Dans un contexte de baisse des ventes de logements neufs en France, le promoteur nantais Réalités confirme son développement très solide. Le revers essuyé sur le très audacieux projet YelloPark autour du stade de football de la Beaujoire ne freine pas les ardeurs de son PDG, Yoann Joubert. Bien au contraire. Entretien. 

Yoann Joubert, dans un marché de l’immobilier de logement neuf qui s’est tassé en 2018, comment s’est comporté Réalités ?
 
"La baisse du marché est liée à la baisse de la production, pas à une crise de la demande comme ce fut le cas lors des précédentes crises. Il n’y a pas moins de promoteurs, mais de moins en moins de maires qui acceptent de développer leur ville. Chez Réalités, notre offre et notre production s’étoffent d’années en années. Notre chiffre d’affaires 2018 est ressorti en légère hausse, à 134 M€, après une hausse de 56% en 2016. Nos réservations nettes, en hausse de 44% à 203 M€, témoignent de la poursuite de notre dynamique de croissance et nous amènent à viser un CA IFRS autour de 160 M€ en 2019 et autour de 200 M€ en 2020. En termes de profitabilité, nous avons revu en hausse notre prévision d’Ebitda 2018, qui sera supérieur à 12 M€, malgré l’impact de l’arrêt du projet YelloPark. Nos comptes annuels seront publiés le 21 mars prochain. L’abandon de YelloPark est certes douloureux, financièrement puisqu’il a occasionné une perte de l’ordre de 5 M€, et humainement compte tenu des efforts déployés par les équipes. Mais ce projet nous a poussé à mettre en place une structure opérationnelle pour réussir d’autres projets de grande envergure. Et nous a apporté une notoriété d’une ampleur nouvelle".
 

Aster, un programme de bureaux et de commerces à Montigny-le-Bretonneux
 
Quelle est votre ambition à long terme ?
 
"2020 ne sera qu’une étape. Sur la seule année 2018, nous avons développé 580 M€ de potentiel foncier, soit une croissance de 250%. En approchant dans les années à venir ce niveau de développement foncier annuel, nous devrions logiquement atteindre 500 M€ de CA à horizon 2025. Cela implique de répondre de façon adaptée aux gisements de développement énormes que constituent les 222 villes secondaires qui ne sont pas des métropoles. Cela passe par une vision globale de l’urbanisme, par l’investissement dans l’usage, et par un positionnement multi-ouvrages. La taille de ce type de projets globaux peut être très importante. Nous avons par exemple récemment gagné un projet de 135 M€ dans une grande ville de l’ouest. Cette montée en puissance en termes de tailles de projets implique un renforcement de nos équipes, qui doivent s’étoffer, passant d’un peu plus de 200 personnes aujourd’hui à près 300 à fin 2019, et par un effort capitalistique significatif. Sur ce dernier point, nos sources de financement se sont diversifiées et notre coût de financement se réduit petit à petit".
 
Comment expliquez-vous cette croissance de Réalités par-delà les cycles du marché du logement neuf ?
 
"Nous sommes passés en quelques années de promoteur régional à acteur du développement des territoires. Notre diversification nous a ouvert des marchés si importants que leur dynamique propre a peu d’incidence sur notre développement. Partis du logement, nous nous sommes développés sur le tertiaire, le commerce, les locaux d’activité, les résidences de service, les maisons médicales ou encore les infrastructures sportives. A cette polyvalence en tant que maître d’ouvrage nous avons ajouté la maîtrise d’usage, puisqu’aujourd’hui nous opérons nous même des résidences seniors à travers notre filiale Heurus, qui a déjà les financements pour atteindre une vingtaine d’établissements à horizon 2023.
 

L'Hôtel Lincoln, à Casablanca, le premier projet international du groupe (reconstruction)

Enfin, nous avons agrandi notre terrain de jeu, en élargissant notre présence en France et en allant même à l’international à partir du Maroc. Ces diversifications ont été rendues possibles par l’accès à des financements internationaux et à une culture d’entreprise peu commune en France : une certaine liberté de penser, de croire que c’est possible, une bienveillance qui offre le droit à l’erreur pour repartir de l’avant. Nous sommes aujourd’hui beaucoup mieux structurés en termes de gouvernance qu’il y a quelques années".

Yoann Joubert, en bref.
 
Titulaire d'un DEA de sciences politiques obtenu à Rennes, il commence sa carrière comme consultant chez PwC. Fondateur au côté de Christophe de Brébisson de la société BIRD Consulting en 2002, il crée en décembre 2003 le groupe Réalités et met en œuvre la stratégie de développement des activités de promotion immobilière sur l'ensemble des territoires. Il est PDG de Réalités et de DOGE Invest, holding animatrice de Réalités, société dont il détient 62,5% du capital. Yoann Joubert, 44 ans, vit à Nantes où il est également père d’une famille nombreuse qui vient de s’agrandir d’une petite fille.


L'auteur est actionnaire à titre personnel.