CARACAS (awp/afp) - Le gouvernement vénézuélien a dispersé samedi, à coups de gaz lacrymogènes, des manifestants de l'opposition qui tentaient de se réunir à Caracas pour protester contre les coupures électriques massives affectant le pays depuis début mars.

Les manifestants cherchaient à se rassembler dans plusieurs points de l'ouest de la capitale, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Le chef du Parlement, Juan Guaido, avait appelé ses partisans à manifester pour protester contre les pannes électriques géantes qui paralysent le pays. "Nous allons transformer l'indignation en mobilisation", a tweeté dans la matinée le chef de file de l'opposition, reconnu comme président par intérim par une cinquantaine de pays.

La capitale Caracas et 20 Etats sur 23 se sont retrouvés à nouveau plongés dans le noir vendredi soir et de nombreuses régions restaient sans courant samedi.

"Cela fait déjà 15h sans lumière, nous sommes piqués par les moustiques, les files d'attente pour obtenir de l'essence sont immenses et les rares supermarchés ouverts sont pris d'assaut", a expliqué à l'AFP Mariana Pirela, une habitante de Maracaibo, une grande ville du nord-ouest.

Cette nouvelle coupure, commes celles qui ont paralysé le pays du 7 au 14 mars, puis du 25 au 28 mars, prive à nouveau les habitants d'approvisionnement en eau, de transports publics, de téléphone et d'internet.

"J'ai l'impression de m'effondrer totalement", raconte Mariana Pirela, qui tente de trouver de l'essence à Maracaibo, où quelque 500 commerces avaient été pillés lors de la grande coupure de début mars.

Le président Nicolas Maduro, qui accuse l'opposition d'orchestrer des "attaques" contre la principale centrale électrique du pays avec le soutien des Etats-Unis, a également appelé à une "grande mobilisation" pour "dire non au terrorisme impérial".

Les pannes de courant sont habituelles au Venezuela depuis une décennie, mais la capitale avait été jusque-là relativement épargnée par des coupures massives. L'opposition et des experts du secteur estiment qu'elles sont dues au manque d'investissement dans les infrastructures.

"Blocus impérial"

Alors que l'aide humanitaire est au centre du bras de fer que se livrent Juan Guaido et Nicolas Maduro, dans un pays frappé par de graves pénuries de toutes sortes, la Croix-Rouge a annoncé vendredi une distribution d'aide d'urgence dans "15 jours" à destination de 650.000 personnes.

Cette annonce marque un virage dans la position du chef de l'Etat, qui avait jusque-là nié toute "crise humanitaire" dans le pays pétrolier et rejette la responsabilité des pénuries sur les sanctions financières imposées par Washington.

Des antibiotiques, des kits chirurgicaux, ainsi qu'une assistance matérielle pour les hôpitaux, telle que des groupes électrogènes pour faire face aux coupures de courant, seront distribués, a détaillé vendredi Francesco Rocca, le président de la Fédération internationale de la Croix-Rouge.

Il a souligné que son organisation agirait en accord avec ses propres principes "d'impartialité, de neutralité et d'indépendance", "sans accepter les interférences de personne".

Selon l'ONU, près d'un quart des 30 millions de Vénézuéliens nécessite une aide "urgente".

Le 23 février, les adversaires de Nicolas Maduro avaient essayé de faire entrer au Venezuela de l'aide humanitaire, envoyée essentiellement des Etats-Unis à la demande de Juan Guaido. Mais les camions chargés de ces produits de première nécessité ont finalement dû rebrousser chemin face au blocage frontalier ordonné par le gouvernement qui y voyait un prélude à une intervention militaire.

La situation à la frontière a dégénéré et des affrontements ont fait sept morts et plusieurs centaines de blessés.

"Le régime reconnaît son échec en acceptant l'existence d'une situation d'urgence humanitaire complexe qu'il a provoquée", a réagi Juan Guaido. "C'est le résultat de la pression" exercée sur le gouvernement, s'est-il félicité.

Les Etats-Unis ont immédiatement "salué" l'annonce de la Croix-Rouge et se sont dit prêts à envoyer de l'assistance par le biais de l'organisation internationale.

Parallèlement, un avion en provenance de Chine avec 65 tonnes de médicaments et de matériel médical est arrivé vendredi à Caracas. "Le Venezuela continue de vaincre le blocus impérial", a réagi Nicolas Maduro sur Twitter.

La Chine fait partie des alliés du pouvoir chaviste, avec la Russie qui a envoyé une mission militaire à Caracas. Une "provocation" selon Washington.

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