 8% de notre CA mais 40% de nos programmes lancés en 2019, doit nous permettre de surperformer de 5 points le marché mondial dans les deux prochaines années. Nos usines, dont le nombre n’évoluera pas d’ici 2021, sauront suivre la montée en charge de nos très nombreux clients constructeurs, où qu’elle se produise. Nos investissements seront limités à 6% de nos ventes, ce qui nous permettra, combiné à un plan de réduction de coûts de 100 M€ qui portera ses fruits jusque début 2020, de dégager un free-cash-flow annuel de 200 M€."

200 M€ de flux de trésorerie libre annuel, cela représente 6 à 7% de la capitalisation boursière. Comptez-vous modifier la structure financière du groupe ?
"Compte tenu de la situation de marché, la génération de cash est notre priorité. D’où les réductions des coûts et des investissements enclenchées en septembre 2018. Nous ne souhaitons pas modifier la structure financière. Nous continuerons de racheter des actions sur le marché, mais pas davantage. La croissance et la technologie constituent les piliers stratégiques du groupe. Les mutations technologiques en cours nous amènent à investir massivement dans la R&D, avec de nouveaux centres ouverts cette année. Ces centres travaillent sur la voiture de demain et d’après-demain : les futurs modes de propulsion, notamment l’hydrogène, la carrosserie intelligente à base de nanotechnologie, etc."

Les équipementiers automobiles ont connu une hausse de leur profitabilité opérationnelle ces dix dernières années. Est-ce un plutôt un acquis structurel ou un concours de circonstances conjoncturelles ?
"Les équipementiers automobiles ont capté de la valeur en se concentrant, en se mondialisant, et en intégrant de plus en plus de technologie. Ils sont aujourd’hui mieux diversifiés que par le passé et apportent des solutions plus complètes à leurs clients. La pression sur les prix de la part des constructeurs est toujours là, mais la relation s’est élargie à la différenciation des produits et à l’innovation. Le Plastic Omnium n’a aujourd’hui rien à voir avec Plastic Omnium d’hier. La globalisation de notre tissu industriel, l’effet d’échelle, la diversification de la clientèle, et la technologie intégrée dans nos produits constituent de fortes barrières à l’entrée."
 

Le Top 10 des clients au 1er semestre (Source présentation juillet 2019 - Cliquer pour agrandir)
 
Quels risques, et quelles opportunités à moyen-long terme pour Plastic Omnium, représentent les bouleversements en cours côté constructeurs, notamment en matière de motorisation ?
"Notre maîtrise du plastique constitue un atout majeur puisqu’à la différence des métaux, il s’agit d’un matériau léger et transparent aux ondes des radars et des capteurs. En cela, nos développements dans la carrosserie intelligente sont très prometteurs. S’agissant des nouvelles motorisations, les années 2020-2030 devraient faire la part belle aux véhicules hybrides, ce qui sera très favorable à notre positionnement sur les réservoirs hybrides. A horizon 2030, nous faisons le pari que le succès des voitures électriques passera par la pile à combustible qui transforme l’hydrogène en électricité. Nous sommes à la fois positionnés sur la technologie au cœur de ces piles à combustible, et sur les réservoirs à hydrogène. Les bouleversements technologiques en cours dans l’industrie automobile sont un atout pour la poursuite de notre développement."