La période des soldes qui a débuté mercredi - un moment crucial pour les commerçants - ne compensera probablement pas les pertes subies lors de la période des Fêtes, a dit à Reuters l'homme de 62 ans, qui n'a engrangé que la moitié du chiffre d'affaires qu'il espérait faire en décembre.

Son inquiétude est partagée par la plupart des commerçants parisiens, voyant que les perturbations dans les transports continuent en ce début d'année.

"Depuis décembre, c'est juste l'enfer", a dit Emile Sebbag.

L'un de ses magasins, où on trouve des jeans, des sacs à main, des survêtements de marques comme Guess ou Replay, situé dans le Forum des Halles, est particulièrement dépendant des transports.

"C'est la mort. Je paye un loyer. Il y a un vrai risque de faire faillite", dit-il.

Les ventes des commerces parisiens ont chuté de 30 à 50% durant le mois de décembre, alors que la plupart des magasins attendaient cette période pour réaliser une large part de leur chiffre d'affaires annuel, selon la Confédération des commerçants de France.

La région parisienne est la plus affectée par les perturbations, mais des signes montrent que l'économie globale du pays commence à être affectée, à mesure que les touristes annulent leurs réservations, que les consommateurs désertent les boutiques et que les salariés rencontrent des difficultés pour se rendre au travail.

Les manifestations contre la réforme des retraites s'ajoutent aux difficultés qu'ont rencontrées les commerces pendant la crise des "Gilets jaunes", obligés de fermer de nombreux samedis de suite.

Pour la première fois depuis décembre 2018, l'indice de confiance des ménages français, mesuré par l'Insee, s'est détérioré dans des proportions supérieures aux attentes, reflétant les préoccupations des consommateurs.

VENDRE SON COMMERCE

Et même si les revendeurs indépendants, comme Emile Sebbag, - qui avaient déjà des difficultés à se maintenir à flot en raison de la concurrence accrue des grandes chaînes et des boutiques en ligne - souffrent davantage que les autres, les grandes compagnies, comme Hermes dans l'industrie du Luxe, qui a fait de la capitale l'un de ses principaux points de vente, devraient aussi connaître des difficultés.

Des entreprises comme Richemont, maison mère de Cartier, qui doit publier ses résultats la semaine prochaine, avaient déjà pâti des manifestations des "Gilets jaunes" en décembre 2018.

Même des grands magasins comme le Printemps affichent leur inquiétude, bien que les groupes de touristes chinois soient moins susceptibles d'annuler leur visite, les lignes aériennes ayant moins été affectées par les grèves.

"Je ne pense pas que la période des soldes nous permettra de compenser (pour le mois de décembre)", a dit Pierre Pelarrey, directeur du Printemps Haussmann. Les fréquentations du magasin ont diminué de 20% en décembre, avec des revenus en baisse de 8%par rapport à l'année précédente.

Unibail-Westfield-Rodamco, propriétaire du centre commercial des Halles à Paris et d'autres centres commerciaux en France, a précisé que l'impact des grèves était très différent d'un centre à l'autre, mais qu'un nombre très limité d'entre eux avait été affecté.

Le groupement national des indépendants Hôtellerie et Restauration évalue entre 720 et 740 millions d'euros la perte globale de chiffre d'affaires pour ces secteurs lors du mois écoulé.

Emile Sebbag, dont la deuxième boutique se trouve dans une galerie des Champs-Elysées, espère que la grève se terminera bientôt et que les promotions inciteront les gens à acheter. Il ajoute craindre pour l'avenir de ses 14 employés.

A 62 ans, dont 30 dans le métier, l'indépendant sent qu'il est, malgré tout, sur le point de faire faillite.

"Je ne pense qu'à une chose: vendre", dit-il.

(Sarah White, Emilie Delware, Noémie Olive, et Leigh Thomson, version française Caroline Pailliez, édité par Jean-Philippe Lefief)