actualisé avec déclarations de Maduro et de Mélenchon et remise prévue de la loi d'amnistie à Caracas

CARACAS (awp/afp) - Le président vénézuélien Nicolas Maduro a rejeté l'ultimatum lancé par plusieurs pays européens lui donnant huit jours pour convoquer des élections, alors que son opposant Juan Guaido, qui s'est autoproclamé président, prévoit dimanche d'accentuer la pression.

"Ils devraient retirer cet ultimatum. Personne ne peut nous donner d'ultimatum", a déclaré M. Maduro dans un entretien à la chaîne CNN Turk diffusé dimanche, ajoutant que son pays n'est "pas lié" à l'Europe.

Madrid, Paris, Berlin, Londres, Bruxelles et Lisbonne ont exigé samedi la convocation d'élections sous huit jours au Venezuela, faute de quoi ces capitales reconnaîtront le chef du Parlement et président autoproclamé Juan Guaido comme chef de l'Etat.

Fort de ce soutien international, ce dernier devait annoncer dimanche la date de la prochaine manifestation, prévue d'ici quelques jours, après une semaine de mobilisation qui s'est soldée par la mort de 29 personnes et plus de 350 arrestations.

"Nous allons continuer jusqu'à parvenir à la fin de l'usurpation, à un gouvernement de transition et des élections libres", a assuré samedi l'opposant, âgé de 35 ans, lors d'un meeting.

Fissurer la loyauté de l'armée

Encouragé par la désertion samedi de l'attaché militaire de l'ambassade vénézuélienne à Washington, Guaido va demander à ses partisans de distribuer, via les réseaux sociaux ou en version imprimée, la loi d'amnistie promise aux fonctionnaires et militaires acceptant de le soutenir.

Des copies de cette loi, qui offre "toutes les garanties constitutionnelles" aux militaires et civils qui "collaborent à la restitution de la démocratie", seront remises dans la matinée au poste de commandement général de la Garde nationale, ainsi qu'aux postes de police.

L'objectif de Guaido? Fissurer la loyauté de l'armée, principal soutien de Nicolas Maduro depuis son arrivée au pouvoir en 2013.

Une première victoire en ce sens a été l'annonce samedi, par l'attaché militaire du Venezuela à Washington, le colonel José Luis Silva, qu'il ne reconnaît plus Nicolas Maduro comme président légitime. Dans une vidéo partagée sur Twitter, le colonel a appelé ses "frères militaires" à soutenir Juan Guaido.

Pour Rocio San Miguel, experte en questions militaires, Juan Guaido a certainement offert aux attachés militaires du Venezuela à l'étranger, en échange de leur ralliement, "l'opportunité de se maintenir à leur poste et de commencer à collaborer avec la transition" vers de nouvelles élections.

Pluie de soutiens

"Le monde est avec le Venezuela", a résumé sur Twitter le député d'opposition Julio Borges, en exil en Colombie.

Car samedi, des Etats-Unis et d'Europe, la pluie de soutiens à Juan Guaido n'a pas arrêté: à l'ONU, le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a demandé à tous les pays d'"être aux côtés des forces de liberté" et souhaité qu'ils mettent "fin à leurs transactions financières avec le régime de Nicolas Maduro".

Mais Caracas garde des soutiens à l'étranger, notamment la Russie, qui a exigé "la fin" d'"une ingérence cynique et non-dissimulée dans les affaires d'un Etat souverain".

De son côté se trouvent aussi la Chine, la Turquie, le Nicaragua et Cuba notamment.

Le chef de file de La France insoumise (gauche radicale), Jean-Luc Mélenchon, a dit dimanche, sur la chaîne France 3, souhaiter que Nicolas Maduro "tienne", jugeant "extraordinaire que le président français, qui ne veut pas dissoudre dans son pays alors qu'il a une manifestation toutes les semaines et qu'il a déjà mutilé 13 personnes, veuille une dissolution chez son voisin (sic) vénézuélien".

L'exécutif continue d'accuser Washington d'agir en coulisses de ce qu'il considère comme un coup d'Etat et le président Maduro a décrété la fin des relations diplomatiques avec les Etats-Unis.

Mais il veut garder un minimum de relations et négocie avec eux l'ouverture de "sections d'intérêts" dans chaque pays, a annoncé M. Maduro alors qu'expirait le délai de 72 heures qu'il avait donné au personnel de l'ambassade américaine pour quitter le Venezuela.

Parallèlement, Juan Guaido agit sur un autre front: il a demandé, dans une lettre au secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, une "réponse internationale à l'urgence humanitaire au Venezuela".

"La situation d'urgence dans notre pays fait des millions de victimes, qui souffrent de ne pas avoir accès à la santé, à la sécurité alimentaire, à l'éducation et à la sécurité, et en raison du haut niveau de violence chronique", écrit-il.

Le Venezuela, géant pétrolier, par ailleurs l'un des pays les plus violents au monde, est en plein naufrage économique, avec une inflation attendue par le FMI à 10.000.000% en 2019 et de constantes pénuries d'aliments et de médicaments.

bur-ka/sg