par Manuel Ausloos

PARIS, 19 août (Reuters) - En plein cœur de Paris, Rachid Bouanou, ancien marin, ouvre sa librairie, une grande caisse en bois vert wagon posée un mur surplombant la Seine, et arrange avec soin les livres anciens d'occasion à l'attention des promeneurs.

Les touristes sont de retour dans la capitale française, au soulagement des bouquinistes des quais de Seine qui craignaient de voir ces étals, qui remontent au XVIe siècle, disparaître dans le sillage de la pandémie du coronavirus.

De nouveaux libraires ont même fait leur apparition, 18 avec Rachid Bouanou, longtemps mécanicien sur un bateau de pêche, sur les trois kilomètres le long de la Seine dédiés à cette activité.

"Avant j'étais marin (...) mais j'ai toujours aimé les livres, trouver des beaux livres, des auteurs. Et je me suis dit pourquoi pas partager cette passion là et à la fois découvrir de nouvelles choses", a-t-il déclaré, souriant.

"Quand les clients viennent ici, ce n'est pas forcément pour acheter des choses qu'ils connaissent. On leur fait connaître des livres, des auteurs donc aussi pour dépoussiérer des choses qui ne sont pas du tout connues et ça, c'est le rôle du bouquiniste."

Non loin de là, Jan et Maria-Aida Vandemoortele, originaires de Bruges, en Belgique, ont parcouru avec bonheur les vieux livres et journaux en vente chez les bouquinistes.

"Il n'y a qu'à Paris qu'on trouve ces étalages avec des livres merveilleux", dit Jan Vandemoortele, 68 ans. "Nous venons de voir un 'Time magazine' de l'époque où nous sommes nés, donc quelqu'un a gardé ça pendant 60 ans, mon Dieu, c'est merveilleux."

Les emplacements, très convoités, sont attribués pour une période de cinq ans par le conseil municipal. Les libraires ne paient pas de loyer mais doivent ouvrir au moins quatre jours par semaine et, en temps normal, les étés animés compensent le ralentissement des ventes en hiver.

Rachid Bouanou et les 17 autres nouveaux vendeurs ont été sélectionnés récemment, portant le total de bouquinistes à environ 230. Ce sont les premiers nouveaux libraire des quais de Seine nommés depuis 2019, avant que la pandémie n'éloigne les touristes locaux et étrangers.

"On a une activité qui reprend vraiment", a déclaré Jérôme Callais, président de l'association culturelle des bouquinistes de Paris. "On vient d'avoir deux années de pandémie avec des confinements qui nous ont totalement bloqués dans notre activité (...) Là non seulement les touristes reviennent, les nouveaux nominés s'installent, les gens sont heureux parce que la vie reprend ses droits".

Les étalages de livres des bords de Seine ne sont d'ailleurs pas réservés qu'aux touristes.

"C'est très encourageant, c'est un signe que ça ne va pas disparaître", a déclaré Kubilai Iksel, un Parisien de 27 ans. "C'est l'une des choses les plus merveilleuses de Paris". (Rédigé par Ingrid Melander ; version française Elena Vardon, édité par Kate Entringer)