DZ Bank a finalement capitulé hier sur Wirecard. La banque allemande, qui recommandait jusque-là à ses clients d'acheter l'action en la valorisant 132,80 EUR, est repassée à "conserver". Et dire que le marché pensait que le rapport de KPMG, qui "écarte le spectre d'une grosse manipulation comptable", allait dissiper le malentendu né il y a plusieurs mois des révélations de manipulations des comptes lancées par le Financial Times !

 

Ce rapport, sorti avec huit jours de retard, absout il est vrai l'entreprise d'une faute grave. Mais les auditeurs ont aussi expliqué qu'ils n'avaient pas eu accès à toutes les données qu'ils avaient demandées, à cause de la rétention opérée par certaines "tierces parties". Et finalement, l'opération "transparence 100%" est un fiasco. L'investisseur activiste Chris Hohn en a profité pour demander à nouveau la tête du PDG, Markus Braun, comme s'en rengorge le FT ce matin.

Graphique Wirecard AG

Les analystes de DZ Bank regrettent que le rapport de KPMG ne constitue pas le point final de cette affaire. Au contraire, la firme d'audit a confirmé que quelque chose ne tourne pas complètement rond. De surcroît, la publication du rapport annuel 2019 a été reportée, ce qui constitue un nouveau signal négatif. Compte tenu de l'incertitude liée à ces aléas juridiques, DZ Bank a intégré une prime de risque plus élevée dans sa modélisation, ce qui aboutit à réduire assez significativement son objectif de cours à 105 EUR.

Baader Helvea a une lecture différente, sans être dupe. La banque suisse reste à l'achat sur le titre, en visant 240 EUR. "Après la lecture complète du rapport spécial de KPMG, notre conclusion est qu'il n'a pas constitué le feu vert que nous espérions car plusieurs questions importantes n'ont, au final, pas reçu de réponse", écrit-elle dans un rapport de recherche. Au final, les détracteurs de l'entreprise se voient confortés dans leur analyse, tandis que ses soutiens peuvent toujours clamer qu'aucune découverte significative n'a eu lieu. Par conséquent, c'est une mauvaise nouvelle, les discussions concernant l'interprétation des données publiées par la société vont continuer, regrette Baader Helvea, qui dégaine quand même un élément positif : les travaux de développement et d'intégration menés par Wirecard vont lui permettre de s'affranchir au fur et à mesure du recours aux fameuses tierces-parties pour ses transactions.

Dans cette affaire, Wirecard a pour l'instant joué et perdu. On ne peut clamer partout que la transparence sera totale et se retrouver avec des zones d'ombres, fussent-elles minimes. C'est une bonne leçon, qui nécessite probablement une réforme de la gouvernance de l'entreprise allemande, si elle veut continuer à jouer dans la cour des grands.