Traditionnelle valeur refuge sur le marché des changes, la devise japonaise s’octroie la faveur des cambistes dans un contexte de correction sur les bourses internationales et de flambée du VIX.

Qu’il soit temporaire, hypothèse la plus probable à ce stade, ou qu’il sonne le glas de la hausse des marchés, le repli actuel des indices boursiers déclenche une aversion au risque qui profite aux actifs jugés plus sûrs. Sur le marché des devises, la monnaie japonaise incarne depuis longtemps cette image de protection, grâce à un taux directeur toujours très bas, actuellement négatif (-0.1%).

Ceci étant, la chute de la paire USD/JPY, contrairement à la glissade de Wall Street, s’était en fait amorcée dès le début de l’année, à l’occasion d’une annonce inattendue de la banque centrale nippone (BoJ). L’institution avait opté pour une légère réduction de ses achats mensuels d’obligations à long terme, un ajustement technique plutôt standard pour répondre à l’amélioration de l’environnement économique.

Pourtant, les spéculations autour d’un durcissement progressif de la politique monétaire japonaise ont gagné en intensité et la tendance ne s’est plus inversée.

Même les tentatives du président de la BoJ destinées à calmer les ardeurs en marge de la dernière réunion de la banque centrale ont échoué. A l’occasion d’un nouveau statu quo le 23 janvier dernier, Haruhiko Kuroda avait en effet prévenu que l’inflation persistait à évoluer loin de son objectif et que la poursuite d’une politique ultra-accommodante, négative pour la valorisation du Yen, s’imposait.

Mais les attaques spéculatives n'ont pas cessé, forçant même l’autorité monétaire à intervenir sur le marché obligataire le 2 Février dernier afin de freiner la hausse des rendements.

Quelle attitude la Banque du Japon va-t-elle désormais adopter ? Va-t-elle persévérer et combattre la hausse du Yen aussi farouchement que par le passé ? En analysant le ton employé par les responsables nippons, en particulier le ministre des Finances Taro Aso, les inquiétudes ne paraissent pas aussi palpables qu'auparavant. La situation a changé. La croissance mondiale n'a jamais semblé aussi robuste depuis l'éclatement de la dernière crise financière et le contexte économique de la troisième force du globe offre à Tokyo une meilleure marge de manoeuvre.

Techniquement, alors que 108.50 résistait encore sur le couple USD/JPY, les arbitrages observés sur les marchés actions au profit des valeurs refuge a fini par faire céder ce support clé. La configuration graphique se dégrade désormais nettement sous 107.80, alors que la paire dégringole de plus de 4% depuis le début de l’année, dans des niveaux inédits en quinze mois.