par Lilla Zuill et Jonathan Stempel

Il a aussi obtenu des pouvoirs publics américains un nouveau renflouement de 30 milliards qui pourrait ne pas être le dernier, tant sa survie est jugée indispensable à l'équilibre déjà précaire du système financier mondial.

Le groupe avait déjà obtenu l'an dernier du Trésor et de la Réserve fédérale des engagements représentant au total 150 milliards de dollars, en échange desquels il avait cédé près de 80% de son capital à l'Etat.

La Maison Blanche a justifié ce nouveau renflouement pour couper court à tout "risque systémique" que pourrait poser l'assureur. Robert Gibbs, porte-parole de la Maison Blanche, a dit que le gouvernement avait jugé que le risque de ne plus intervenir pour AIG était "inacceptable".

La Maison Blanche a également fait savoir que le président Barack Obama prendrait des mesures pour éviter qu'il ne se produise une catastrophe économique.

Mais Maurice "Hank" Greenberg, un ex-directeur général de l'assureur, a annoncé de son côté qu'il avait porté plainte jeudi contre AIG pour infraction au droit boursier. Il réclame à l'assureur la différence entre le prix qu'il a payé pour certaines actions du groupe et ce qu'elles auraient valu sans les "omissions et déformations importantes" d'AIG. Il lui réclame également le remboursement de la différence fiscale qu'il estime avoir indûment acquittée.

Le nouveau renflouement annoncé lundi lui permet d'échapper pour l'instant à une dégradation de ses notes de crédit, qui l'obligerait à débourser des garanties de plusieurs milliards de dollars dont il ne dispose pas.

Il a été dévoilé trois jours après le nouveau plan de soutien au groupe bancaire Citigroup qui, comme AIG, s'efforce de céder des filiales et de lever des capitaux frais. Mais le marché est actuellement "assez désastreux", a expliqué son directeur général, Edward Liddy, lors d'une téléconférence, ajoutant que le redressement d'AIG prendrait "plusieurs années".

Le plan de renflouement du Trésor et de la Fed rappelle qu'AIG est présent dans plus de 130 pays, qu'il assure plus de 100.000 entreprises et organisations employant au total plus de 100 millions d'Américains et qu'il compte plus de 30 millions d'assurés individuels rien qu'aux Etats-Unis.

Washington admet déjà que ce nouveau renflouement pourrait ne pas être le dernier. "Etant donné le risque systémique que représente toujours AIG et la fragilité actuelle des marchés, le coût potentiel pour l'économie et le contribuable d'une inaction gouvernementale serait extrêmement élevé", explique l'administration dans un communiqué.

"Cela va prendre du temps et peut-être nécessiter un nouveau soutien du gouvernement si les marchés ne se stabilisent pas et ne s'améliorent pas", ajoute-t-elle.

PRÈS DE 100 MILLIARDS DE DOLLARS DE PERTES EN 2008

La perte trimestrielle dévoilée lundi par AIG - la cinquième consécutive - équivaut à 22,95 dollars par action et est à comparer à la perte de 5,29 milliards (2,08 dollars/action) du dernier trimestre 2007.

Les pertes des trois derniers mois de 2008 représentent environ 465.000 dollars par minute.

Sur l'ensemble de l'an dernier, le groupe a accumulé des pertes de 99,29 milliards de dollars, un montant proche de la totalité des profits qu'il avait réalisés depuis le début des années 1990.

Le nouveau renflouement d'AIG se traduira notamment par un assouplissement des modalités de mécanismes de financement déjà mis en place, et il prévoit la conversion d'une partie de ses dettes en titres préférentiels détenus par l'Etat dans deux de ses principales filiales, American International Assurance et American Life Insurance Co., toutes les deux fortement implantées en Asie.

AIG a aussi annoncé son intention de scinder une partie de ses activités d'assurance dommages, qui seront renommées AIU Holdings.

Le groupe a précisé que ces liquidités devraient lui permettre de poursuivre ses activités au moins pendant un an.

A la Bourse de New York, l'action AIG a fini stable à 42 cents.

EN FINIR AVEC LE CONGLOMÉRAT

Lors de la téléconférence, Edward Liddy a estimé qu'AIG était devenue "trop complexe, trop lourde et trop opaque" pour pouvoir continuer de fonctionner comme un conglomérat mais il a ajouté qu'il faudrait "plusieurs années" pour scinder le groupe en plusieurs entreprises indépendantes.

Après le nouveau renflouement par le Trésor et la Fed, "nous n'avons pas besoin de liquidités supplémentaires pour l'instant", a-t-il ajouté. "Personne ne sait ce qui se passera à l'avenir mais lorsque la situation s'améliorera, notre entreprise et les contribuables seront en bonne position."

De son côté, Paula Rosput Reynolds, directrice de la restructuration du groupe, a assuré que celui-ci avait reçu plusieurs manifestations d'intérêt de la part de repreneurs potentiels d'International Lease Finance Corp (ILFC), sa filiale de location d'avions, gros client d'Airbus et Boeing.

Les agences Standard & Poor's et Moody's ont confirmé les notes senior du groupe lundi, des notes qui se situent dans la zone "simple A", l'échelon moyen de la catégorie "investment grade".

Bruce Ballentine, analyste de Moody's Investors Service, dit s'attendre à ce que le gouvernement apporte au groupe "un soutien supplémentaire si nécessaire pour faire en sorte qu'AIG puisse honorer ses engagements durant cette période de récession économique grave et de turbulences sur les marchés".

Avec Walden Siew et Glenn Somerville, version française Gwénaëlle Barzic et Marc Angrand