Madrid (awp/afp) - Le chômage a de nouveau nettement reculé en Espagne en 2017, aidé par des records dans le tourisme et peu affecté par la crise en Catalogne, mais précarité et bas salaires restent de gros point noirs.

"L'année 2017 est la quatrième année de création d'emploi" depuis la crise, s'est félicité le ministère de l'Economie dans un communiqué, assurant que la richesse créée par "la croissance économique se traduit par la création de nouveaux postes de travail".

Certes, le taux de chômage a légèrement rebondi au quatrième trimestre, à 16,5% contre 16,4% au trimestre précédent, en raison de pertes d'emploi dans les services.

Mais le chiffre à fin décembre reste conforme à l'objectif fixé par le gouvernement espagnol pour la fin 2017 (16,5%). Le chômage est donc en fort recul par rapport à son niveau de fin 2016, où il était encore de 18,6%.

Une nouvelle année exceptionnelle dans le tourisme explique en grande partie ces résultats. Dès le mois de juillet, il avait permis de faire redescendre le chômage sous son niveau de 2009. En 2013 au plus fort de la crise, il avait frôlé les 27%.

L'Espagne a accueilli l'an dernier 82 millions de touristes étrangers, battant son record pour la cinquième année consécutive. Elle devrait ainsi dépasser les Etats-Unis pour devenir la deuxième destination mondiale après la France.

Sur les 470.000 emplois créés en 2017, 290.000 l'ont été dans les services.

La Catalogne, où le gouvernement avait mis en garde contre les répercussions sur l'emploi de la crise indépendantiste, termine l'année avec un taux de chômage inférieur à celui de la région de Madrid, au poids économique équivalent (12,6% contre 13,7%).

Au dernier trimestre, période marquée par un ralentissement du tourisme en Catalogne dû à la crise exacerbée par le référendum d'autodétermination interdit du 1er octobre, le taux de chômage régional n'a finalement que légèrement augmenté (12,6% contre 12,5% au troisième trimestre). La hausse est plus marquée à Madrid: 13,7% contre 12,3% au troisième trimestre.

- Chômeurs sans indemnités -

Plus de 3,76 millions de personnes restent néanmoins au chômage en Espagne, qui est toujours le plus mauvais élève de la zone euro dans ce domaine après la Grèce.

"Comme les années précédentes, le chômage baisse mais la qualité de l'emploi reste à un niveau minimum. La création d'emploi est très précaire", a critiqué le secrétaire général du syndicat UGT Pepe Alvarez.

L'Espagne est le pays de la zone euro dans lequel la proportion de contrats à durée déterminée est la plus élevée, selon les dernières données d'Eurostat. Plus d'un emploi sur quatre y est temporaire (26,7%), en particulier dans le tourisme, et leur nombre a augmenté de 4,4% en un an, une situation régulièrement critiquée par les organismes internationaux, notamment le Fonds monétaire international (FMI).

"Il faut aller vers plus de qualité et protéger les personnes sans emploi car 1,5 million de travailleurs et travailleuses ne reçoivent aucune prestation chômage", a ajouté M. Alvarez.

"Une partie importante des chômeurs est dans cette situation depuis longtemps, avec comme risque d'épuiser leur droit aux prestations", explique une étude du syndicat Commissions ouvrières publiée en juin.

Or, environ 1,9 million d'Espagnols sont sans emploi depuis plus d'un an, soit pratiquement la moitié du nombre total de chômeurs.

En outre, la courte durée des contrats temporaires "débouche sur des durées de cotisation insuffisantes" pour toucher les indemnités chômage, souligne le texte.

Les syndicats, qui démarrent jeudi des négociations salariales avec le patronat, vont demander une hausse supplémentaire des salaires. Le gouvernement a annoncé fin décembre un relèvement du salaire minimum de 4% en 2018 pour le porter à 992 euros d'ici 2020.

Mais ce niveau reste très bas par rapport aux voisins européens. Le SMI brut est de 1.467 euros en France.

Selon Oxfam, les "travailleurs pauvres" représentent 13,7% de la population active en Espagne. L'ONG estime que la reprise économique -3,1% de croissance prévus en 2017- "a bénéficié quatre fois plus aux plus riches qu'aux plus pauvres, en termes de salaires".

afp/al