ROME, 24 avril (Reuters) - L'Italie n'atteindra pas cette année son objectif de recettes de privatisation, reconnaît-on au sein de la coalition gouvernementale, et Rome prévoit désormais de recourir à des cessions immobilières pour lever plusieurs milliards d'euros et tenter de réduire la dette publique.

Le gouvernement a présenté fin 2018 un programme de privatisations de 18 milliards d'euros mais cinq mois après, aucun actif n'a été vendu et aucun projet concret n'a été lancé, les deux partis au pouvoir, la Ligue et le Mouvement 5 Etoiles (M5S), privilégiant les promesses de baisses d'impôts, au risque de faire encore monter la dette, qui représente 132,2% du produit intérieur brut (PIB).

Une source au sein de la coalition a déclaré que le gouvernement avait revu à la baisse ses ambitions et prévoyait désormais de lever "jusqu'à cinq milliards d'euros" cette année en vendant des actifs immobiliers gérés pour l'instant par des organismes publics comme la holding CDP.

Mais de nombreux analystes se disent sceptiques sur ce nouvel objectif.

"Les privatisations immobilières ne marcheront pas", estime Luca Paolazzi, économiste du cercle de réflexion milanais REF, en expliquant que la majeure partie des actifs immobiliers susceptibles d'être vendus sont contrôlés par des collectivités locales, qui sont peu enclines à s'en séparer, et que le poids de la réglementation italienne en matière de propriété immobilière dissuade bon nombre d'investisseurs.

"CHIMÈRE"

Claudio Borghi, le porte-parole de la Ligue pour les questions économiques, a déclaré il y a quelques jours que presque tous les biens immobiliers intéressants avaient déjà été vendus par les gouvernements précédents et il a qualifié de "chimère" l'idée selon laquelle de telles cessions pourraient remplir les caisses de l'Etat.

Le Trésorier de son parti, Giulio Centemero, se dit pourtant plus confiant: il a déclaré à Reuters que le projet de cessions immobilières était réaliste et qu'il devait être perçu comme un "signe de bonne volonté" à l'adresse des marchés.

"Nous voulons montrer que nous sommes responsables et conscients de la nécessité de réduire la dette publique", a-t-il dit.

La solution la plus rapide pour faire baisser la dette de l'Etat consisterait à vendre des participations dans des groupes publics comme la compagnie pétrolière Eni ou le producteur d'électricité Enel mais elle est exclue par le M5S, qui les considère comme des actifs stratégiques.

Poste Italiane, introduit en Bourse en 2015 à hauteur de 35% du capital et dont la valeur a augmenté de plus de 40% depuis, est un autre candidat potentiel à la privatisation.

Mais une offre publique est difficilement envisageable et la seule option viable serait une cession de gré à gré à des investisseurs institutionnels, ce qui rapporterait sans doute moins d'un milliard d'euros.

(Angelo Amante et Gavin Jones; Marc Angrand pour le service français)

Valeurs citées dans l'article : Enel, Eni, Poste Italiane