(Actualisation: commentaire d'analyste, réaction de Renault, précisions de Bercy, réaction en Bourse)

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Renault chute en Bourse jeudi, après que Fiat Chrysler Automobiles a retiré sa proposition de fusion avec le groupe français, estimant que les conditions politiques n'étaient pas réunies pour permettre une telle opération.

Vers 13h30, le titre du constructeur français chutait de 6,3% à 52,68 euros à la Bourse de Paris tandis qu'à Milan, Fiat Chrysler gagnait 0,3% à 11,73 euros.

"Ce 'no deal' reste une déception pour les actionnaires alors qu'il y avait la possibilité de créer un véritable groupe de taille mondial", juge un analyste. "Lorsque les gouvernements s'invitent dans le débat, le résultat est rarement positif pour les actionnaires, voire pour la performance fondamentale à long terme ", renchérissent les analystes d'Evercore ISI. "Même si le retrait de FCA ne signifie pas nécessairement qu'une fusion n'est plus du tout sur la table, la probabilité qu'elle se produise a considérablement diminué ", ajoutent-ils. Pour Royal Bank of Canada, le retrait de FCA "souligne la difficulté d'obtenir l'adhésion du gouvernement français à un tel accord, ce qui est décevant".

Le Wall Street Journal, citant des sources proches du dossier, avait précédemment rapporté que Fiat Chrysler Automobiles avait retiré son projet en raison du refus de Nissan, le partenaire du constructeur automobile français, de soutenir l'opération.

Le groupe italo-américain a ensuite confirmé dans un communiqué que son conseil d'administration avait décidé de retirer avec effet immédiat son projet de fusion avec Renault. Fiat Chrysler a indiqué demeurer "fermement" convaincu des bénéfices de l'opération. "Toutefois, il est apparu clairement que les conditions politiques en France n'existent pas actuellement pour qu'une telle combinaison puisse être menée à bien", a ajoutéle groupe.

Dans un communiqué publié à la mi-journée, Renault a pour sa part exprimé "sa déception de ne pouvoir approfondir la proposition de FCA". "Nous considérons que cette proposition est opportune, ayant beaucoup de mérite industriel et d'attractivité financière, créant un leader mondial de l'automobile, basé en Europe. De plus, cette offre souligne l'attractivité de Renault et de l'Alliance", a souligné le groupe français. Avant cela, Renault avait indiqué que son conseil d'administration n'avait pas été en mesure de prendre une décision mercredi soir sur le projet de fusion présenté par Fiat Chrysler, "en raison du souhait exprimé par les représentants de l'Etat français de reporter le vote à un conseil ultérieur".

Gérald Darmanin souhaite garder la porte ouverte

Le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a affirmé jeudi matin dans un communiqué "prendre acte" de la décision de Fiat Chrysler. Le ministère de l'Economie a expliqué que si des accords avaient été trouvés sur plusieurs points, il restait à "obtenir un soutien explicite de Nissan". "L'Etat a donc souhaité que le conseil d'administration dispose d'un délai additionnel de cinq jours pour s'assurer du soutien de l'ensemble des parties prenantes", a poursuivi le ministère de l'Economie.

Le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a pour sa part estimé sur France Info que les discussions pourraient "reprendre, peut-être, dans les prochains temps" et qu'il ne fallait pas "fermer la porte".

L'Etat français a affirmé mercredi, lors du conseil d'administration de Renault, que la plus importante condition pour qu'il approuve cette fusion était qu'elle s'inscrive dans le cadre de l'alliance entre Renault et Nissan, ont indiqué des sources proches du dossier.

Les deux représentants de Nissan au conseil d'administration de Renault ont fait part de leur intention de s'abstenir, ont indiqué ces sources, soulevant des doutes sur l'engagement de Nissan à préserver l'Alliance si la fusion était menée à bien, ont indiqué ces sources.

"Nous ne pouvions nous contenter d'une abstention qui n'exprime aucune position", a fait valoir Bercy.

Incompréhension du gouvernement face à la décision de FCA

Le report du vote demandé par l'Etat français a incité Fiat Chrysler à retirer sa proposition, ont poursuivi ces personnes.

"Il est difficile de comprendre pourquoi FCA a décidé de se rétracter maintenant de manière si précipitée", a déclaré une source gouvernementale à l'agence Agefi-Dow Jones. "Depuis le début, FCA a mis une pression énorme sur le 'timing' et a essayé de nous pousser à prendre ou à laisser", a poursuivi cette source.

"Il n'y a aucune précipitation dans notre décision, elle est claire et ferme", a fait valoir auprès de l'agence Agefi-Dow Jones une source proche de FCA. "Toutes les conditions étaient réunies hier [mercredi] pour aboutir à un vote positif du conseil d'administration de Renault. Ce sont les nouvelles exigences du gouvernement français et la position soudaine et incompréhensible de Bercy qui ont conduit à cette situation dommageable pour toutes les parties", a-t-elle poursuivi.

Renault détient 43,4% de Nissan, qui possède de son côté 15% du groupe français. Selon des sources proches des discussions en cours, Nissan n'a pas été associé aux négociations avec Fiat Chrysler. Lundi, le patron du groupe japonais, Hiroto Saikawa, avait affirmé qu'une telle opération modifierait considérablement la structure de Renault et "nécessiterait un examen en profondeur de la relation existante" entre les deux groupes.

Selon Bercy, la valorisation de Renaut dans la proposition de FCA n'était en revanche "plus un problème" car le groupe italo-américain avait soumis des "améliorations" sur ce point.

Bercy a par ailleurs fait savoir que l'Etat français renouvelait sa confiance dans la gouvernance de Renault, alors que le constructeur automobile tiendra son assemblée générale annuelle le 12 juin.

-Nick Kostov, Stacy Meichtry, The Wall Street Journal, et Julien Marion, Agefi-DowJones; jmarion@agefi.fr ed: VLV

(Thomas Varela a contribué à cet article)

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