Ce revirement du géant des produits de grande consommation permet aussi à la Grande-Bretagne de conserver sur son sol, au moins pour un temps, l'une de ses plus grandes entreprises à moins de six mois de sa sortie de l'Union européenne.

L'abandon de ce projet, qui devait être soumis au vote des actionnaires le 25 octobre à Rotterdam et le lendemain à Londres, constitue également une victoire pour les investisseurs qui redoutaient d'être contraints de vendre leurs titres si l'action Unilever n'était plus cotée sur le FTSE 100, l'indice phare de la Bourse de Londres. Ces investisseurs britanniques s'interrogeaient aussi sur la fiscalité s'appliquant aux dividendes néerlandais.

"Nous sommes ravis qu'ils aient abandonné le projet de siège unique aux Pays-Bas", a déclaré Ali Miremadi, gérant de portefeuille chez GAM, qui envisageait de voter contre cette proposition.

"Le groupe peut désormais se concentrer sur l'essentiel: générer de la valeur à long terme pour les actionnaires", a-t-il ajouté.

Plusieurs actionnaires, représentant 12% du capital, avaient exprimé leur opposition à ce projet.

Le choix d'un siège unique aux Pays-Bas était aussi perçu comme un moyen de renforcer les défenses du groupe en s'abritant derrière la législation néerlandaise sur les OPA.

Le fabricant des savons Dove et des glaces Ben & Jerry's avait décidé de renoncer à sa double structure à la suite d'un examen approfondi de son activité lancé après la tentative d'OPA hostile de son concurrent américain Kraft-Heinz pour un montant de 143 milliards de dollars (124,3 milliards d'euros) l'an dernier.

LA DIRECTION FRAGILISÉE?

L'objectif déclaré du transfert du siège aux Pays-Bas était de rendre Unilever plus efficace et plus réactif face aux évolutions des comportements et des goûts des consommateurs, de plus en plus vigilants sur la qualité des produits et le respect de l'environnement.

Unilever a cependant dressé le constat vendredi que sa proposition n'avait pas reçu le soutien d'un important groupe d'actionnaires et a donc jugé plus approprié de la retirer.

"Le conseil d'administration va à présent réfléchir à la suite à donner et continuera à dialoguer avec nos actionnaires", a déclaré son président, Marijn Dekkers, ajoutant que le groupe maintenait son projet d'annulation de ses actions préférentielles de droit néerlandais.

Le cabinet de conseil Pensions & Investment Research Consultants Limited (PIRC) avait recommandé mercredi aux actionnaires de l'entité britannique d'Unilever de s'opposer au transfert du siège du groupe aux Pays-Bas.

Plusieurs investisseurs de premier plan avaient également fait savoir qu'ils voteraient contre ce projet.

"Cette volte-face ne devrait pas réellement affecter les activités du groupe à court terme mais elle pourrait accélérer le calendrier du plan de succession pour le poste de directeur général", a commenté Robert Waldschmidt, analyste chez Liberum.

L'action Unilever cotée à Londres recule de 0,8% vers 09h20 GMT et celle cotée à la Bourse d'Amsterdam est stable au même moment.

Selon Robert Waldschmidt, les titres Unilever souffrent surtout de la hausse des taux d'intérêt aux Etats-Unis, comme l'ensemble des marchés actions, et des difficultés persistantes des marchés émergents, notamment en termes de taux de change.

(Claude Chendjou pour le service français, édité par Bertrand Boucey)

par Martinne Geller