(Répétition sans changement de l'analyse diffusée vendredi 8 décembre)

* Atos s'est bâti à coups d'acquisitions

* Le mix d'activités de Capgemini plus favorable

* Le match va se jouer sur le digital dans les années à venir

par Cyril Altmeyer

PARIS, 11 décembre (Reuters) - Fort d'un solide portefeuille d'actifs, Capgemini paraît à moyen terme mieux positionné qu'Atos, dont la croissance à coup d'acquisitions l'expose à certains secteurs dont les perspectives de croissance ne sont pas forcément très prometteuses, estiment des analystes.

Depuis la nomination de Thierry Breton à la tête d'Atos en novembre 2008, la SSII a multiplié par sept son cours de Bourse, surperformant nettement Capgemini et leurs principaux concurrents, les américains Accenture et IBM.

Atos, dont le chiffre d'affaires a plus que doublé sur la période pour atteindre 11,7 milliards d'euros en 2016, talonnant ainsi Capgemini, reste distancé par le groupe de Paul Hermelin en terme de marge opérationnelle (11,5% contre 9,4% pour Atos l'an passé).

Thierry Breton a acquis une série d'actifs - dont les prix attractifs s'expliquent en partie par leur positionnement sur des métiers déjà mûrs, comme la gestion de flottes d'ordinateurs et de l'hébergement de données - notamment auprès de l'allemand Siemens et de l'américain Xerox.

"Le problème est qu'ils emmagasinent via du M&A du chiffre d'affaires d'entreprises donc le 'mix' est plutôt autour de 80% d'activités traditionnelles et 20% d'activités en croissance", souligne Nicolas David, analyste chez Oddo Securities.

Capgemini se paye ainsi 15,4 fois ses résultats estimés 2018 contre 13,8 fois pour Atos, les deux étant toutefois nettement distancés par Accenture (20,8 fois).

L'ÉCART DEVRAIT SE CREUSER

Selon Berenberg, l'écart de valorisation entre les deux SSII françaises devrait se creuser en raison de meilleures perspectives de croissance, de rentabilité et de trésorerie chez Capgemini.

"Les objectifs de marge sont non seulement atteignables mais ils ne sont pas inscrits dans les cours", expliquait la banque dans une récente note, faisant référence au seuil de 12,5%-13% de marge opérationnelle visé par Capgemini à horizon 2019/20.

Capgemini est réputé particulièrement proactif, procédant sans état d'âme à des rotations d'actifs quand elles s'avèrent nécessaires pour garantir la croissance et les marges futures.

"Ils n'ont pas peur d'abandonner quelques activités et de lancer de nouvelles offres et même parfois lâcher des activités encore correctes mais qui risquent de s'effondrer dans cinq ans", observe Nicolas David (Oddo).

Compte tenu de son portefeuille d'actifs, Atos, qui n'a pas réalisé de grosse acquisition depuis celle de Xerox XTO en 2015, est condamné à reprendre ses emplettes s'il veut doper sa croissance.

"En organique, la croissance devrait plafonner autour de 2%, je ne la vois pas accélérer au-delà", souligne Nicolas David, pointant la trop forte exposition d'Atos à l'externalisation et la gestion d'infrastructures, un marché en stagnation en raison de fortes pressions tarifaires.

NÉGOCIER LE VIRAGE DU MARKETING DIGITAL

Atos pourrait ainsi viser des activités d'intégration de logiciels - comme celles de l'allemand SAP ou de l'américain Oracle - ou bien dans le digital, notamment sur le stockage de données via des 'data centers' et le cloud computing, estiment des analystes.

Capgemini n'entend pas non plus rater le virage du digital, afin de garantir voire d'accélérer sa croissance au cours des prochaines années, estiment des analystes.

"Capgemini est un 'pure player' du conseil, de l'intégration de logiciels et de la maintenance qui va avec, ce qui explique qu’en termes de cibles, ils n'ont pas vraiment les mêmes priorités" qu'Atos, souligne-t-il.

Dans le digital, Capgemini, bâti par des ingénieurs, s'est naturellement orienté vers les usines, mais il doit maintenant aussi combler des manques auprès des directions marketing, estime Nicolas David.

Capgemini pourrait ainsi emboîter le pas à Accenture, qui avait racheté Acquity, spécialiste du marketing digital, en 2013. Mais pas question pour autant de lorgner un groupe publicitaire comme Publicis, dont l'essentiel des activités est orienté vers le consommateur final, contrairement à Capgemini.

(Avec Blandine Henault, édité par Jean-Michel Bélot)