Paris (awp/afp) - Ciblé par des accusations de harcèlement et d'agressions sexuelles en son sein, Ubisoft, principal éditeur de jeux vidéo français et l'un des grands noms mondiaux du secteur, est au départ une histoire de famille.

Plus précisément, une histoire de fratrie, celle des cinq frères Guillemot, issus d'une famille de revendeurs de machines agricoles à Carantoir, dans le département du Morbihan. Ils lancent en 1986 une entreprise revendant des jeux vidéo importés, laquelle devient rapidement un studio indépendant de création.

En quasiment 35 ans, la petite entreprise est devenue l'un des principaux studios indépendants mondiaux et le fer de lance de la production vidéoludique en France, avec un chiffre d'affaires sur son exercice 2019-2020 de 1,6 milliard d'euros (1,7 milliard de francs suisses).

Une ascension permise notamment par la création et l'exploitation de franchises largement identifiées par le grand public: "Rayman", "Les Lapins Crétins", "Assassin's Creed","Far Cry", "Just Dance", "Rainbow Six" ou "Prince of Persia".

Pour s'affranchir un peu du caractère très cyclique des revenus tirés des jeux, Ubisoft s'est lancé ces dernières années dans une stratégie de diversification, passant par la déclinaison de certains de ses jeux en films et séries ou même l'annonce, en 2015, d'un parc d'attraction en Asie, dont l'ouverture était prévue pour 2020.

En 2015, le groupe voit débouler un nouvel actionnaire: Vivendi, qui monte jusqu'à 25% du capital un an plus tard, avec la volonté de plus en plus affirmée de prendre le contrôle de l'éditeur.

Mais face à la résistance de la famille Guillemot, Vivendi finira par vendre une partie de sa participation en mars 2018 au chinois Tencent et au fonds de pension Ontario Teachers, avant de céder le reliquat un an plus tard.

Sans qu'Ubisoft ne retrouve vraiment le calme: l'exercice 2019-2020 s'est avéré compliqué, avec un retard annoncé pour plusieurs titres phares, une perte nette de 126 millions d'euros et une baisse de 14% du chiffre d'affaires.

Et désormais, des accusations de harcèlement sexuel viennent ébranler un groupe qui se voulait inclusif: il rappelait ainsi régulièrement compter dans ses rangs une proportion de femmes (22%) largement supérieure à la moyenne du secteur en France (14%).

Les récentes accusations ont poussé au départ le numéro deux du groupe, Serge Hascoët, à la tête de la création chez Ubisoft depuis 20 ans, ainsi que la directrice des ressources humaines et le patron des studios canadiens.

Le groupe, qui compte 18.000 employés dans le monde, promet désormais de modifier profondément sa culture d'entreprise afin d'offrir "un environnement de travail sûr", selon son patron, Yves Guillemot.

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