Vienne (awp/afp) - L'Opep et ses partenaires, dont la Russie, devraient maintenir jeudi leurs quotas de production de pétrole jusqu'en mars 2018 dans le but de réduire les stocks mondiaux et de peser sur les prix, une stratégie rendue compliquée par le dynamisme de l'offre américaine.

Avant le début de la réunion du cartel à Vienne, l'Arabie Saoudite, chef de file de l'organisation et premier exportateur mondial, a écarté toute baisse de production supplémentaire, à la déception des marchés qui espéraient un objectif plus ambitieux et avaient déjà intégré le scénario d'une reconduction des quotas.

Dans une décision historique, les 13 membres du cartel avaient décidé en novembre 2016 de limiter leur production, entraînant dans ce mouvement 11 pays producteurs extérieurs à l'organisation, dont la Russie.

Ce pacte était valable jusqu'au 30 juin mais les pays producteurs ont entamé jeudi une journée de discussions dans le but de prolonger cet effort, car l'accord de 2016 n'a pas véritablement rempli son objectif de soutenir durablement les prix du brut et d'éliminer l'excédent d'offre.

Le ministre saoudien de l'Energie, Khaled al-Faleh, a indiqué, à l'ouverture de la réunion, qu'il y avait consensus pour estimer qu'une reconduction des quotas sur neuf mois "au même niveau de production" représente "l'option la plus sûre, presque certaine" pour permettre un rééquilibrage progressif.

"Les réserves mondiales seront ramenées à leur moyenne des cinq dernières années au premier trimestre 2018", a-t-il assuré, jugeant personnellement que le rééquilibrage aurait lieu plus tôt.

"De nombreux pays sont prêts à agir si c'était nécessaire, mais ce ne sera pas le cas. Les réserves mondiales commencent à reculer", a-t-il expliqué.

Seul changement à venir: la Guinée équatoriale, qui rejoint officiellement le cartel, va participer aux baisses de production, a annoncé le ministre saoudien.

Depuis l'accord de fin 2016, le cours du baril s'est redressé, évoluant dans une fourchette entre 45 et 55 dollars à New York, alors qu'il était tombé jusqu'à 26 dollars en février 2016, une tendance que l'Opep souhaiterait conforter.

"Il y a eu un niveau de respect des quotas unique", s'est félicité le ministre russe de l'Energie, Alexandre Novak.

Alors que la Russie s'était déjà alliée à l'Opep en de précédentes occasions, elle n'avait toujours pas respecté ses quotas. Cette fois, elle se targue d'avoir dépassé son objectif en abaissant sa production de 310.000 barils par jour sur les premiers jours de mai, contre un objectif de 300.000 barils.

Selon le comité de suivi de l'accord de réduction de production, les engagements de production des pays Opep et non-Opep ont été respectés à plus de 100% en avril.

- Un accord russo-saoudien -

La prolongation du pacte a été instiguée par l'Arabie Saoudite et la Russie, seuls pays avec les Etats-Unis à dépasser les 9 millions de barils par jour.

Les marchés ont accueilli sans enthousiasme jeudi les propos du ministre saoudien.

Les cours du brut, qui évoluaient en petite hausse auparavant, sont montés à de nouveaux plus hauts en un mois alors que les ministres s'exprimaient à leur arrivée (54,67 dollars le baril pour le Brent et 52,00 dollars le baril pour le WTI) avant de perdre près de 2 dollars en quelques minutes puis de remonter pour atteindre 53,52 dollars pour le Brent et 50,86 dollars pour le WTI à 14H40 GMT (16H40 à Paris).

"Les marchés tablaient déjà sur une extension de neuf mois. En réalité, puisqu'il n'y a pas eu de bonne surprise, les prix ont reculé", a expliqué à l'AFP Deshpande Abhishek, analyste chez Natixis.

"Cet accord a permis aux prix de revenir au-dessus de 50 dollars, et ceci va mener à une hausse de l'activité des producteurs de pétrole de schiste américain", a-t-il ajouté.

Le pétrole de schiste profite d'un cycle de production plus court et les entreprises américaines profitent des hausses de prix créées par les baisses de l'Opep pour extraire à plein régime.

En 2014, l'Opep avait opté pour une stratégie risquée consistant à inonder le marché d'or noir pour évincer ses concurrents, notamment américains. Mais cette politique avait provoqué une dégringolade spectaculaire des prix, sans durablement affaiblir les producteurs de pétrole de schiste.

Acculées en raison de la saignée budgétaire causée par la baisse des cours, les pétromonarchies et la Russie avaient décidé de fermer les vannes. L'accord de fin 2016 porte sur une baisse globale de 1,8 million de barils par jour.

afp/rp