Londres (awp/afp) - Le Royaume-Uni est devenu mercredi le dernier pays en date à vouloir bannir la vente de voitures essence et diesel pour limiter la pollution, un geste qui pourrait témoigner d'une révolution électrique définitivement en marche.

Trois semaines après le gouvernement français, Londres a annoncé mercredi qu'il voulait interdire la vente de voitures à combustion à partir de 2040 sur son territoire afin de réduire la pollution au dioxyde d'azote (NO2), responsables chaque année de 40.000 morts dans le pays.

Auparavant, la Norvège avait annoncé qu'elle voulait voir cesser dès 2025 les ventes de nouvelles voitures équipées seulement d'un moteur à combustion. Et la Chine a décidé l'an dernier que 12% des voitures vendues sur son territoire seraient électriques ou hybrides d'ici 2020.

Même sans action politique, l'amélioration de la technologie électrique au cours des dernières années laissait entrevoir la perte de vitesse des moteurs à combustion à l'horizon 2040, estime Alastair Lewis, professeur de chimie atmosphérique à l'Université de York. Mais ces interventions n'en demeurent pas moins remarquables selon lui.

"C'est hautement symbolique car cela montre au public et aux constructeurs qu'il n'est pas question de faire machine arrière sur l'électrification", estime-t-il.

Pour Stefan Bratzel, expert automobile et directeur du Center of Automotive Management (CAM), l'année 2016 a marqué "un tournant".

"Le scandale des moteurs diesel mêlé à l'instauration d'objectifs environnementaux et à des régulations pro-électromobilité, en particulier en Chine, ont déclenché une énorme dynamique", explique-t-il dans une analyse publiée il y a quelques mois.

Une dynamique qui pousse les constructeurs à investir plus massivement dans ces technologies: le groupe suédois Volvo a carrément annoncé au début du mois qu'il ne lancerait plus que des modèles électriques ou hybrides à compter de 2019.

-Nouvelles questions environnementales-

Les chiffres demeurent néanmoins modestes pour l'instant. Selon l'Association des constructeurs européens d'automobiles (Acea), le marché des voitures propres (électriques ou hybrides) reste minoritaire en Europe occidentale, où plus de 95% des nouveaux véhicules enregistrés en 2016 roulaient soit au diesel (49,5%), soit à l'essence (45,8%). En Chine, premier marché de l'électrique, elles représentaient 1,8% du marché total, estime le CAM.

Selon les scénarios de la CAM, les nouvelles immatriculations de voitures électriques dans le monde devraient continuer de "grimper de façon modérée d'ici 2020, avec entre +2,5 et +6%". Avant de connaître un bond de 40% d'ici 2030.

Entre-temps, il faudra résoudre la question du nombre de bornes de rechargement sur la voie publique et celui de l'autonomie des véhicules, c'est-à-dire la distance qu'ils peuvent parcourir après une recharge.

"En moyenne, la voiture électrique a une autonomie de 250-300 km. Si on atteint les 400-500 km, c'est suffisant", estime Flavien Neuvy, économiste et directeur de l'Observatoire Cetelem.

Mais les batteries à forte capacité de stockage coûtent encore très cher, souligne Jean-François Bélorgey, associé chez EY, responsable du secteur automobile.

"Il va falloir que l'industrie automobile arrive à faire baisser le prix (de la voiture électrique) car les gens n'ont pas les moyens de dépenser 5.000 à 10.000 euros de plus dans une voiture", dit-il.

En outre, se pose le problème du recyclage des batteries et celui de la production d'électricité nécessaire à les alimenter, qui présentent de nouveaux défis environnementaux.

"La voiture électrique est moins polluante qu'une voiture thermique au moment de l'usage mais sur le bilan environnemental total, la voiture électrique n'est pas propre" souligne Flavien Neuvy, évoquant toute la chaîne de production "de la production de l'électricité à la destruction de la voiture".

Il prédit donc que "c'est prendre un pari audacieux" que de penser que la fin du moteur thermique se profile.

"Le moteur thermique d'un point de vue environnemental n'a pas dit son dernier mot", dit-il, pointant déjà des progrès comme "les voitures roulant avec 2 litres au 100 km".

afp/rp