New York (awp/afp) - Après un court répit, les difficultés des fleurons de la grande distribution américaine ont ressurgi au premier trimestre, caractérisées par une chute des bénéfices, des banqueroutes, une hécatombe en Bourse et la fermeture de milliers de magasins.

Depuis le début de l'année, environ 7.000 magasins ont été fermés par les enseignes aux Etats-Unis, soit davantage que sur l'ensemble de l'année 2018, selon un décompte effectué par l'AFP.

Gap (230 magasins fermés), Victoria's Secret (53), Chico's (250), Family Dollar (390), Fred's (263) Dress barn (650 magasins), Payless ShoeSource (2.500), Gymboree (800), Charlotte Russe (520) et Shopko (371) font partie des chaînes ayant lancé de drastiques plans de restructuration.

Les cinq derniers groupes ont même déposé le bilan et demandé la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites, qui leur permet de continuer à opérer sans rendre des comptes à leurs créanciers.

"Cette décision a été difficile, mais nécessaire, la chaîne Dress barn ne donnant plus satisfaction en termes de rentabilité dans l'environnement actuel de la distribution", explique Steven Taylor, le directeur financier.

Ces entreprises ont également en commun le fait que leurs magasins sont souvent situés dans des centres commerciaux géants (malls) en perte de vitesse du fait de l'explosion des ventes sur internet.

En outre, elles n'ont pas investi suffisamment et tôt dans le commerce en ligne et dans la rénovation de leurs magasins, selon le cabinet Retail Metrics.

Amazon et les plateformes de vente de vêtements sur internet comme Stitch Fix et Rent the Runway grâce à leurs approches singulières -- des achats avec les conseils d'un styliste par exemple -- se sont engouffrés dans la brèche.

Abercrombie plonge

Les colosses de la "fast-retail" qui renouvellent régulièrement leurs collections tels que Zara et H&M, et la décision de grandes marques (Nike) de vendre directement leurs articles aux consommateurs ont aussi changé la donne.

Le secteur de la distribution est par ailleurs bousculé par la hausse du salaire horaire minimum en pleine dynamique du marché du travail, l'augmentation des coûts de transport et la guerre des promotions.

Conséquence: les bénéfices ont plongé, entraînant dans leur chute les actions en Bourse.

Abercrombie & Fitch a enregistré une perte nette de 19,1 millions de dollars au premier trimestre et son titre est en baisse de 14% depuis janvier à Wall Street. Le groupe, qui essaie de redorer son image après plusieurs scandales, va fermer trois nouvelles boutiques emblématiques -- une à Soho à New York, une à Fukuoka au Japon et une autre à Milan.

La chaîne de magasins de vêtements Forever 21 est, elle, en train d'envisager un dépôt de bilan qui pourrait s'accompagner de centaines de suppressions d'emplois, selon la presse américaine.

En Bourse, la performance du secteur de la distribution au mois de mai a été la plus mauvaise depuis novembre 2008, en pleine crise financière. L'indice sectoriel ETX (XRT) a ainsi perdu 12,3%.

Les choses pourraient empirer dans les prochaines semaines, en raison du regain de tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine, craint la banque UBS, qui redoute la fermeture de 12.000 magasins supplémentaires.

Les deux premières puissances économiques s'imposent des tarifs douaniers supplémentaires réciproques sur leurs importations, ce qui perturbe la chaîne logistique des groupes américains de la distribution.

Certains noms tirent toutefois leur épingle du jeu, à l'image de Target et Walmart, dont l'offensive dans la vente sur internet a permis d'élargir leur clientèle aux millenials (17-34 ans) et aux classes sociales aisées, selon les experts.

Walmart a racheté les sites internet Art.com et de lingerie barenecessities.com pour séduire une clientèle jeune et branchée.

L'enseigne a aussi rénové ses magasins physiques où elle propose désormais des services vétérinaires et teste des technologies. Ses ventes sur internet aux Etats-Unis se sont envolées de 37% au premier trimestre.

afp/rp